Les femmes du Prophète sont les mères des croyants, des modèles pour toutes les Musulmanes car elles étaient habitées par la piété véritable. Nous disposons de nombreux témoignages sur la foi et le comportement des épouses du Prophète, l’affection qu’elles lui portaient, leur sagesse et leur excellente moralité qui nous sont décrites dans le Coran, les hadiths, et les récits de la vie du Prophète.
Une des vérités énoncées dans le Coran au sujet des épouses du Prophète est qu’elles sont les mères des croyants:
Le Prophète a plus de droit sur les croyants qu’ils n’en ont sur eux-mêmes; et ses épouses sont leurs mères... (Sourate al-Ahzab: 6)
Dans un autre verset, Dieu interdit aux croyants d’épouser les femmes du Prophète après sa mort:
… vous ne devez pas faire de la peine au Messager de Dieu, ni jamais vous marier avec ses épouses après lui; ce serait, auprès de Dieu, un énorme péché. (Sourate al-Ahzab: 53)
D’autres versets du Coran nous révèlent que les femmes du Prophète ne sont pas semblables aux autres femmes et décrivent la façon dont elles doivent se comporter. Nous y lisons ceci:
Ô femmes du Prophète! Vous n’êtes comparables à aucune autre femme. Si vous êtes pieuses, ne soyez pas trop complaisantes dans votre langage, afin que celui dont le cœur est malade [l’hypocrite] ne vous convoite pas. Et tenez un langage décent. Restez dans vos foyers; et ne vous exhibez pas à la manière des femmes d’avant l’Islam (jahiliyah). Accomplissez la salat, acquittez-vous de la zakat et obéissez à Dieu et à Son Messager. Dieu ne veut que vous débarrasser de toute souillure, ô gens de la maison [du Prophète], et vous purifier pleinement. (Sourate al-Ahzab: 32-33)
Le comportement des pieuses épouses du Prophète, comme nous le révèlent ces versets, à savoir, leur bonne volonté, leur intelligence, leur conscience, leur modestie, leur façon de s’acquitter de leurs obligations religieuses, et leur obéissance au Prophète, ainsi que leur connaissance du Coran et des dires du Prophète en font des modèles pour toutes les Musulmanes.
Dieu a indiqué dans le Coran que les épouses du Prophète recevront une double rétribution:
Pour une turpitude prouvée, le châtiment lui sera doublé par deux fois! Et ceci est facile pour Dieu. Et celle d’entre vous qui est entièrement soumise à Dieu et à Son Messager et qui fait le bien, Nous lui accorderons deux fois sa récompense, et Nous avons préparé pour elle une généreuse attribution. (Sourate al-Ahzab: 30-31)
La première des épouses du Prophète fut Khadija. Elle fut aussi l’une des premières croyantes. Quand le Prophète reçut la révélation pour la première fois, il lui en parla immédiatement. Khadija était réputée pour son intelligence, sa perspicacité et sa sagesse, et elle embrassa la foi sur le champ, apportant un immense soutien au Prophète dans les jours si éprouvants qui suivirent, en fournissant de grands efforts physiques et spirituels pour l’aider à diffuser le message du Coran.
D’autres épouses du Prophète telles que Sawda, Aïcha, Hafsah, Oum Habiba, Oum Salama, Safia, Maymouna, Zainab bint Jahsh, Jouwairya sont également citées pour leur abnégation, leur patience et leur loyauté envers le Prophète, et elles furent d’excellents modèles pour les croyants.
Le Prophète portait beaucoup d’intérêt à ses épouses et contribuait ainsi à accroître leur foi, leur santé, leur bonheur et leur connaissance. Il est dit que le Prophète jouait avec ses épouses et faisait même parfois la course avec elles. Ses compagnons ont décrit sa prévenance envers elles en ces termes: “Le Prophète aimait à plaisanter avec ses femmes...”
Aïcha a dit:
Je n’ai jamais vu un homme plus compatissant envers les membres de sa famille que Mohammad
Le Prophète était connu pour son équité vis-à-vis de ses épouses. Ainsi, il répartissait de façon égale ses visites entre elles.
Anas bin Malik dit:
Le Messager de Dieu avait neuf épouses. Aussi quand il répartissait ses séjours chez chacune, le tour de la première épouse ne revenait que le dixième jour. Elles (ses femmes) avaient coutume de se réunir chez celle d’entre elles où il devait passer la nuit.
Maints propos du Prophète expliquent qu’une épouse pieuse est un inestimable bienfait. Il a ainsi dit par exemple: “Le monde est une jouissance et la meilleure des jouissances est une femme pieuse.
Le Prophète a aussi indiqué aux compagnons comment traiter leurs épouses:
Le meilleur croyant, du point de vue de la foi, est celui qui a la meilleure conduite. Le meilleur d’entre vous est celui qui traite le mieux sa femme.
Le meilleur d’entre vous est celui qui se comporte le mieux envers ses femmes, et je suis le meilleur envers mes femmes.
Khadija était une riche commerçante de la Mecque. Celle-ci avait entendu parler du sérieux de Muhammad et de sa probité. Elle connaissait la valeur des hommes d'abord parce qu'en tant que commerçante avisée, elle traitait des affaires avec eux et, qu'ensuite, elle avait été mariée deux fois. Ses époux morts, elle demeura veuve.
Un jour, Abou Talib dit à son neveu : "Je suis un homme sans fortune, les temps sont devenus durs pour nous, nous avons été tourmentés par ces années de misère, et nous n'avons ni possessions matérielles ni marchandises. Cette femme, Khadîdjah, envoie des hommes de ton peuple pour faire des affaires avec sa fortune et ils en gagnent un bénéfice. Alors si elle vient vers toi, montre-lui ton honnêteté."
Elle avait donc fait appel à Muhammad pour conduire ses caravanes au nord et au sud de la Péninsule arabique.
Ainsi, le temps s'écoulait à la Mecque jusqu'au jour où As-Sayida Khadija s'était confiée à une amie Nafisa Bint Muniyyah. Elle lui avait manifesté son désir d'épouser Muhammad. Ce fut ainsi que cette amie avait fait les démarches nécessaires et avait obtenu son consentement.
Le mariage avait été célébré en présence des familles et des amis. Khadija était âgée de 40 ans quand elle l'épousa, et il en avait 25.
Elle lui donna 2 garçons, Al-Qasim, 'Abdullah (morts en bas âge), et 4 filles : Zaynab, Ruqiya, Oum Koulthoum, et Fatima.
La Révélation
La Péninsule Arabique était plongée dans l'idolâtrie et la Mecque était le lieu où convergeaient toutes les tribus. Celles-ci venaient chaque année en pèlerinage et se rassemblaient autour de la Ka'ba. Cette Maison antique était devenue un centre païen depuis de longs siècles.
Muhammad fuyait cette adoration et aimait se réfugier annuellement dans la grotte de Hira. Là, il réfléchissait au mystère de l'univers, en observant son étendue à travers l'immensité du désert et la lumière du ciel étoilé. Il sentait qu'il y avait, derrière et au-dessus de ces espaces, une force invisible qui les organisait et les gérait. Il demeura ainsi jusqu'à l'âge de quarante ans.
Entre temps, Khadija encourageait l'isolement périodique de son époux et lui apportait tout son soutien.
Ce fut lors de la nuit du destin, que Muhammad , agé de 40 ans, avait reçu la Révélation. Dieu l'avait choisi pour être le dernier Messager.
Quant le Prophète connut la frayeur et douta de ses facultés mentales, à cause de l'apparition surnaturelle de l'archange Gabriel, ce fut vers Khadija qu'il se réfugia et se confia. Aussi était-elle pour lui d'un grand secours et d'un immense réconfort. C'était auprès d'elle qu'il s'armait de patience et reprenait courage car les jours de repos étaient terminés puisque l'ange Gabriel lui transmis cet ordre du Seigneur de l'univers : Lève toi et avertit les gens. Appelle les à n'adorer que Dieu et Lui seul. Mais à qui allait-il faire appel et qui répondrait à son appel ?
La Prédication
Conformément aux instructions reçues de Dieu, le Prophète commença sa prédication en appelant les membres de sa famille, voire même ses proches amis, à embrasser l'Islam. Il va de soi que cette adhésion devrait regrouper les hommes et les femmes sincères et honnêtes. L'appel a été entendu par une poignée de personnes dont l'ambition et l'orgueil n'obscurcissaient pas l'esprit.
As-sayida Khadija, l'épouse du Prophète a été la première musulmane de l'histoire. Dès le premier instant, elle sut que sa vision dans la grotte de Hira était le prélude de sa mission prophétique. Elle ne se borna pas seulement à croire au Message, révélé à Muhammad, mais elle lui apporta son soutien moral et matériel. As-sayida Khadija, femme énergique et douée de bon sens, avait la manière d'apaiser les angoisses de son mari et de lui insuffler du courage quand elle sentait que son énergie faiblissait. Sa perspicacité lui laissait comprendre qu'un homme, aussi pur et aussi parfait que lui, ne pouvait pas être le jouet de manoeuvres sataniques.
Des êtres vertueux de son envergure et de sa trempe ne pouvaient pas être abandonnés par Dieu. Ils ne pouvaient s'attendre à aucune défection de la part de leur Créateur et de toutes les personnes qui éprouvaient pour eux de forts sentiments d'amitié. Or Khadija insistait auprès de son époux pour lui expliquer qu'il appartenait à cette catégorie d'homme que le Tout Puissant n'abandonne pas à leur sort, et que les amis bienveillants et chaleureux ne le délaisseront pas dans les moments si critiques soient-ils.
- Certes, jamais Dieu, lui dit-elle, ne t'ingligera d'affronts, car tu es uni avec tes proches, tu soutiens les faibles, tu donnes à ceux qui n'ont rien, tu héberges les hôtes et tu secours les hôtes des vicissitudes du droit.
Selon al-Bayhaqi, As-Sayyida Khadija, afin de tester la sainteté de l'apparition, dit à l'Envoyé de Dieu :
- Ô fils de mon oncle ! Peux tu m'informer du moment ou ton compagnon t'apparaîtra ?
Ainsi, alors que le Prophète se trouvait chez Khadija, l'archange Gabriel se manifesta à lui. Il en avertit son épouse car il le voyait distinctement. Ce qui n'était pas le cas de son épouse. Celle-ci lui demanda de s'asseoir à sa droite et lui demanda s'il continuait à le voir. En effet, l'apparition se maintenanit.
Puis, elle lui demanda une autre fois de poser sa tête sur ses genoux. La vision ne quittait toujours pas l'intérieur de la maison.
Ensuite, elle ôta le foulard qui couvrait sa tête, laissant ses cheveux à l'air libre, ce qui était un geste d'intimité qui détournerait le regard de toute personne pudique. Devant une telle scène, l'archange s'éclipsa aussitôt. Ce fut alors qu'elle dit :
- Ce n'est pas un démon. C'est bien un ange qui se montre à toi, ô fils de mon oncle !
Il n'y avait plus aucun doute dans l'esprit de as-sayyida Khadija. Son époux était bien l'Envoyé d'Allah et l'ange Gabriel le transmetteur du Message divin.
Certes, as-sayyida Khadîja avait une totale confiance en son mari. Cependant, ce n'est pas seulement cette confiance qu'elle lui portait qui l'amena à embrassa la religion de Dieu. La cause profonde de cette adhésion était sa conviction que la religion communiquée au Prophète était celle de la droiture et de la rectitude, celle qui suivrait en droite ligne la guidance spirituelle et morale d'Abraham.
Cette évidence la conduisit à faire confirmer ce qu'elle avait entendu de la bouche de son époux auprès de Waraqa Ibn Nawfal. Cet homme, âgé et d'une grande piété, était versé dans les questions religieuses. Il était aussi attentif à la venue d'un nouveau prophète.
Après lui avoir exposé tous les détails des événements vécus par son conjoint, le vieillard, d'un ton posé et bien assuré de ses paroles, répondit :
- Ô Khadîja ! Si tout ce que tu viens de me dire est absolument véridique, sache que c'est que le grand Nâmous (l'archange Gabriel) qui est venu... (Muhammad) est certainement le prophète de ce peuple. Dis-leur de s'en tenir fermement.
Aussitôt, as-sayyida Khadija retourna chez elle, confiante et assurée de ce qu'elle venait d'entendre. Elle en informa le Prophète.
Son soutien
Le Prophète ne pouvait pas rester insensible devant la foi aussi profonde que forte de son épouse. La vigueur du caractère de cette dernière exerçait chaque fois une attraction positive sur le moral de l'Envoyé de Dieu. Il en était ainsi chaque fois que son message sur l'Unicité d'Allah rencontrait des obstacles devant l'idolâtrie de son peuple. Elle était toujours là quand les Quraysh manifestaient leur répugnance et leur agressivité aux versets du Coran et quand, injustement, ils le traitaient, lui, de menteur. Elle dynamisait son ardeur et dissipait sa tristesse quand il revenait à la maison, l'air abattu par tant d'obstination et de résistance farouche.
Le Prophète se réjouissait, chaque fois, de voir que sous son toit, il y a avait constamment quelqu'un pour supporter sa mission, le soutenir dans ses activités si ardues et stimuler sa volonté.
La mort de Khadija
La vie entre les deux conjoints oscillait entre le haut et le bas mais plus souvent vers le bas, surtout le jour où les notables de Quraysh avaient décidé de camper le Prophète et sa famille en un endroit et d'organiser un blocus qui dura six mois.
Quelques temps après, son oncle paternel Abu Talib Ibn 'Abd al-Muttalib meurt. Celui-ci était son grand protecteur et son rempart contre l'autoritarisme des Quraysh. A sa suite, ce sera as-sayyida Khadîja, son épouse bien-aimée, qui quittera définitivement le monde terrestre, laissant son époux, provisoirement, seul et sans compagne.
Elle mourut trois années avant l'Hégire.
Cette fois, on peut dire que le Prophète était totalement orphelin. Ibn Ishâq a dit : « qu'elle était pour lui une sorte vizir de sincérité de l'Islam ». Ce fut ce que les historiens appelèrent « L'année du deuil ».
Son souvenir reste
Le souvenir de as-sayyida Khadîja était si intense qu'un jour, à Médine, Hâlah, la sœur de la défunte arriva à Médine. Quand le Prophète crut entendre sa première femme dans la cour de la maison, tant la voix de l'une ressemblait à l'autre. Son cœur se mit alors à palpiter très fort.
Le corps de as-sayyida Khadîja avait disparu mais son souvenir demeura gravé dans le cœur du Prophète. Il eut pourtant d'autres épouses mais il n'oublia jamais la première d'entre elles. L'amour qu'il portait à Khadîja rendait d'ailleurs 'Aïsha jalouse de tant de prévenance. Elle lui dit un jour :
« On dirait qu'il n'existe pas de femmes dans le monde en dehors de Khadîja ».
En une autre occasion, à la suite de certains reproches que 'Aïsha ne manquait pas de lui faire chaque fois qu'il parlait de sa première épouse en termes élogieux, il lui dit :
- Par Allah, elle a cru en moi quand les gens se montraient impies. Elle a tenu pour vrai ce que je disais au moment où les gens me traitaient de menteur. Elle m'a secouru avec ses biens quand les gens m'en privaient. Elle a été la femme qui m'a donné un garçon.
Depuis, 'Aïsha ne parla plus d'elle pour ne pas remuer la plaie de son époux.
Depuis la mort de Khadija , les jours s'écoulaient chargés du poids de la mission prophétique. Quant aux nuits, elles s'emplissaient du souvenir de la disparue. Ainsi, le Prophète demeurait sans compagne. De leurs côtés, ses compagnons observaient sur lui les effets de la tristesse. Ils auraient souhaité le voir briser sa solitude en se mariant le plus tôt possible.
Cependant, aucun des Compagnons ne prenait le courage de l'entretenir d'une éventuelle union. Il a fallu qu'un soir Khalwa Bint Hakim as-Salmiyya aille chez lui et lui dit :
- Ô Envoyé de Dieu ! Je te vois plongé dans la plus totale des tristesses depuis la mort de Khadija.
Elle l'observa un moment, puis soudain, elle lui proposa de se remarier. Le Prophète la regarda en silence, écoutant la voix de son coeur plein de souvenir de la défunte. Il se rappela alors du jour, voilà plus de vingt ans, où Nafisa Bint Muniyya vint à lui pour lui parler de mariage et lui présenter une éventuelle union avec Khadija.
Quelques temps après, le Prophète leva la tête et dit :
- Qui épouserais-je après Khadijah ?
Mariage du Prophète
Khawla avait deux propositions à faire à l'Envoyé de Dieu : une vierge, à savoir Aïsha et une déjà mariée mais séparée de son marie, c'est à dire Sawda Bint Zam'ah Ibn Qays Ibn Abd Shams Ibn Abd Waddi-l-'Amiriyyah.
Le Prophète donna son accord pour demander Sawda en mariage. Khawla se rendit aussitôt dans la maison de Zam'ah et se présenta devant Sawda en lui disant :
- Ô Sawda ! Dieu a fait entrer chez toi le bien et la bénédiction !
Etonnée de cette introduction emplie d'un bon présage, Sawda se demanda quelle nouvelle exceptionnelle Khawla allait lui communiquer. Elle ne tarda pas à apprendre que c'était l'Envoyé de Dieu qui la demandait en mariage. Elle n'arrivait pas à maîtriser sa stupeur mêlée d'étonnement et de joie. Elle répondit sans hésitation mais d'une voix tremblante :
- J'accepte cette demande. Mais va voir mon père et informe le de cette démarche.
Khawla n'hésita pas un instant. Elle se rendit sur le champ chez le père qui était un vieil homme, fatigué par le poids des années.
- Muhammad Ibn Abd Allah Ibn Abd al-Muttallib m'a envoyé pour te demander la main de ta fille Sawda.
Le vieillard fut transporté de joie à cette annonce surprenante mais il voulut connaître d'abords l'opinion de l'intéressée avant de faire la sienne. Celle-ci , bien sur, lui donna, sans hésitation, une réponse affirmative. Aussi, le père de Sawda demanda-t-il à Khawla d'inviter Muhammad de venir le voir afin d'officialiser cette union.
L'étonnement des gens
Le bruit circula dans la Mecque que Muhammad avait demandé en mariage Sawda fille de Zam'ah. Les gens ne voulaient pas en croire à leurs oreilles. Ils s'interrogeaient, un léger doute dans l'esprit : Sawda était non seulement veuve mais âgée. En outre, elle n'était pas très belle. Il y avait une très grande différence entre elle et Khadija, belle, riche et convoitée par de grands notables mecquois. De plus, elle avait une haute stature dans le milieu Qurayshite.
Ce que ces gens ne comprenaient pas, c'est que le Prophète n'avait nullement l'idée de remplacer Khadija par Sawda ou par n'importe quelle autre femme. Sa première épouse était considérée par lui comme irremplaçable. Il recherchait surtout une femme qui pourrait tenir et organiser sa maison. Il songea qu'elle en était capable et remplissait des conditions honorables. En effet, Sawda avait émigré en Abyssinie avec son mari as-Sakran Ibn Amru Ash-Shams. Celui-ci mourut quelques temps après son arrivée dans cette terre étrangère. Ce fut ainsi que Sawda devint veuve, loin de sa patrie.
Le souvenir de l'émigration de Sawda
La présence de Sawda auprès du Prophète rappelait à celui-ci le petit groupe dont les membres quittèrent leurs maisons et abandonnèrent leurs biens pour traverser le désert et la mer avant d'arriver en Abyssinie. Ils fuyaient, avec leur religion, l'oppression des idolâtres mecquois.
Dans ce groupe d'émigrants, il y avait Malik Ibn Zam'ah, frère de Sadawh, As-Sakran Ibn Amr, son mari et fils de son oncle paternel, les deux frères de ce dernier Salit et Hatib, son neveu, fils de son frère, Abd Allah Ibn Suhayl. C'est à dire que ce n'était pas le veuvage et l'âge avancé de Sawda qui importaient à l'Envoyé de Dieu. C'était le fait qu'elle appartenait au premier groupe de musulmans qui avaient cru en sa mission prophétique.
Aussi s'imagina-t-il Sawda en train de faire ses adieux à sa terre natale, cette terre où elle passa la plus grande partie de son enfance. Elle partait vers un pays qu'elle n'avait jamais connu, avec des gens dont certains étaient de sa famille et d'autres ne l'étaient pas. Elle savait qu'elle allait à la rencontre d'un peuple dont l'arabe n'était pas la langue véhiculaire et dont l'Islam n'était pas leur religion. Tous ces événements exercèrent sur le Prophète des sentiments favorables à l'égard de cette émigrante qui a connu le veuvage en exil et qui était revenue dans son pays pour prendre de l'âge. Sa vieillesse ne comptait pas devant la vie dure et pénible que cette seconde épouse avait traversée.
Sawda, consciente de son état d'épouse
Voilà Sawda, épouse de l'Envoyé de Dieu . Elle ne manqua pas de se comparer à Khadija, la première femme, puis à Aisha, cette jeune fille dont le mariage était attendu d'un mois à un autre. Elle ne pouvait donc qu'être étonnée de son état et cela la remplissait de joie d'être l'épouse du Prophète.
Elle ne se faisait pas, pourtant, beaucoup d'illusions. Elle savait, par expérience, qu'entre son coeur et celui de son mari, il y avait une barrière infranchissable. C'est qu'elle faisait une distinction entre le Prophète et l'être humain qu'il était. Elle n'ignorait pas que ce n'était pas avec l'homme qu'elle allait vivre. C'était l'Envoyé de Dieu qui la prit comme épouse. Elle comprenait donc que ses liens avec lui n'étaient pas tissés d'amour mais de bonté et de miséricorde de sa part.
Sawda n'était point perturbée par sa situation. Bien au contraire, elle était fière que l'Envoyé de Dieu la hisse à un rang si élevé. Il a fait d'une veuve et d'une femme âgée, la Mère des croyants. Cet honneur lui procurait beaucoup d'énergie et elle s'occupait, avec enthousiasme, de la maison de son époux et de ses filles.
Sawda ne ressentait ni amertume ni complexe d'infériorité. Elle était heureuse quand elle voyait le Prophète rire de sa démarche car son corps corpulent la balançait d'un côté et de l'autre. De la même manière, il se réjouissait de la vivacité de son esprit et de son humour. Sawda lui dit un jour en plaisantant :
- Cette nuit, j'ai prié derrière toi. Tu as mis tellement de temps dans ta prosternation que j'ai été amené à bouchez mon nez, de crainte que le sang y coule. Cette parole fit rire l'Envoyé de Dieu.
L'arrivée de Aisha et des autres femmes dans la maison du Prophète
Sawda continuait à s'occuper de la maison de son mari jusqu'à l'arrivée de Aïsha, la fille d'Abu Bakr. Elle lui céda le plus grand espace et mit tous ses efforts pour satisfaire la nouvelle mariée et veiller à son confort.
Après Aisha, d'autres épouses venaient agrémenter la vie familiale. Ce fut par ordre, Hafsa, fille de Umar Ibn Khattab, Zaynab, fille de Jahsh, Umm Salmah, fille de Abu Umiyyah al Makhzumi. Sawda continuait à accorder sa préférence à Aïcha en lui consacrant son amitié et son dévouement, sans pour autant le manifester ostensiblement pour ne pas mettre dans l'embarras les autres femmes de l'Envoyé de Dieu ou susciter leur jalousie. Elle ne tenait pas à être l'origine d'une possible discorde.
Cependant, le Prophète avait pitié de Sawda qui était privée de la même affection qu'il portait aux autres épouses. Il s'efforçait de lui ouvrir son coeur et de lui vouer des sentiments affectueux. Cependant, avant d'être Prophète, c'était aussi un homme. Aussi, s'il la plaçait sur le même pied d'égalité du point de vue des dépenses pour son entretien, il ne lui était pas aisé de se montrer équitable entre elle et les autres femmes, du point de vue sentimental. Ce fut pourquoi, il décida, en fin de compte, de se séparer d'elle. Aussi, un jour, attendit-il la nuit où il devait dormir avec elle pour lui annoncer sa détermination de divorcer de la manière la plus convenable.
En entendant la décision prise par son mari, elle sentir comme si les murs de la pièce se resserraient contre elle. Elle suffoquait et croyait que sa respiration allait s'arrêter. Elle garda le silence un moment, puis tendit sa main vers celle de son époux, comme pour lui demander de venir à son secours. Sentant cette main tremblante, le Prophète la serra très fort, pensant ainsi qu'il pourrait faire disparaître la peur qui envahissait tout son corps.
Prenant en mains toutes ses forces, Sawda, dont le visage trahissait la tristesse, déclara dans un murmure où se mêlaient la crainte et l'espoir :
- Garde-moi auprès de toi. Je ne te demande pas de te comporter avec moi comme avec tes autres épouses. Cependant, je voudrais être ressuscitée par Dieu, le Jour de la Résurrection, en tant que ton épouse.
Sawda, relâcha sa main. Elle n'attendait pas une réponse favorable à son désir bien qu'elle était décidée à rester aux côtés de son époux, en essayant aynt de satisfaire sa volonté.
A ce moment, Sawda ressentait la froideur de sa vieillesse gagner la lourdeur de son corps. Elle eut honte alors de vouloir rivaliser avec des femmes aussi jeunes et belle que Aisha, Hafsa, Zaynab... Elle se disait, qu'en exigeant le respect de son tour à dormir avec l'Envoyé de Dieu, c'est comme si elle revendiquait un droit qui ne lui appartenait pas. Aussi, était elle disposée à déclarer : Répudie moi, ô Envoyé de Dieu ! Cependant, ses paroles trébuchaient dans sa gorge. Elle n'arrivait pas à les libérer.
Sawda était torturée par ses sentiments. Son inquiétude se prolongea, attendant la décision du Prophète de la répudier. Soudain, une idée lui traversa l'esprit et dit calmement :
- Ô Envoyé de Dieu ! Garde-moi auprès de toi. Je laisserai mon tour d'intimité à Aisha. En outre, je ne réclamerai pas pour moi, ce que les autres femmes demanderont pour elles !
Cette proposition émut le Prophète . Voilà une femme qui ne tenait pas à le quitter et était prête à se sacrifier pour satisfaire les autres épouses et en particulier Aïsha, sa préférée. Le Prophète finit par accepter la proposition de Sawda. Celle-ci remercia Dieu qui lui suggéra cette proposition. Le Créateur, se dit-elle, soulagea sa peine et la sauva des amères épreuves, conséquentes à cette séparation avec le Prophète.
Mort de Sawda
Ainsi Sawda demeura dans la maison de l'Envoyé de Dieu , jusqu'au jour où Dieu l'appela à lui. Elle survécut à la mort de son mari. Elle ne mourut que vers la fin du califat de Umar Ibn Khattab.
Aisha n'oublia pas la belle oeuvre accomplie par Sawda qui lui sacrifia son tour. Le souvenir de la fidélité à sa parole lui revenait souvent en mémoire.
- Il n'y a pas une femme, disait-elle de Sawda, que j'ai aimé tant pour sa volonté de renoncer à son droit.
Originaire de la Tribu des Kinana, Aisha était née environ 9 années avant l'Hégire, alors que la Révélation avait débuté depuis environ 3 ans. Elle était la fille d'Abû Bakr, ami fidèle et Compagnon le plus proche du Prophète qu'on appelait «As-Siddîq » (le véridique). C'est en compagnie de celui-ci que le Prophète accomplit l'Hégire vers Médine. Abu Bakr était marchand de vêtements à la Mecque.
La mère de Aisha, Um Rummân, était la fille de Umayr ibn Amr. Elle fut - avec son époux - parmi les premiers musulmans dès la première année de la Révélation et connut toutes les persécutions menées contre les fidèles de la nouvelle religion. Elle fut très active aux côtés de son époux et le Prophète lui annonça qu'elle aurait une place aux Paradis. Elle mourut avant la disparition de l'Envoyé d'Allah et ce fut lui qui la déposa dans sa tombe. Aisha nous a rapporté : « Je n'ai pas connu mon père et ma mère autrement que pratiquant la religion musulmane. »
Outre son frère 'Abdallah, Aisha avait une demi-sœur, Asmâ, fille d'Abû Bakr.
En ce qui concerne le mariage du Prophète avec Aisha , on nous rapporte que l'Envoyé d'Allah vit en rêve l'Ange Gabriel lui présenter un morceau d'étoffe dans lequel quelque chose était enveloppé.
Le Prophète lui demanda : « Qu'est-ce ? » et l'Ange Gabriel lui répondit : « Ta femme ! » En soulevant un coin de l'étoffe, il découvrit la jeune Aisha . Ce message lui parvint comme un ordre divin. Il se rendit donc chez son ami Abu Bakr pour lui demander la main de sa fille, que ce dernier lui accorda avec joie. On situe cet événement aux alentours de l'an 3 avant l'Hégire (620 ap. J. C.).
Aisha avait déjà été demandée en mariage par une famille de polythéistes, mais ceux-ci se mirent à craindre qu'en mariant leur fils avec Aisha , il n'embrasse également la nouvelle religion et abandonne leurs traditions. Ils furent donc extrêmement contents lorsqu'une opportunité leur permit de renoncer à cette union. [...]
Le jour où elle entra dans la Maison du Prophète , les choses se déroulèrent avec la plus grande simplicité, le repas de noces également. Ce jour-là, il n'y avait dans la maison qu'un bol de lait. L'Envoyé d'Allah en but une gorgée, donna le bol à Aisha qui en but également une gorgée, ainsi que les quelques autres personnes présentes. On était au mois de Shawwâl.
Aisha fut installée dans son appartement dont l'unique porte donnait sur la mosquée et fermait par un simple rideau. Le mobilier consistait en un matelas, un oreiller de fibres de dattiers, un tapis, deux jarres, l'une pour les dattes, l'autre pour la farine, ainsi qu'une cruche pour l'eau et un bol. Il y avait aussi une lampe à huile, qui, faute d'huile, ne fonctionnait pas souvent. Nous avons vu que le mobilier de chacune pouvait être différent en raison de ce qu'elles avaient apporté avec elles ou reçu en cadeau de leurs familles.
C'est la seule femme vierge que le Prophète épousa, toutes les autres Épouses avaient été déjà mariées et étaient devenues veuves. On nous rapporte que Aisha était jolie. Dinet écrit qu'elle était gracieuse, très spirituelle et instruite. Plus tard, Aisha devait dire que parmi les Épouses, certaines étaient plus belles, en particulier Zaynab, Juwayriya et Safiya (Qu'Allah soit satisfait d'elles).
Nous savons que Aisha fut, après Khadîja , l'Épouse préférée du Prophète . Mais elle n'était pas la « préférée » pour sa seule beauté, ni sa jeunesse, mais plutôt pour son intelligence et la vivacité de son esprit. Aisha a été choisie par "destin d'Allah" ; Allah est Le plus Savant ! Sa jeunesse était précisément un atout majeur pour la mission qu'elle allait devoir remplir tout au long de sa vie, comme nous le verrons plus loin.
On nous rapporte qu'un Compagnon posa la question au Prophète : « Qui aimez-vous le plus ? » - « Aisha, répondit-il » - « Pour les hommes, précisa-t-il. » - « Le père de Aisha ! » - « Et après lui ? » - « 'Umar ibn Al-Khattâb. » Puis, il énuméra d'autres personnages.» [Rapporté par Bukhârî]
II avait besoin d'une femme jeune, intelligente et enthousiaste, capable d'assimiler et d'interpréter les lois de l'islam auprès des femmes. Or, dès sa plus petite enfance, elle voyait le Prophète pratiquement chaque jour, lorsqu'il rendait visite à son ami Abu Bakr, dans sa maison, lui transmettant, au fur et à mesure, les versets du Coran qui lui étaient révélés par l'Ange Gabriel. Ils évoquaient également ensemble les différents événements concernant la Communauté des musulmans. Elle était vive et intelligente, nous l'avons dit, et elle apprit donc, dès son jeune âge, de la bouche même du Prophète , au fur et à mesure de la Révélation et des événements, tant avant qu'après son mariage, tout ce qu'elle devait savoir pour la mission d'enseignante qui allait lui incomber tout au long de sa vie.
Elle avait les qualités requises et, en raison de sa jeunesse qui la rendait assez perméable, elle était davantage susceptible de recevoir et de retenir, pour ensuite retransmettre les enseignements de l'islam. Elle était encore jeune au moment de l'Hégire. Cependant, chacun était unanime à dire que nul ne pouvait mieux raconter tous les détails de l'Émigration, même plusieurs années après. Toute jeune fille qu'elle était alors, elle participa avec sa sœur Asmâ aux préparatifs secrets destinés au voyage du Prophète et de son père Abu Bakr. Plus tard, lorsqu'elle fut entrée dans la Maison de l'Envoyé de Dieu, son éducation se poursuivit.
Dès qu'il rentrait, elle lui posait des questions. Lorsqu'il parlait aux gens dans la mosquée, elle se tenait auprès de la porte de son appartement, écoutant ce qu'il disait afin de profiter de son enseignement. C'est notamment par le fait de toutes les questions qu'elle posait à l'Envoyé d'Allah que nous sont parvenus bon nombre d'enseignements et de traditions.
Il nous a été rapporté que son savoir était égal à celui de tous les Compagnons et des Mères des Croyants réunis. Cela est facile à expliquer : elle était presque toujours présente lors des entretiens que le Prophète avait avec les Compagnons lorsqu'il leur transmettait la signification du message divin. Elle le voyait vivre au quotidien et rien de ce qu'il disait ou faisait ne lui échappait.
Ibn Abu Hurayra nous rapporte que :
« Aïsha, épouse du Prophète, n'entendait jamais une chose qu'elle ne comprenait pas, sans revenir à la charge auprès de lui, jusqu'à ce qu'elle l'eût bien saisie. » [Rapporté par Bukhârî]
Elle est reconnue pour avoir été l'une des plus grandes juristes de son époque. Elle avait, en outre, un goût développé pour les lettres et se distingua dans la poésie. Nous devons à l'insatiable curiosité de Aisha , des enseignements sur les sujets les plus divers. En voici quelques exemples :
- A la suite de la question sur le jihâd : « Ne pourrions-nous pas la faire ? » « Non, lui répondit le Prophète, le jihâd la plus méritoire pour vous les femmes, c'est un pèlerinage pieusement accompli » [Rapporté par Bukhârî] Ou selon une autre version : « Votre jihâd, c'est le pèlerinage ! »
- Le consentement obligatoire de la future épouse à son mariage. « La vierge a honte » avait fait remarquer Aisha . Le Prophète avait alors précisé : « Son consentement vaut par son silence. » [Rapporté par Bukhârî]
Nous verrons que de nombreux événements furent générateurs d'enseignements importants à la fois pour les femmes et pour l'ensemble des musulmans.
Aisha connaissait la généalogie et l'histoire de toutes les tribus de l'Arabie préislamique, ce qui était très important pour la « stratégie » que le Prophète dut mettre en place, afin que la Communauté puisse nouer des alliances avec les unes et les autres. Et nous constaterons que plusieurs des mariages du Prophète participèrent à ces rapprochements.
Aisha passe encore pour avoir eu de bonnes connaissances en médecine. Il semble qu'elle ait acquis ce savoir en particulier lors de la maladie du Prophète , alors que de nombreuses délégations se sont succédé à son chevet, en provenance de toutes les régions de l'Arabie, pour tenter de le délivrer de son mal, en lui prescrivant des médicaments que Aisha se chargeait elle-même de préparer.
On nous rapporte aussi à son sujet qu'elle participa, avec certaines des Épouses et d'autres femmes parmi les premières musulmanes, à plusieurs des campagnes militaires qui eurent lieu, notamment à Uhud, à la Guerre du Fossé, où les femmes apportèrent leur participation active en soignant les blessés et donnant à boire aux combattants. Le hadîth rapporté par Anas en témoigne :
« Je vis Aisha et Um Salama, les vêtements retroussés au point que je pouvais apercevoir le bas de leurs jambes, bondir avec les outres sur le dos et les vider dans la bouche de la troupe. Ensuite, elles venaient remplir leurs outres et retournaient à nouveau les vider dans la bouche de la troupe. » [Rapporté par Bukhârî]
Nous savons qu'il y eut des femmes musulmanes à toutes les campagnes militaires, sauf la première, à Badr. [...]
On signale que du vivant de l'Envoyé d'Allah , on comptait déjà 20 femmes juristes parmi les Compagnons. C'est dire l'importance du savoir pour tous les musulmans, y compris les femmes.
« La recherche du savoir est une obligation pour chaque musulman. »
[Rapporté par Bukhârî et Ibn Mâja]
Mais revenons à Aisha pour dire que nous lui sommes redevables d'un grand nombre de ahadith (environ 2.200). À ce propos, le Prophète a dit : « Aisha est la moitié de la religion ».
Le rôle de Aisha au sein de la famille du Prophète fut des plus important. Aisha fut, nous l'avons déjà dit, après Khadîja , l'Épouse préférée du Prophète. Anas ibn Malik a rapporté que le Prophète a dit : « La supériorité de Aisha sur les autres musulmanes est comme celle du tsarîd sur les autres mets. » II s'agissait du plat que préférait le Prophète.
De nombreux événements ont marqué la vie conjugale du Prophète.
Aisha était assez spontanée... ce qui provoquait parfois quelques incidents ; mais ceux-ci furent autant d'enseignements donnés aux musulmans, soit que la révélation d'un verset, soit qu'une parole ou un acte du Prophète soient parvenus aux musulmans avec, pour objectif essentiel, de les instruire dans leur religion en leur montrant la solution en fonction des circonstances. Nous relaterons ci-après ceux des événements qui semblent les plus marquants du point de vue des bienfaits apportés à la Communauté, événement liés à la présence de Aisha dans la maison de l'Envoyé d'Allah .
1 - L'affaire de la calomnie
L'affaire se situe en l'an 5 de l'Hégire. Aisha doit avoir autour de 14 ou 15 ans. Cet incident eut un caractère plus grave que tous ceux qui émaillèrent la vie de Aisha. Il survint après la révélation concernant le port du voile. Lorsque l'une des Épouses voyageait avec le Prophète , on descendait son palanquin de son chameau au moment des haltes. Ainsi, lorsqu'elle avait besoin de s'isoler un moment, elle le faisait de façon discrète, en s'éloignant du camp.
Il arriva donc, lors d'une halte, au retour de la campagne victorieuse menée contre la tribu des Banul Mustaliq, tandis que Aisha avait quitté son palanquin, que le Prophète donna le signal du départ et le palanquin de celle-ci fut remit sur le chameau. Compte tenu de sa légèreté, personne ne s'aperçut qu'elle n'était pas à l'intérieur, et la caravane reprit la route sans elle. Lorsqu'elle revint au camp, elle ne trouva plus personne ; sans s'affoler, convaincue qu'on s'apercevrait rapidement de son absence et qu'on reviendrait la chercher, elle demeura sur place et s'endormit.
Au petit matin, c'est un membre de la caravane, Safwân (dont la mère était la tante maternelle d'Abû Bakr), qui la trouva ainsi endormie. Il avait marché toute la nuit (il était chargé d'assurer l'arrière-garde afin de récupérer les retardataires ou encore les objets perdus). Il l'appela, puis la reconnaissant, la fit monter sur son chameau et la ramena en tenant l'animal par la bride, à marche forcée, pour rejoindre la caravane au moment où celle-ci faisait une nouvelle halte.
Cet incident - qui se situe après la révélation sur le voile - n'aurait pas eu d'autres suites si la jalousie n'avait habité le cœur de quelques personnes, les unes à l'égard de Aisha , les autres à l'égard de Safwân. Le voyage se termina sans que rien ne survienne. Arrivée à Médine, Aisha tomba malade pendant un mois. Elle n'imaginait pas qu'elle et Safwân étaient l'objet d'une telle « affaire ».
Le Prophète venait d'épouser Juwayriya , fille du chef de la tribu des Banul Mustaliq et ne se doutait pas non plus de ce qui se tramait. C'est pourtant à ce moment que débuta la calomnie contre Aisha et Safwân. Ce que le Prophète finit par savoir. Aisha s'étonnait de ce que l'Envoyé d'Allah ne s'attarde guère auprès d'elle alors qu'elle était malade. Il prenait de ses nouvelles et repartait, sans rester pour bavarder avec elle selon son habitude. Elle n'apprit les rumeurs calomnieuses dont elle était l'objet qu'après être rétablie, de la bouche de Um Mistah, mère d'un des auteurs de la rumeur.
Aisha en fut abasourdie et tomba de nouveau malade. Elle demanda au Prophète la permission de se rendre chez ses parents, afin de s'assurer auprès d'eux de ce qu'elle venait d'apprendre. Elle interrogea sa mère ; Um Ruman lui confirma la rumeur qui circulait, mais tenta de la réconforter en lui disant de ne pas trop attacher d'importance à ces commérages, [...].
Aisha , au lieu d'être réconfortée ou rassurée, pleura abondamment. On nous dit même qu'elle se serait évanouie.
Mais, contrairement à ce que pensait sa mère, aucune des Mères des Croyants (Qu'Allah soit satisfait d'elles) ne prit part à ces rumeurs. Il s'agissait de femmes pieuses et dignes, et, quelque motif de jalousie qu'elles auraient pu avoir, aucune ne contribua à colporter ces bruits. Bien au contraire, elles parlaient toutes en faveur de Aisha.
Par contre, Hamna, la sœur de Zaynab bint Jahsh, une des Épouses, participa à la calomnie, espérant discréditer Aisha au profit de Zaynab , aux yeux du Prophète . Mais Zaynab ignorait tout. On nous rapporte même que, comme les autres Épouses, le Prophète l'interrogea sur ce qu'elle savait. Elle avait répondu :
« Ô Envoyé d'Allah ! Je respecte mes yeux et mes oreilles. Je ne sais que du bien. » Et aisha ajouta : «Zaynab était la seule des Épouses qui fut sur un pied d'égalité avec moi. Allah la préserva à cause de sa réserve. Sa soeur se mit alors à lui être également hostile. » [Rapporté par Bukhârî]
En réalité, la calomnie avait pris naissance par un certain Ibn Ubbay et quelques autres « hypocrites », puis fut reprise et propagée par Mista (pour se venger d'un différend entre lui et Abu Bakr) et par le poète, Hassan Ibn Thâbit (qui avait un grief contre Safwân), et enfin, Hamna, sœur de Zaynab, dont nous venons de parler.
Aisha fut ramenée chez elle par ses parents. Elle ne cessait de pleurer et espérait être innocentée.
De son côté, le Prophète n'avait pas le moindre doute quant à l'innocence de sa jeune épouse et de Safwân mais il ne pouvait l'innocenter uniquement parce que sa conviction était faite. Il attendait de recevoir la preuve de cette innocence et comme celle-ci tardait, il interrogeait les autres Épouses et ses proches. Tous disaient la même chose :
« Cela n'est que mensonges. Nous ne connaissons de Aisha que du bien. » [Rapporté par Bukhârî]
Parmi les Compagnons, il interrogea également 'Ali ibn Abu Tâlib et Usâma ibn Zayd. Usâma, certain qu'elle était innocente également, conseilla :
« Garde ton épouse. Nous ne savons que du bien d'elle. » Quant à 'Ali, il lui répondit : « Ô Envoyé d'Allah, Allah n'a pas voulu te contrarier. Il y a en dehors d'elle beaucoup d'autres femmes. Interroge sa servante, elle te dira la vérité ! » [Rapporté par Bukhârî]
Cette réponse, un peu ambiguë, blessa Aisha qui s'en souvint longtemps après. Mais nous le verrons plus loin.
Le Prophète interrogea aussi la servante de Aisha , Barîra, qui répondit : « J'en jure par Celui qui t'a envoyé, je n'ai jamais rien vu de répréhensible, sinon qu'étant une toute jeune femme, il lui arrive parfois de s'endormir auprès du dîner de son mari et de laisser manger sa pitance par le mouton familier de la maison ! »
Le Prophète résolut d'évoquer publiquement cette affaire en s'adressant aux fidèles. Il leur tint à peu près ce langage:
« O Gens ! Que vous semble-t-il de ceux qui m'offensent au travers des membres de ma famille en répandant sur eux de faux bruits ? Par Allah, je ne connais que du bien des gens de ma maison et que du bien de l'homme dont ils parlent, qui n'est jamais entré dans l'une de mes maisons sans que je sois avec lui. » [Rapporté par Bukhârî]
II s'ensuivit même une altercation entre plusieurs personnes, et le Prophète dut ramener le calme entre eux. Aisha ignorait alors que le Prophète Muhammad l'avait ainsi publiquement défendue ; cependant, cela l'eut bien réconfortée. Elle continuait de pleurer tout en plaçant sa confiance en Allah. Il ne suffisait évidemment pas que le Prophète et quelques autres personnes soient convaincus de l'innocence de Aisha et Safwân pour que tout rentre dans l'ordre ; il fallait une preuve et celle-ci tardait à se manifester !
C'est par les épreuves auxquelles II soumet les Croyants qu'Allah élève leur foi. Il y a là, pour tout musulman, de quoi méditer sur le fait que la confiance en Dieu est essentielle dans les moments difficiles de l'existence.
Un mois s'était écoulé depuis le début de l'affaire. Un jour, alors que ses parents étaient près d'elle, ainsi qu'une femme des Ansar venue la réconforter, Aisha vit le Prophète entrer chez elle. Il la salua et s'assit, ce qu'il n'avait pas fait depuis le début de sa maladie.
Bukhârî nous rapporte que le Prophète prononça la shahâda, puis s'adressa à elle en ces termes :
« O 'Aïsha, il m'est parvenu telle ou telle chose sur ton compte ; si tu es innocente, Allah te justifiera ; si tu as commis quelque faute, demande pardon à Allah et reviens à Lui. Le fidèle qui reconnaît ses fautes et qui revient à Allah, Allah revient à lui. »
À peine avait-il achevé de parler qu'elle cessa de pleurer et, s'adressant à son père, le pria : « Réponds à l'Envoyé d'Allah pour moi ! » Abu Bakr lui dit alors : « Je ne sais pas quoi lui dire ! » Elle adressa la même demande à sa mère, qui lui fit la même réponse. Alors, s'adressant elle-même au Prophète , elle lui dit :
« Je sais que vous avez entendu ce que les gens disent ; cela est entré dans vos âmes et vous y ajoutez foi. Si je vous dis que je suis innocente - et Allah sait que je suis innocente - vous ne me croirez pas. Mais, si je vous avouais que j'ai commis ce dont Allah sait que je suis innocente, vous me croiriez. Je vous dirai donc ce qu'a dit le père de Joseph :
{ La résignation est une belle chose et Dieu me viendra en aide contre ce que vous avez raconté.}
[Sourate 12 – Verset 18]
II s'agit-là des paroles de Jacob à ses fils venus lui annoncer la mort de Joseph, alors qu'ils s'étaient mis d'accord entre eux pour le jeter dans un puits.
Après cette réponse, Aisha retourna s'allonger sur son lit tandis que le Prophète prolongeait sa visite, avec ses parents. Et, tandis qu'il était encore là, il reçut la révélation qui innocentait enfin Aisha :
« Oui, ceux qui sont venus avec la calomnie, c'est tout une bande des vôtres. Ne la comptez pas pour un mal, au contraire, cela vous est un bien. À chacun d'eux ce qu'il gagne comme péché. À celui, cependant, qui se charge de la part la plus grande parmi eux, un énorme châtiment.
Pourquoi, lorsque vous l'avez entendue (la calomnie), Croyants et Croyantes, n'avez-vous pas pensé à bien en vous-mêmes et n'avez-vous pas dit : "C'est une calomnie évidente."
Pourquoi les autres ne produisent-ils pas quatre témoins ? Alors, s'ils ne produisent pas de témoins, ce sont eux auprès de Dieu les menteurs. Et n'étaient la Grâce de Dieu sur vous, et Sa miséricorde ici-bas comme dans l'au-delà, un énorme châtiment vous aurait touchés pour ce que vous avez lancé.
Quand vous receviez sur vos langues et disiez de vos bouches ce dont vous n'aviez aucune science, et vous le comptiez pour rien, alors que - auprès de Dieu - c'était énorme.
Et pourquoi ne disiez-vous pas, lorsque vous l'entendiez : Qu'avons-nous à en parler ?
Pureté à Toi ! C'est une énorme calomnie !
Dieu vous exhorte à ne plus jamais répéter une chose pareille si vous êtes Croyants. Et Dieu vous expose les signes. Dieu, cependant, est Savant et Sage. » [Sourate 24 – Versets 11-18]
Le Prophète redevint souriant et annonça à Aisha : « Ô 'Aïsha ! Allah te déclare innocente ! »
Ses parents, toujours présents, lui conseillèrent : « Va vers lui et sois-lui reconnaissante. » Mais elle leur répondit : « Je n'irai pas à lui et c'est Allah Seul que je vais louer. » Comme on le voit, malgré son jeune âge, Aisha avait du caractère et une forte personnalité.
Mais nous devons ici constater que la révélation de ces versets fut un grand bien pour la Communauté des musulmans ; ces versets, en effet, interdisent toute supputation sur la conduite d'une femme et il interdit de porter atteinte à qui que ce soit en l'accusant d'adultère, à moins de pouvoir présenter le témoignage de quatre personnes de bonne foi.
2 - L'ablution sèche (Tayamûm)
Aisha et Um Salama avaient accompagné l'Envoyé d'Allah lors d'une expédition. La troupe avait fait une halte au moment de la prière du soir et s'apprêtait à repartir lorsque Aisha s'aperçut qu'elle avait perdu le collier d'onyx qu'elle portait. Selon une version, il lui avait été offert par sa mère le jour de son mariage, selon une autre version, il lui avait été prêté par l'une des Mères des Croyants. On le chercha, en vain.
Le Prophète fit établir le camp pour la nuit. Mais il n'y avait pas d'eau à cet endroit. Les Compagnons se plaignirent à Abu Bakr de la futilité du motif qui les obligeait à passer la nuit dans cet endroit, les privant de l'eau nécessaire à leurs ablutions.
Abu Bakr vint faire des reproches à sa fille et lui dit : « Tu crées constamment des problèmes... » Vers la fin de la nuit, le Prophète reçut une révélation qui institua l'ablution sèche (tayamûm).
[...] Si vous êtes malades ou en voyage, ou si l'un de vous revient d'un endroit où il a fait ses besoins, ou si vous avez approché vos femmes et que vous ne trouviez pas d'eau, faites ablution sèche en touchant une terre pure. Essuyez votre face et vos mains. Dieu est certes Pardonneur et Miséricordieux. [Sourate 4 – Verset 43]
Du coup, toute la troupe se réjouit alors et dit : « Ô Famille d'Abû Bakr ! Ce n'est pas votre premier don à l'Islam. »
Abu Bakr - qui était bien fâché contre sa fille - vint lui dire : « Je n'imaginais pas que tu puisses être la source d'une telle bénédiction pour les musulmans. Grâce à toi, les gens se sont vus accorder une grande facilité. »
Un autre hadîth nous rapporte que Usayd ibn Hudayr vint dire à Aisha :
« Allah te récompense en bien ! Car, par Dieu, il ne t'est jamais arrivé une chose déplaisante sans qu'Allah n'en ait fait quelque chose de bon pour toi et tous les musulmans. » [Rapporté par Bukhârî]
N'oublions pas que le moindre des déplacements dans cette région avait lieu dans le désert et les points d'eau étaient souvent éloignés les uns des autres, ce qui ne rendait pas les voyages faciles ! D'ailleurs, à propos de cette remarque, Abu Hurayraa rapporté que le Prophète a dit :
« Le voyage est un des aspects de la torture où le voyageur s'empêche de dormir, de manger et de boire. Lorsque vous avez terminé vos affaires, hâtez-vous de retourner dans votre famille. » [Rapporté par Bukhârî]
Cet événement eut donc une incidence bénéfique pour tous les musulmans qui, jusqu'à nos jours, utilisent ce moyen lorsqu'ils se trouvent dans des circonstances où ils n'ont pas d'eau. Puis, comme pour bien souligner que cet incident avait essentiellement valeur d'enseignement, le collier fut retrouvé sous le chameau de Aisha au moment où il se releva !
3 - L'affaire du pot de miel
Le Prophète s'attardait depuis quelque temps chez Hafsa , l'une des Épouses, qui lui donnait à boire du miel qu'elle avait reçu, ce qu'il appréciait particulièrement. Nous savons que le Prophète aimait les mets sucrés.
Aisha et quelques-unes des Épouses (Safiya et Sawda, semble-t-il) se mirent d'accord pour dire au Prophète , lorsqu'il revenait, que son haleine dégageait une odeur désagréable. Cela mit un terme aux moments « gourmands » du Prophète, mais elles prirent conscience qu'elles l'avaient privé d'un plaisir. [Rapporté par Bukhârî]
Selon une autre version, il s'était attardé à boire du miel chez Zaynab. C'est à cette occasion que fut révélé le verset suivant :
Ô Prophète ! Pourquoi, en recherchant l'agrément de tes Épouses, t'interdis-tu ce que Dieu t'a permis [...]
[Sourate 66 – Verset 1]
4 - Les bagages de Safiya
Au retour du pélerinage de l'Adieu, ' Aisha avait peu de bagages alors qu'elle montait un puissant chameau, tandis que Safiya, une autre des Épouses, avait des bagages lourds et un chameau faible qui ralentissait la marche de la caravane.
Afin de répartir la charge, le Prophète donna l'ordre de placer un bagage lourd sur le chameau de 'Aïsha, sans avoir demandé l'accord de chacune. Aisha en fut contrariée.
Le Prophète lui proposa : « Veux-tu que Abu Ubayda arbitre entre nous ? - Non dit-elle, il ne me donnera jamais raison contre toi ! - Alors 'Umar ? Proposa-t-il. - Oh non ! J'ai peur de lui ! Même Satan a peur de lui ! - Eh bien, veux-tu que ce soit ton père, Abu Bakr ? »
Elle y consentit et on fit appeler Abu Bakr , qui, apprenant la cause de l'incident et l'entêtement de sa fille avant même que le Prophète n'ait terminé son exposé et que Aisha puisse défendre sa cause - leva la main et la gifla... Le Prophète l'arrêta en disant : « Je n'ai pas voulu cela. » II se leva et lava de ses mains le visage et la robe de sa jeune épouse. [Rapporté par Bukhârî]
[...] Bien des anecdotes nous ont encore été rapportées sur Aisha en particulier. [...]
Nous savons que l'Envoyé d'Allah confiait à Aisha ses projets les plus secrets. Par exemple, en matière de stratégie, il lui arrivait de préparer une expédition en ne faisant part de ses intentions ou de la destination qu'à sa jeune épouse. À ceux qui venaient ensuite l'interroger sur tel ou tel sujet, elle répondait qu'elle ne dirait rien, même à son propre père !
Quant à Aisha , elle aimait tellement le Prophète qu'elle était inquiète dès qu'il s'éloignait. Un jour, elle l'entendit se glisser dehors en pleine nuit, et pour savoir où il se rendait, elle le suivit ; il allait au cimetière pour prier pour ceux qui étaient morts. Bouleversée, elle dit alors : « Je donnerais la vie de mon père et de ma mère pour lui ! » Souvent, il s'endormait la tête posée sur ses genoux.
Nous avons vu que Sawda , devenue âgée, lui avait cédé son jour de visite. Ainsi, le Prophète passait plus de temps encore avec 'Âïsha, lui permettant encore de multiplier les occasions de parfaire ses connaissances. Lors de l'expédition de Khaybar, l'étendard (râyah) du Prophète fut confectionné dans la houppelande de Aisha. Il était noir et carré.
Sur la maladie du Prophète
Lorsque le Prophète fut atteint de la maladie qui devait l'emporter, il continuait de visiter successivement chacune de ses Épouses (Qu'Allah soit satisfait d'elles) et interrogeait chaque jour en disant : « Où serai-je demain ? » et ce, jusqu'au jour de sa visite chez Aisha , chez laquelle il restait calme, sans interroger sur le lendemain.
On nous rapporte qu'à partir du moment où il fut immobilisé par cette maladie, il sollicita des Mères des Croyants la permission d'être soigné chez 'Âïsha, ce qu'elles acceptèrent. [Rapporté par Bukhârî] Il fut donc transporté de l'appartement de Maymûna à celui de Aisha , soutenu d'un côté par 'Ali, de l'autre par 'Abbâs.
La maladie empirait. Toutefois, un jour, il put se rendre dans la mosquée et il parla aux fidèles, invoquant longuement Allah pour les martyrs de Uhud en particulier. Puis, il donna l'ordre que soient fermées toutes les portes donnant sur la mosquée, sauf celle d'Abû Bakr.
Il vécut ses derniers instants chez Aisha . On nous rapporte que peu avant sa mort, le Prophète vit le frère de Aisha entrer dans la pièce avec un bâton de miswâk (brosse à dent naturelle). Aisha lut dans ses yeux qu'il en avait envie. Elle le mâchonna d'abord un peu et lui en frotta les dents. Puis, elle lui prit la tête et la plaça dans le creux de son épaule, afin qu'il soit aussi confortable que possible et c'est ainsi qu'il rendit le dernier soupir.
Aisha nous a rapporté au sujet de ses derniers instants que le Prophète répéta : « II n'y a aucun dieu si ce n'est Allah lui-même. Quelle agonie que la mort. » Puis, Aisha l'entendit dire d'une voix à peine perceptible, « ...mais avec le Compagnon le plus haut », comme s'il faisait un choix.
Aisha nous dit encore : « J'étais jeune et je ne comprenais rien. Dans ma stupidité, le Prophète rendit le dernier soupir dans mes bras et je ne le sus pas. Ce n'est que lorsque les autres femmes présentes se mirent à pleurer que je compris ce qui s'était passé... » [Rapporté par Bukhârî]
Aisha a rapporté : « II mourut le jour même où c'était mon tour de le recevoir dans mon appartement. Allah recueillit son âme tandis que sa tête reposait entre ma gorge et ma poitrine et ma salive fut mélangée à la sienne. » [Rapporté par Bukhârî]
Le Prophète fut enterré sur place, dans la chambre de Aisha. Elle continua d'y habiter. Sawda, l'une des Épouses qui mourut en l'an 24 de l'Hégire, lui légua son appartement qui était mitoyen du sien, ce qui permit à Aisha d'agrandir son habitation devenue très petite du fait de la place occupée par le tombeau du Prophète . Lorsque, chacun à son tour, Abu Bakr, puis plus tard, 'Umar, quittèrent ce monde, ils furent tous deux enterrés auprès du Prophète.
On sait que lorsque 'Umar fut à l'agonie, il envoya son fils 'Abdallah chez 'Aisha , qui la trouva assise, pleurant. « 'Umar t'adresse le salut et te demande l'autorisation d'être enterré avec ses deux Compagnons. - Je l'aurais désiré pour moi-même, mais je lui donne la préférence sur moi-même. » [...]
Après la disparition du Prophète , elle continua d'occuper une place importante au sein de la communauté des musulmans, malgré sa jeunesse.
Elle jouissait d'une grande réputation. On venait la consulter. Elle était particulièrement savante en matière de jurisprudence. On nous rapporte qu'un grand nombre de Compagnons venaient étudier la jurisprudence islamique avec elle. Atâ a rapporté : « Aisha était plus instruite qu'aucun homme de son temps. »
'Aisha , avec quelques autres Compagnons, firent de Médine un centre d'études parmi les plus importants du monde pour l'époque. On nous précise encore que les gens qui avaient eu le privilège d'étudier avec elle étaient ensuite parmi les plus brillants. Au temps de leur califat respectif, Abu Bakr et 'Umar venaient consulter Aisha pour lui exposer tel ou tel problème auquel ils se trouvaient confrontés et l'interroger pour savoir ce que le "Prophète aurait dit ou fait en pareille circonstance". [...]
Alors qu'il était devenu à son tour calife, Mu'âwiya l'interrogea. Elle donna comme réponse ce hadîth de l'Envoyé d'Allah : « Celui qui essaie de contenter Allah, ne se préoccupant pas du mécontentement des gens, sera protégé contre la méchanceté des gens. Mais celui qui contente les gens en ne se préoccupant pas du mécontentement de Dieu, sera abandonné par Allah et à la merci des gens. »
Elle avait les moyens de vivre mieux car elle recevait, comme les autres Mères des Croyants, une pension versée par les Califes successifs. Mais Aisha , qui était d'une extrême générosité, chargeait sa servante, dès qu'elle recevait cette pension, de distribuer aussitôt le tout aux nécessiteux, négligeant de garder quelque chose pour elle. Le soir venu, elle disait à sa servante : « Pourquoi ne m'as-tu pas fait penser de garder de quoi dîner ce soir ? »
Ainsi donc, parfois, elle n'avait même pas de quoi dîner. Elle avait tellement pris l'habitude d'une vie frugale au cours de ses années difficiles passées dans la maison du Prophète , jeûnant beaucoup, qu'elle continua de vivre de la même manière après sa disparition, alors que les moyens de la communauté s'étaient améliorés.
Urwa a rapporté qu'un jour, il a vu Aisha qui avait reçu 70.000 dirhams, les distribuer aux pauvres, tandis qu'elle-même portait une chemise rapiécée.
Un Compagnon s'étant ému de ce qu'elle redistribuait aux pauvres tout ce qu'elle recevait au fur et à mesure, elle s'était écriée en l'apprenant : « Comment ? On m'interdirait mes libéralités ? » et elle avait bien entendu continué ses pratiques ! [Rapporté par Bukhârî]
Un jour, elle reçut - sur la demande de celui-ci - Hassan ibn Thâbit, qui avait été l'un des acteurs de l'affaire de la calomnie. Comme on s'était étonné qu'elle le reçoive, elle répondit : « Pourquoi pas. N'a-t-il pas été déjà frappé d'un terrible châtiment ? » II était, en effet, devenu aveugle.
Avant qu'elle ne meure, alors qu'elle était à l'agonie, Ibn 'Abbâs demanda à être reçu par elle. Comme elle hésitait, dans la crainte qu'il ne lui fasse des compliments, on lui fit valoir qu'il s'agissait de l'oncle paternel du Prophète et l'un des principaux personnages parmi les musulmans. Elle le reçut donc.
- « Comment te trouves-tu, lui demanda-t-il ? » - « Bien, si je crains Dieu, répondit-elle. » - « Tu seras bien, s'il plaît à Dieu, car tu as été l'Épouse de l'Envoyé d'Allah et la seule vierge qu'il ait épousée. Enfin, la Révélation t'a reconnue innocente. »
Après cette visite, Aisha devait dire « Ibn 'Abbâs m'a fait des compliments. J'aurais préféré qu'on m'eût oubliée. »
Aisha vécut jusqu'à l'âge de 67 ans et mourut pendant le mois de Ramadan de l'an 57 de l'Hégire, sous le califat de Mu'âwiya.
Elle fut enterrée, comme elle l'avait souhaité, après la prière de la nuit, dans l'heure qui suivit sa mort, dans le cimetière des femmes à Médine, auprès de ses compagnes, les Mères des Croyants (Qu'Allah soit satisfait d'elles) qui l'avaient devancée.
Abu Hurayra fit la prière sur elle avec les autres Compagnons . Ce sont ses neveux qui la déposèrent dans sa tombe.
Elle était la fille du célèbre 'Umar ibn Al-Khattâb, mecquois de la tribu des Adî. Sa Mère
s'appelait Zaynab bint Maz'ûn. Elle est née avant la Révélation, la même année que Fâtima, la fille du Prophète . Son père, 'Umar, deuxième Calife, fut un illustre personnage du temps du Prophète et l'un de ses proches compagnons.
Avant qu'il ne devienne musulman, il fut un ennemi implacable de l'Islam. Il s'était même porté volontaire pour tuer le Prophète. C'était environ 5 ou 6 ans après le début de la Révélation. Mais, en se rendant chez l'Envoyé d'Allah , il rencontra quelqu'un qui, au lieu de lui indiquer où il pourrait le trouver, le détourna en lui révélant que, dans sa propre maison, sa sœur Fâtima et son mari étaient devenus musulmans.
Rendu furieux, 'Umarchangea de direction et se rendit chez eux.
Un autre musulman était en visite chez eux et leur récitait des versets du Coran. En l'entendant arriver, sa sœur dissimula les feuillets sur elle. Il entra et les interrogea ; elle lui avoua qu'ils étaient musulmans. Très en colère, 'Umar la gifla et voulut lui arracher les feuillets pour les lire. Elle refusa de les lui donner, lui disant qu'il était impur et ne pouvait donc toucher le texte du Coran.
Néanmoins, bouleversé par son geste en voyant un peu de sang couler sur le visage de sa sœur, il alla se laver afin de pouvoir prendre connaissance de ces fameux feuillets. Il put ainsi lire les premiers versets de la sourate Ta Ha.
{ Tâ-Hâ. Nous n'avons point fait descendre sur toi le Coran pour que tu sois malheureux, si ce n'est qu'un Rappel pour celui qui redoute (Allah), (et comme) une révélation émanant de Celui qui a créé la terre et les cieux sublimes. }
[Sourate 20 – Versets 1- 4]
Instantanément, il fut touché par ces versets et se convertit à son tour. Il se rendit chez le Prophète , non plus avec l'intention de le tuer, mais pour prononcer la shahâda : « II n'y a d'autre dieu que Allah et Muhammad est son Envoyé. » Dès cet instant, l'Islam le compta parmi ses plus ardents défenseurs.
Chacun sait que ses contemporains le craignaient pour sa sévérité. Il était, en effet, extrêmement rigoureux, tant lui-même craignait de ne pas être en parfaite conformité avec les ordres d'Allah . Les Compagnons hésitaient à lui poser certaines questions après la mort du Prophète de crainte que la réponse soit contraignante pour eux !
Ainsi donc, Hafsa était issue d'une famille très respectée. Il s'agissait d'une famille d'intellectuels. Shiffa bint 'Abdallah, une parente de 'Umar, qui savait lire et écrire, avait instruit Hafsa et sa sœur, ce qui était rare avant l'Islam, en particulier pour les femmes.
Hafsa avait déjà été mariée. Avec son mari, Khunays ibn Hudhâfa, ils avaient fait partie du premier groupe d'émigrés en Abyssinie, pays où régnait alors le Négus, ce roi bienveillant dont nous avons déjà parlé, qui les protégea même lorsque les Quraysh vinrent les poursuivre jusque dans son pays. Au retour de leur émigration, Hafsa et son mari se rendirent à Médine où était désormais installée la communauté. Nous savons que Khunays participa à la bataille de Badr et de Uhud, où il fut blessé et mourut en l'an 2 de l'Hégire.
Hafsa , qui n'avait pas eu d'enfant, se retrouva veuve ; elle avait environ 20 ans. Après quelque temps, 'Umarchercha à remarier sa fille. Il s'adressa d'abord à 'Uthmân- devenu veuf de Ruqayia , la fille aînée du Prophète, qui déclina l'offre. Il s'adressa ensuite à Abu Bakrqui était son meilleur ami, mais celui-ci lui fit une réponse évasive et il en fut blessé.
On nous rapporte que Hafsa était alors réputée pour avoir un caractère hautain et personne ne voulait l'épouser. 'Umarse rendit auprès du Prophètepour se plaindre de la situation, mais il lui fut répondu :
« Je te montrerai un meilleur gendre que 'Uthmân et je lui montrerai un meilleur beau-père que toi. » [Rapporté par Bukhârî]
'Umarcomprit alors que le Prophèteavait l'intention de lui demander la main de sa fille et que Abu Bakrétait déjà dans le secret ! De fait, le Prophète demanda la main de Hafsa à 'Umar, qui bien entendu la lui accorda avec joie.
En ce qui concerne 'Uthmân, le Prophètelui fit épouser une autre de ses filles, Um Kalthûm . Il devint le beau-père de 'Uthmân ainsi qu'il l'avait annoncé. Le mariage de 'Uthmân et Um Kalthûm eut lieu d'abord, puis le Prophète épousa Hafsa 4 mois plus tard, vraisemblablement pendant le mois de Sha'bân de l'an 3 de l'Hégire.
Entre temps, l'appartement qui devait la recevoir fut préparé. La dot que lui remit le Prophètefut de 400 dirhams.
On se reportera utilement à la disposition des appartements des Épouses, à la fin de cet ouvrage, étant précisé qu'au fur et à mesure que le Prophètefaisant entrer une nouvelle Épouse, on ajoutait un appartement.
L'arrivée de Hafsa ne troubla en aucune façon la vie familiale ; même 'Âïsha fut heureuse de trouver une compagne qui fut proche d'elle et des liens très solides les unirent l'une à l'autre. On se souvient que Sawda était déjà assez âgée lors de son mariage avec le Prophète. À cette époque, elles étaient trois Épouses : Sawda, 'Âïsha et Hafsa. Mais la famille devait s'agrandir rapidement puisque le Prophète contracta encore plusieurs autres unions au cours de cette période.
Le rôle de Hafsa n'est pas négligeable, même s'il n'est pas aussi remarquable que celui joué par 'Aïsha . Un jour que 'Umarfaisait des reproches à son épouse, celle-ci lui répondit sur un ton auquel il n'était pas habitué. Il lui demanda la raison de ce comportement nouveau et elle lui apprit que les Épouses du Prophète lui répliquaient et considérait donc qu'elle pouvait en faire autant !
Parlant de Hafsa, elle ajouta : « II y en a une qui, du matin au soir, lui dit tout ce qu'elle pense sans hésiter. » 'Umar, préoccupé, se rendit auprès de Hafsa et l'interrogea à ce sujet. Hafsa lui confirma ce qu'avait dit sa mère.
'Umar fit remarquer à sa fille : « Tu n'as ni la grâce de 'Âïsha, ni la beauté de Zaynab... Es-tu certaine que si tu irrites le Prophète, Allah ne t'écrasera pas de Sa colère ? » [Rapporté par Bukhârî]
Après quoi, il se rendit chez Um Salama, sa cousine, une autre des Épouses du Prophète pour lui demander : « Est-il vrai que vous tenez tête à l'Envoyé d'Allah et vous lui répondez sur un ton irrespectueux ? »
Um Salama lui rétorqua vivement : « Qui donc t'a autorisé à t'interposer entre l'Envoyé d'Allah et ses Épouses ? Certes, nous lui disons franchement ce que nous pensons. S'il l'admet, c'est son affaire, mais s'il devait nous l'interdire, il nous trouverait alors plus obéissantes que nous ne le sommes à ton égard ! » 'Umarrepartit sur cette réponse. [...]
Après la disparition du Prophète, il ne semble pas que Hafsa ait joué un rôle politique dans la suite. On nous rapporte que, alors que son père 'Umar était à l'agonie, après l'attentat dont il venait d'être victime, Hafsa, Mère des Croyants, lui rendit une dernière visite et resta un moment auprès de lui à pleurer. Puis elle se retira dans la pièce voisine jusqu'à ce que le corps de 'Umar fût transporté pour être enterré auprès du Prophèteet d'Abu Bakr.
Toutefois, on sait que Hafsa eut à remplir une mission importante et de grande confiance. À la mort de son père 'Umar, il n'existait qu'une copie officielle écrite du texte du Coran.
Or, le nombre de musulmans était devenu très important et il circulait un non moins grand nombre de copies, dans une écriture peu développée, ce qui était nuisible à la bonne préservation et à la pureté du texte. Abu Bakr, puis 'Umar, avaient pris conscience de la nécessité d'un texte contrôlé par les vrais connaisseurs du Coran, mais ce travail n'avait pas pu être achevé pour être diffusé avant leur disparition à tous deux.
C'est à Hafsa que fut confiée l'unique copie officielle qui la conserva jusqu'à ce que le travail put être exécuté. On se souvient que Hafsa était savante ; on nous rapporte que, à la fin de sa vie, elle connaissait le Coran par cœur.
Ce fut donc le troisième calife, 'Uthmân, qui fit revoir le texte par Zayd ibn Thâbit et quelques autres, et se chargea de faire ramasser toutes les autres copies existantes. Il les fit brûler et diffusa enfin le texte définitif, correctement orthographié pour une bonne prononciation. Il envoya, en outre, 6 copies dans les différents centres islamiques et garda une copie pour lui.
Sur la personnalité de Hafsa, nous savons encore qu'elle était très pieuse et qu'elle jeûnait beaucoup.
Nous lui devons au moins une soixantaine de ahadîth. Elle mourut en l'an 45 de l'Hégire, âgée d'environ 60 ans. Elle fut enterrée avec les autres Mères des Croyants (Qu'Allah soit satisfait d'elles), dans le cimetière de Médine. On nous rapporte que l'Ange Gabrielavait été chargé d'informer le Prophèteque Hafsa serait également son épouse au Paradis.
Umm Habiba était la fille d'Abu Sufyan. Elle embrassa l'Islam avant son père qui ne rejoignit la communauté musulmane qu'à la veille de la conquête de la Mecque. Elle épousa Ubayda Allah Ibn Jahsh. Tous les deux avaient émigré en Abyssinie. Bien que son époux ait renié l'Islam pour devenir chrétien, Umm habiba ne fut point influencée par l'apostasie de son mari qui mourra en Abyssinie. Au contraire, elle persista dans la religion qu'elle avait adoptée librement et sans aucune contrainte.
Emigration en Abyssinie
De son vrai nom Ramlah, elle embrassa l'Islam en même temps que son mari, tandis que son père demeura dans la mécréance. Elle craignit les représailles de son père. Aussi, alors qu'elle était enceinte, alla-t-elle en Abyssinie avec son mari, avec la seconde vague d'émigrants. Ce départ rendit Abu Sufyan fou de colère car sa fille embrassa l'Islam et, à cause de son éloignement, il n'avait aucune possibilité pour la contraindre à revenir à la religion de ses ancêtres. Arrivée en Abyssinie, elle accoucha, quelques temps après, d'une fille qu'elle appela Habiba, d'où le nom sous lequel elle est connue : Umm Habiba.
En Abyssinie, son mari se christianisa et tenta de la rallier à sa nouvelle croyance. Elle refusa d'apostasier et demeura fermement attachée à l'Islam. Il s'ensuit que Umm Habiba s'opposa d'abord à son père et ensuite à son mari. Au nom de l'Islam, elle quitta donc l'oppression de la Mecque et accepta de vivre loin de sa patrie, avec sa fille, née en terre étrangère. Ce nouveau-né allait vivre dans une situation paradoxale : son grand-père était idolâtre, son père était chrétien et sa mère était musulmane.
L'attachement d'Umm Habiba à l'Islam était certainement très fort quand nous prenons connaissance de son mode de vie en Abyssinie. La puissance de son énergie, sa ferme volonté et surtout ses profondes convictions religieuses lui avaient permis de surmonter ses difficultés et son isolement. En effet, à la suite de la conversion de son mari au christianisme, elle eut honte de se présenter devant la petite communauté musulmane d'Abyssinie et de vivre avec eux.
Elle ne pouvait plus retourner à la Mecque car elle n'y trouverait qu'animosité auprès de sa famille. Aussi, s'enferma-t-elle dans sa maison éthiopienne et se replia sur elle-même, montrant un courage exemplaire et d'une endurance à toute épreuve. Sa tristesse devait être encore plus grande en apprenant que son père Abu Sufyan était entré en guerre ouverte contre le Prophète et contre la Communauté musulmane dont elle faisait partie, corps et âme.
Mariage avec le Prophète
Après un long moment vécu dans le veuvage, une servante du Négus frappa à la porte d'Umm Habiba. La femme émissaire du roi d'Abyssinie lui remit une lettre dans laquelle il lui demandait de désigner un tuteur qui la marierait au Prophète des Arabes.
Umm Habiba n'en croyait pas ses oreilles. Elle fit répéter une fois, puis deux fois et ensuite trois fois cette proposition. Quand elle en fut convaincue, elle enleva de ses poignées les deux bracelets en argent qu'elle remit à la servante pour la remercier de l'annonce de cette bonne nouvelle.
Après le départ de la servante, elle s'adressa à Khalid Ibn Sa'id, le plus en vue des émigrants de son clan les Banu Umiyya. Elle le chargea d'être son tuteur. Le préposé accepta volontiers cette charge.
Le soir même, le Négus convoqua les musulmans présents en Abyssinie et, à leur tête, Ja'far Ibn Abu Talib, cousin du Prophète et Khalid Ibn Sa'id le tuteur d'Umm Habiba. Il s'adressa à eux en faisant appel à un interprète :
- Muhammad Ibn Abd Allah m'a écrit pour que je le marie à Habiba, fille d'Abu Sufyan. Qui est, parmi vous, son tuteur. Ce fut alors que Sa'id se fit connaitre.
Ce fut ainsi que Umm Habiba devint une des Mère des Croyants. La servante lui retourna les bracelets car non seulement le Négus la récompensa suffisamment mais il ordonna à ses femmes d'envoyer à la nouvelle épouse du Prophète ce qu'elles avaient de meilleurs. Elle prendra ces objets avec elle à Médine.
La Vie à Médine
Quand Umm Habiba arriva à Médine, son oncle maternel Uthman Ibn Affan organisa en son honneur une fête au cours de laquelle les invités furent repus de nourriture et de viande. Les autres femmes du Prophète la reçurent avec enthousiasme et chaleur. Elles n'avaient rien à craindre d'elle car elle s'approchait de sa quarantième année. En outre, la nouvelle venue n'avait pas le charme ensorceleur de Safiya, ni la grâce d'Umm Salma, ni la beauté de Zaynab.
Au sein de la maison du Prophète, Umm Habiba continuait à ressentir la tristesse au fond d'elle même car son père continuait à vivre dans l'idolâtrie et l'égarement. Elle souffrait de voir la guerre opposer d'un côté son mari et de l'autre celui qui l'a mise au monde.
Umm Habiba apprit un jour, que les Quraysh avaient violé le pacte de Hudaybiyya. Elle connaissait suffisamment son mari. Celui-ci n'allait pas se taire devant cette trahison car il n'admettait pas qu'on puisse rompre un accord. Elle s'attendait à le voir partir à l'assaut de la Mecque pour détruire les idoles et les idolâtres dont son père, ses frères, sa famille et tout son clan faisaient partie.
Les notables Qurayshites avaient décidé d'envoyer un émissaire, choisi parmi eux, à Médine pour négocier avec le Prophète. Ce fut Abu Sufyan, le père d'Umm Habiba.
Son Père, Abu Sufyan
Arrivé à Médine, Abu Soufyan se souvint qu'il avait une fille dans cette ville. Il se rendit chez elle dans l'espoir que ses conseils pourraient l'aider à résoudre son problème. Umm Habiba fut surprise de voir son père entrer chez elle. C'était la dernière personne qu'elle pensait voir en cette grave et pénible période. Voyant qu'elle ne l'invitait pas à s'asseoir, il prit l'initiative de se reposer sur la literie du Prophète. Aussitôt, Umm Habiba bondit et plia la literie pour que son père ne puisse pas s'asseoir dessus. Etonné, le père reçcu cette réponse de sa fille :
- C'est la literie de l'Envoyé de Dieu. Et toi, tu es un associateur. Je ne voudrais pas que tu t'asseyes dessus.
- Ma pauvre fille ! Tu as été atteinte d'un mal, dit le père en colère.
Ce n'est qu'au retour du Prophète , que Umm Habiba connut l'objet de la visite de son père à Médine. Abu Sufyan retourna bredouille à la Mecque sans rien obtenir des musulmans.
Le Prophète entreprit les préparatifs pour marcher sur la Mecque à la tête de 10 000 combattants. La promesse que Dieu a faite à Son Messager allait se réaliser.
Celui qui t´a prescrit le Coran te ramènera certainement là où tu (souhaites) retourner. Dis: "Mon Seigneur connaît mieux celui qui a apporté la guidée et celui qui est dans un égarement évident." (Coran 28.85)
Abbas, l'oncle paternel du Prophète, conseilla à Abu Sufyan d'embrasser l'Islam et d'exercer son influence sur les membres de son clan pour qu'ils suivent son exemple. Ce sera, lui dit-il dans son intérêt et celui de son peuple.
Ce fut alors qu'Abu Sufyan se dirigea du côté de l'armée musulmane. Quant Umar Ibn Khattab le vit, il demanda au Prophète la permission de lui trancher le cou avec son épée. Abbas avait suivi Abu Sufyan. Quand il vit le danger dans lequel ce dernier se trouvait, il dit à l'Envoyé :
- Ô Envoyé de Dieu ! Abu Sufyan est sous ma protection !
Tous les combattants musulmans n'attendaient qu'un seul ordre pour décapiter le chef de file des mécréants. Ils étaient en attente jusqu'au moment où ils entendirent la voix du Prophète dire à Abbas d'emmener Abu Sufyan chez lui et de revenir le lendemain matin. Le Père d'Umm Habiba passa la nuit dans l'attente de la décision de Muhammad quant au sort d'un des plus grands dignitaires de Quraysh.
Au matin, Abu Sufyan se présenta devant le Prophète, entouré des notables d'entre les Muhajirin et des Ansar. L'Envoyé de Dieu lui rappela qu'il avait reçu la nouvelle qu'il n'y avait pas de divinité en dehors de Dieu, et qu'il était son Envoyé. Après avoir tergiversé quelque peu, le père d'Umm Habiba proclama son adhésion à l'Islam. Abbas intervint et demanda à son neveu de faire un geste en faveur de ce nouveau rallié afin de l'honorer au lieu de l'humilier. Ce fut alors que l'Envoyé de Dieu fit cette déclaration :
- Que celui qui entrera dans la maison d'Abu Sufyan, sera en sécurité. Celui qui restera chez lui et fermera sa porte, sera en sécurité. Celui qui entrera dans la mosquée sacrée, sera en sécurité.
A la Mecque cette proclamation répétée inlassablement "Celui qui entrera dans la maison d'Abu Sufyan, sera en sécurité" traversa le désert et parvint jusqu'à Médine. La nouvelle parvint, bien entendu, aux oreilles d'Umm Habiba qui fut transporté de joie. Elle loua la générosité, la noblesse et la clémence de son époux. Après quoi, elle se prosterna devant Dieu en signe de remerciement.
Mort de Umm Habiba
Umm Habiba mourut probablement en l'an 44 de l'hégire et fut enterrée à Médine, dans le cimetière de Baqi.
Il est à noter que les livres de la Sunna contiennent soixante cinq hadiths rapportés par elle. Ils furent transmis par sa fille, un de ses neveux et une de ses nièces et d'autres encore.
Hind était la fille d'Abû Umayya ibn Al-Mughîra, mecquois de la tribu des Makhzûm.
Sa mère était une tante du Prophète.
Nous la connaissons mieux sous le nom de Um Salama (la mère de Salama). Elle était proche parente de Khalîd ibn Al-Walîd, lequel fut un ennemi implacable de l'islam jusqu'à la bataille de Uhud.
On note que son hostilité à l'égard des musulmans se fit moins violente à partir du moment où Um Salama devint l'une des Épouses du Prophète.
Finalement, Khalîdse convertit à l'islam environ 2 années plus tard, et rejoignit la communauté de Médine avec deux compagnons qu'il trouva dans les mêmes dispositions.
Il s'agissait de 'Uthmân, fils de Talha, l'homme qui avait escorté Um Salama , partie seule avec son enfant vers Médine; le second, appelé Amr, n'était sans doute pas aussi convaincu par le Message de l'Islam.
Cependant, il se rendait compte que le Prophèteétait le grand vainqueur et sa démarche consistait plutôt, à ce moment, à se ranger du côté du plus fort. Or, en arrivant devant le Prophèteavec ses deux compagnons de voyage, il fut envahi d'une immense émotion qui l'empêcha même de lever les yeux vers lui au moment de prononcer la shahâda.
Khalîdest particulièrement célèbre pour avoir été le chef des armées musulmanes, après avoir rejoint le Prophète. Il était un excellent stratège et rapporta aux musulmans de nombreuses victoires. L'Envoyé d'Allah l'avait surnommé « Sayfu-l-llâh » (l'Épée d'Allah).
Um Salama avait été mariée avec son cousin, 'Abdallah ibn 'Abd Al-Assad, plus connu sous le nom d'Abû Salama. Ils étaient devenus musulmans ensemble et avaient fait partie de ceux qui avaient émigré en Abyssinie pour échapper aux persécutions dont ils étaient les victimes à la Mecque.
Ils eurent 4 enfants qui sont comptés au nombre des Compagnons.
On se souvient qu'en Abyssinie (l'Ethiopie actuelle) régnait le Négus, qui fut très bienveillant à l'égard de ces croyants de la nouvelle religion. Il les accueillit bien et les protégea en refusant, par exemple, de les livrer aux Quraysh qui les poursuivaient et s'étaient présentés à lui les bras chargés de splendides cadeaux pour l'impressionner.
On croit savoir que le Négus se serait converti à l'islam, mais qu'il aurait gardé sa conversion secrète. Dieu Seul est Savant.
En tout état de cause, on sait avec certitude, qu'entre le Prophèteet lui eurent lieu des échanges fraternels et que, plus tard, le jour de la mort de Négus, alors que le Prophète était à Médine, il en fut informé et prononça les louanges en sa faveur, en l'appelant mon frère.
Au moment de leur émigration donc, Um Salama avait autour de 18 ans.
Pendant ce temps, à la Mecque, le décret de boycottage dont nous avons déjà parlé avait contraint les membres de la famille du Prophèteà s'exiler dans une vallée désertique, en laissant derrière eux tous leurs biens. On sait que quelques personnes seulement prenaient le risque de leur faire parvenir, de temps en temps, quelques vivres.
Ceux qui avaient émigré en Abyssinie entendirent que la situation était meilleure à la Mecque pour les musulmans ; ils commencèrent à revenir. Plusieurs personnes parmi les notables de la Mecque - dont 'Umar- s'étaient converties entre temps, ce qui encouragea leur retour.
Mais, à la suite d'un malentendu, un nouveau durcissement se produisit à l'égard des musulmans. Et, lorsque les émigrés furent de retour, ils furent de nouveau exposés aux persécutions qu'ils avaient fuies.
Abu Salama obtint la protection d'Abû Tâlib, à la grande indignation de la tribu de Makhzûm qui lui reprochait déjà de protéger le Prophète.
Abu Tâlib leur fit cette réponse : « Si je ne protégeais pas le fils de ma sœur, je ne pourrais pas protéger le fils de mon frère. »
Ainsi, Abu Salama et son épouse purent vivre relativement tranquilles. Mais, Abu Tâlib ne survécut pas bien longtemps après leur retour d'exil et il mourut, peu avant Khadîja , laissant le Prophètesans protection, ainsi qu'Abû Salama et son épouse.
C'est peu après ces événements que se situe l'Hégire vers Médine (anciennement Yathrib). Les premiers musulmans prirent le chemin de Médine et Abu Salama, son épouse et leur fils, Salama, se mirent en route également. Mais, ils furent rattrapés par les membres de la famille d'Um Salama ; ils laissèrent son mari partir, et obligèrent Um Salama et son fils à revenir à la Mecque et tentèrent de la faire renoncer à l'islam en la persécutant de mille et une manières.
Elle résista de toutes ses forces à sa famille. Elle montait sur la colline de Safâ, se tournait vers la Ka'bâ et maudissait ses parents pour ce qu'ils lui faisaient subir ; ils se vengèrent de maintes façons, déboîtant même le bras de son enfant.
Ses lamentations incessantes, ses malédictions finirent par avoir raison de leur obstruction et, finalement, ils la laissèrent partir avec l'enfant. Elle partit seule avec son fils en direction de Médine. À quelque distance de la Mecque, elle trouva 'Uthmân ibn Talah - qui n'était pas encore musulman - mais qui insista pour l'escorter jusqu'à la fin du voyage. Il conduisit le chameau - monté par Um Salamaet son enfant - tenant la monture par la bride, tout au long du voyage.
Arrivé à Quba, il lui indiqua alors : « Ton mari se trouve dans ce village. Entres-y avec la bénédiction d'Allah ! »
Puis, il fit lui-même demi-tour et repartit vers la Mecque. On nous rapporte que, plus tard, Um Salama se rappelait souvent la noblesse du comportement de cet homme. Il devait rejoindre le Prophèteavec Khalîd, dont nous avons justement parlé au début de ce chapitre. Ils firent route ensemble ! Lors de la reconquête de la Mecque par les musulmans, il retrouva sa position de gardien de la Ka'bâ et c'est le Prophète lui-même qui lui remit la clé.
Abu Salama et son épouse , très unis, se retrouvèrent enfin à Médine. Mais, lors de la bataille d'Uhud, Abu Salama fut blessé. Sa blessure s'était refermée trop rapidement ; elle se rouvrit un peu plus tard, ce qui entraîna sa mort quelques mois plus tard.
Elle pleura beaucoup la mort de son mari. Elle se retrouva veuve avec deux garçons et deux filles.
Um Salama - qui aimait tendrement son mari - avait souhaité qu'ils se promettent mutuellement de ne pas se remarier si l'un des deux venait à mourir.
Abu Salama lui avait répondu : « Je demande à Dieu de t'accorder après moi un mari meilleur que moi. »
On sait qu'Abû Bakr et 'Umaravaient tous deux songé à l'épouser après la mort d'Abû Salama. Le grand souci des Compagnons était de prendre en charge et de soutenir les veuves avec leurs familles.
Quatre mois après qu'elle fût devenue veuve, le Prophètevint lui demander de l'épouser. Um Salama objecta qu'elle craignait de ne pas être l'épouse qu'il fallait pour le Prophète, en considération de son âge (bien qu'il semble qu'elle n'ait pas atteint la trentaine !), de ses enfants... et de sa jalousie !
Le Prophètela rassura ainsi :
«En ce qui concerne l'âge, je suis plus âgé que toi, quant à ta jalousie, je prierai Dieu de t'en débarrasser. Quant à tes orphelins, Dieu et Son Envoyé en prendront soin. » [Rapporté par Muslim]
Le mariage eut lieu au mois de Shawwâl de l'an 4 de l'Hégire et Um Salama fut installée dans l'appartement qu'avait occupé la défunte Zaynab , Mère des Croyants, morte peu avant.
De l'avis de 'Âïsha et de Hafsa , Um Salama était fort belle ; 'Âïsha en fut d'ailleurs jalouse un moment, craignant que cette beauté ne lui nuise.
Nous savons qu'Um Salama participa activement à plusieurs campagnes. Elle se trouvait près du Prophètelors de la Guerre du Fossé, avec 'Âïsha et Zaynab bint Jahsh dont nous parlerons au chapitre suivant.
Elle fut celle des Épouses qui accompagna le Prophètelorsqu'il prit la route en vue d'effectuer la 'Umra (petit pèlerinage) à la Mecque. Nous savons à ce propos que lui et les Compagnonsqui l'accompagnaient durent s'arrêter à Hudaybiya.
C'est là que fut signée la fameuse Trêve de Hudaybiya, et Um Salama prêta serment -au même titre que les Compagnons - à cette occasion. C'est d'ailleurs elle qui conseilla le Prophètepour qu'il procède au sacrifice de l'animal qu'il avait amené, afin que ceux des Compagnons qui étaient encore sceptiques sur les termes de cette trêve, fassent de même et se résignent à repartir sans aller jusqu'à la Mecque. [Rapporté par Bukhârî]
Elle fut encore une fois tirée au sort pour accompagner l'Envoyé d'Allahlors de la bataille de Khaybar. Elle s'activa - avec d'autres parentes du Prophète - à soigner les blessés et veilla aux provisions d'eau placées à l'arrière des lignes.
Elle accompagnait également le Prophètelors de la conquête de la Mecque, dont il faut rappeler qu'elle eut lieu sans la moindre effusion de sang ! Il semble qu'elle ait encore participé à d'autres campagnes, où elle soignait les blessés.
On se souvient que 'Umaravait eu avec elle un échange assez vif. Il avait une tendance à intervenir de temps en temps dans la vie familiale, à l'occasion des difficultés qui pouvaient survenir, notamment du fait de sa fille Hafsa . Ainsi, lorsqu'il était venu l'interroger sur la manière dont les Epouses (Qu'Allah soit satisfait d'elles) répondaient au Prophèteen lui disant ce qu'elles pensaient, 'Umars'était vu répondre par Um Salama : « Qui donc t'a autorisé à t'interposer entre l'Envoyé d'Allah et ses Épouses ? Certes, nous lui disons franchement ce que nous pensons. S'il l'admet, c'est son affaire, mais s'il devait nous l'interdire, il nous trouverait alors plus obéissantes que nous ne le sommes à ton égard. » 'Umarrepartit sans insister.
Um Salama était une femme érudite. Elle savait lire et écrire et était poète. Elle fit preuve, au sein de la maison du Prophète, d'une grande sagesse.
Plusieurs fois, la Révélation eut lieu tandis que le Prophète se trouvait chez Um Salama. [Sourate 9 – Verset 102 & Sourate 33 – Verset 33].
Elle est la seule parmi les Mères des Croyants, avec Khadîja et 'Aïsha, à avoir eu ce privilège. [Rapporté par Muslim]
Elle nous a transmis un certain nombre de ahadîth (67 croit- on savoir).
Plusieurs Compagnonsvinrent, après la disparition de l'Envoyé d'Allah, la consulter et lui demander des conseils. Notamment, après le meurtre du calife 'Uthmân, elle joua un rôle non négligeable tout en demeurant discrète.
Elle vécut jusqu'à l'âge de 84 ans et mourut pendant le mois de Ramadan en l'an 62 de l'Hégire. Elle fut la dernière survivante des Mères des Croyants (Qu'Allah soit satisfait d'elles).
C'est Abu Hurayraqui dirigea la prière sur elle.
Elle fut enterrée avec ses compagnes dans le cimetière des femmes à Médine.
Elle était la fille de Jahsh, une famille noble de la Mecque. Sa mère, Umaya, était la tante paternelle du Prophète. Prénommée Barâ, elle reçut plus tard le prénom de Zaynab.
C'est sa demi-sœur, Hamna, qui avait pris part à la calomnie contre 'Aïsha , croyant qu'un tel incident serait de nature à discréditer cette dernière aux yeux du Prophète, et profiterait à Zaynab.
Nous savons que Zaynab n'eut rien à voir, pas plus d'ailleurs que les autres Épouses, dans cette affaire et qu'elle fut très peinée pour 'Aïsha qui était son amie.
C'est le Prophètequi organisa le mariage de Zaynab avec Zaydibn Hâritha.
Avant l'Islam, le Prophèteavait acheté ce dernier comme esclave. Il le traitait comme son fils, au point que lorsque son père, Hâritha, originaire du Nord de l'Arabie, vint pour le ramener dans sa tribu, Zayddéclara qu'il préférait demeurer esclave chez un bon maître comme Muhammad!
Très touché, le Prophètele libéra de sa position d'esclave en l'affranchissant, et finit par l'adopter comme son fils. On l'appelait alors Zayd, le fils de Muhammad, et ce, pendant 25 ans !
Plus tard, alors que Zayd était déjà marié avec Zaynab, un verset vint interdire à celui qui n'est pas le géniteur de nommer fils celui qui n'est pas son fils légitime.
Zaydfut désormais désigné sous le nom de Zayd, le protégé de Muhammad. Nous verrons la portée de ce verset.
Les origines modestes de Zayd ne plaisaient guère à Zaynab (Qu'Allah soit satisfait d'elle) qui était de noble naissance. De fait, le ménage ne fut pas très heureux. Nous croyons savoir qu'elle était de petite taille, mais belle.
Un jour qu'il se rendait chez Zaydpour lui parler, le Prophèteaperçut incidemment Zaynab et s'exclama en repartant « Gloire à Celui qui dispose des cœurs ! », trouvant qu'il était bien étrange que Zaydne parvienne pas à vivre en harmonie avec cette femme, belle et de bonne famille.
Mais Zaynab entendit et en tira quelque satisfaction vaniteuse.
Zayddésirait divorcer d'avec Zaynab déjà depuis quelque temps.
Bien que le Prophètel'ait engagé à garder son épouse, il finit par divorcer d'avec elle, la situation du couple étant devenue difficile.
Quelques mois plus tard, le Prophètereçut une révélation à double portée :
D'abord, l'interdiction de l'adoption plénière : il devient interdit de donner son nom à l'enfant pris en charge, ce dernier devant continuer de porter le nom de son géniteur.
C'est depuis ce jour que Zaydfut appelé Zayd, le protégé de Muhammad .
Il est à noter que désormais, les fils héritent de leurs géniteurs et non plus de leur protecteur, ne lésant en rien les droits des enfants légitimes. Enfin, se trouvent également supprimés les risques de mariage entre des frères et sœurs qui, autrement, pourraient ignorer leurs liens. On voit ici encore ce que l'islam a peu à peu apporté pour mettre de l'ordre dans les comportements des individus, afin de respecter les droits de chacun.
« [...] Dieu n'a pas fait vos (véritables) fils de vos enfants adoptifs. Ce ne sont là que des paroles dites de vos bouches [...] Appelez-les par le nom de leurs pères, cela est plus juste auprès de Dieu. Si vous ignorez leurs pères, ce sont alors vos frères dans la foi et vos protégés [...] » [Sourate 33 – Versets 4-5]
Puis, ce fut l'ordre d'épouser Zaynab , qui était donc divorcée du protégé de Muhammad.
Il faut ici préciser qu'avant l'Islam, on n'épousait pas la veuve ou la divorcée d'un enfant adoptif.
{ Il n'appartient pas à un Croyant ou une Croyante, quand Dieu a décidé d'une affaire, ainsi que Son Envoyé, de se donner le choix sur leur façon d'agir. Quiconque désobéit à Dieu et à Son Messager s'égare alors d'un égarement manifeste.
Et quand tu disais à l'un d'eux Qu'Allah avait comblé de Ses bienfaits tout comme toi-même l'avait comblé : "Garde pour toi ton épouse et crains Dieu", tandis que tu cachais en ton âme ce Qu'Allah allait rendre public ! Et tu craignais les gens, alors Qu'Allah est plus digne de ta crainte.
Puis, quand Zayd eut cessé toute relation avec elle, nous t'avons marié à elle afin qu'il n'y ait pour les Croyants aucun empêchement envers les épouses de leurs fils adoptifs, quand ceux-ci ont cessé toute relation avec elles. Or, le commandement de Dieu devient exécutoire. } [Sourate 33 – Versets 36-37]
Anasa rapporté que c'est Zaydlui-même qui se rendit auprès de Zaynab pour lui annoncer que le Prophètesongeait à l'épouser.
Elle était alors occupée à pétrir le pain et répondit : « Je ne ferai rien sans consulter Dieu. » Elle se retira dans son lieu réservé à la prière et fit la prière de la consultation. C'est après cela qu'elle eut connaissance de ce qui avait été révélé à son sujet.
Le Prophèteépousa donc Zaynab .
Selon Tabari, le mariage eut lieu pendant le mois de Muharram en l'an 5 de l'Hégire. Zaynab avait entre 35 et 40 ans.
On nous rapporte que le Prophètene fit pour aucune autre des Épouses un repas de noces tel que celui qu'il fit pour Zaynab ; il consistait en un mouton. [Rapporté par Bukhârî]
Il faut probablement en déduire que la situation matérielle des musulmans était moins difficile à cette époque. Parmi les invités, certains s'attardèrent dans la maison du Prophète. C'est à cette occasion que fut révélé le verset suivant :
« Ô Croyants ! N'entrez pas dans les demeures du Prophète, à moins qu'invitation ne vous soit faite à un repas, sans rester là à attendre la cuisson. Mais, quand on vous appelle, entrez. Puis, quand vous avez mangé, dispersez-vous sans chercher à vous rendre familier pour causer [...]» [Sourate 33 – Verset 53]
On situe également à cette même époque la révélation du verset relatif au port du voile.
Elle fut de celles qui prirent ombrage de ce que les fidèles rendaient leurs visites et apportaient leurs cadeaux au Prophètele jour où il était chez 'Âïsha . Il semble que même Fâtima soit intervenue auprès de son père et on nous dit que Zaynab se serait rendue auprès de lui pour lui parler.
Le Prophèteaurait chargé 'Âïsha de lui répondre ; celle-ci avança des arguments auxquels Zaynab ne trouva rien à rétorquer. L'incident fut clos. On ne pouvait certainement pas supprimer totalement les petites tensions entre elles, malgré les efforts que faisait le Prophètepour les traiter avec la même bienveillance et la même égalité.
Par exemple, Zaynab se vantait parfois auprès des autres Épouses (Qu'Allah soit satisfait d'elles) en leur disant : «C'est le Prophète lui-même qui s'est marié avec vous, tandis que moi j'ai été mariée avec lui par Dieu. »
À ce propos, 'Âïsha n'était pas en reste. N'avait-elle pas été présentée à l'Envoyé d'Allah, enveloppée dans un tapis, par l'Ange Gabriel? Mais ces petits incidents ne les empêchaient pas d'être très proches.
Ainsi, lorsque éclata la calomnie contre 'Âïsha , le Prophètel'avait interrogée sur cette affaire et elle répondit :
« Ô Envoyé d'Allah ! Je surveille mes oreilles et mes yeux. Par Dieu, je ne sais que du bien de 'Âïsha. »
[Rapporté par Bukhârî]
Zaynab accompagna le Prophètedans plusieurs expéditions. Elle participa notamment, avec ses compagnes, 'Âïsha et Um Salama (Qu'Allah soit satisfait d'elles), à la guerre du Fossé.
Zaynab était artisane : elle tannait des peaux avec lesquelles elle fabriquait des objets en cuir qu'elle vendait. Elle faisait des œuvres charitables avec l'argent qu'elle gagnait ainsi. [Rapporté par Bukhârî et Muslim]
Elle était extrêmement généreuse et distribuait aux nécessiteux tout ce qu'elle possédait. On nous rapporte, qu'un jour, elle reçut 12.000 dirhams qu'elle redistribua aussitôt aux pauvres. 'Umars'en émut et tenta de la convaincre de garder un peu pour elle, mais en pure perte.
Elle était très pieuse et jeûnait beaucoup. 'Âïsha a rapporté :
« Je n'ai jamais vu une femme observant mieux sa pratique religieuse que Zaynab, ni une femme plus pieuse, plus sincère dans ses paroles, meilleure envers ses proches, plus généreuse dans ses aumônes et dans sa dépense d'elle-même pour faire l'aumône et se rapprocher du Tout Puissant. » [Rapporté par Muslim]
Zaynab survécut au Prophèteenviron 10 ans, mais il ne semble pas qu'elle ait joué le moindre rôle au sein de la communauté des musulmans après sa disparition.
Elle mourut pendant le califat de 'Umar, en l'an 20 de l'Hégire, âgée d'environ 57 ans.
C'est le calife lui-même qui fit la prière sur elle. Elle fut enterrée avec les autres Mères des Croyants (Qu'Allah soit satisfait d'elles) dans le cimetière de Médine.
Les évènements ayant précédé le mariage
Après son mariage avec Zaynab, le Prophète eut à faire face à d'importants événements qui emplirent la deuxième moitié de la cinquième année hégirienne. En effet, au mois de shawal, il y a eu la bataille du "fossé" (al-khandaq) au cours de laquelle les musulmans affrontèrent une coalition composée d'associationnistes, appuyés par les Juifs. En cette occasion, le Prophète fit creuser une tranchée autour de Médine. D'un côté, il y avait trois mille musulmans et de l'autre dix mille mécréants.
Les Juifs avaient pourtant signé un pacte de non agression avec l'Envoyé de Dieu, mais ils violèrent l'engagement qu'ils avaient pris car, s'imaginaient-ils, qu'avec une telle coalition, ils allaient décapiter l'Islam.
Les ennemis encerclaient les croyants de tous les côtés. Ils étaient si nombreux et paraissaient si déterminés que la peur envahit les musulmans, se figurant que leu fin était peut être proche. Les hypocrites exploitèrent cette situation pour dénigrer le Prophète. Ils disaient :
- Muhammed nous avais promis que nous possèderons les trésors de Kisra et de Qaysar : Mais, aujourd'hui, aucun de nous n'est en sécurité pour aller aux toilettes.
Ces hypocrites avaient accepté de participer au combat, espérant recevoir une partie du butin de guerre, en cas de victoire. Dès qu'ils virent le retournement de la situation en défaveur des musulmans, ils changèrent d'attitude.
Le blocus dura vingt sept jours, durs et pénibles. Heureusement, la bataille prit une tournure défavorable aux associateurs et la victoire sourit, en définitive, aux croyants. Ceux ci retournèrent dans leurs maisons pour se reposer des fatigues de cette bataille. Mais, au milieu de la journée, ils entendirent le muezzin du Prophète faire cette déclaration :
- Celui qui entend cet appel et qui est obéissant doit se préparer à ne s'acquitter de la prière du 'asr que face au Banu Quraysah.
Le Prophète se devait de punir la trahison des Juifs. C'est pourquoi, il décida d'établir le siège de la tribu des Banu Qurayzah. L'encerclement dura vingt cinq jours et se termina par la reddition des juifs. Le Prophète engagea d'autres expéditions militaires, celles des Banu Lahyan et de Dhu-l-Qird. Un mois après, les Banu-l-Mustafa se préparèrent à attaquer la Communauté musulmane. Ils avaient à leur tête al-Harith Ibn Abi Darrar. Mais les musulmans réussirent à défaire cette agression. Parmi les femmes captives de cette tribu, se trouvait Barrah, fille d'al-Harith ou Juwayriyya, comme l'appellera plus tard le Prophète .
La demande en mariage
De retour à Médine, alors qu'il se reposait dans la chambre de Aisha, le Prophète entendit la voix d'une femme qui lui demandait la permission de le rencontrer. 'Aisha se leva pour ouvrir la porte et se trouva devant une très belle jeune fille, d'une vingtaine d'années, tremblante de peur et d'angoisse. 'Aisha ne l'aima pas dès qu'elle l'a vit. Aussi la reçut-elle avec froideur et tenait à s'interposer entre elle et son époux. Cependant, la jeune fille insista tant et si bien que Aisha ne pouvait plus l'empêcher de la faire entrer auprès de l'Envoyé de Dieu.
La jeune fille se présenta. Elle était la fille du chef de clan des banu Mustafa, al-harith Ibn Abi Darrar. Elle dit qu'elle traversait une épreuve dont le Prophète connaissait la raison. Autrement dit, elle était captive et ne supportait pas cette captivité. Aussi, venait-elle demander son aide.
Le Prophète eut pitié de cette jeune fille, affolée et angoissé par son état. Il lui proposa de la délivrer de sa pénible situation en l'épousant. Le visage de la jeune fille s'épanouit. Elle ne croyait pas ce qu'elle entendait. Mais, dans un souffle rapide, elle dit : "J'accepte, Ô Envoyé de Dieu".
La jeune fille dit à son père qu'elle avait choisi Dieu et Son Messager. Al-harith ne pouvait plus s'opposer à la volonté de sa fille. Lui même, il récita la profession de foi et dit au Prophète : "Je reconnais que tu es vraiment l'Envoyé de Dieu". Ce fut alors que le mariage fut décidé et la dot fixée à quatre cents dirhams.
La nouvelle du mariage fut connue à Médine. Dès lors, les musulmans ne pouvaient plus garder en captivité les alliés du Prophète . Ce fut ainsi que tous libérèrent leurs prisonniers et leur rendirent leur liberté. Ainsi le mariage de Juwayriyya lui permit de recouvrir sa dignité et son honneur et ouvrit la voie de la liberté à son peuple.
Aisha continua à se rappeler le moment de l'apparition de juwayriyya devant la porte du Prophète. Elle disait :
- C'était une femme douce et belle. Aucun ne pouvait la voir sans ressentir en lui une forte sensation. Je prévoyais ce qui allait se produire. C'est pourquoi, j'ai éprouvé de l'aversion pour elle dès qu'elle se montra au seuil de ma chambre.
Juwayriyya vécut jusqu'à l'avènement de Mu'awiyya. Elle mourut à Médine au milieu du premier siècle de l'hégire. Marwan Ibn al-hukm, gouverneur de Médine, fit la prière funèbre. Plusieurs versions fixent son âge lors de son décès. Il est probable qu'elle retourna auprès de son Créateur à l'âge de cinquante-six-ans.
Quelques temps après le mariage de Hafsa, une autre veuve, Zaynab bint Khazima Ibn-l-Harith fit son entrée dans la maison du Prophète . De sa biographie, l'histoire n'a retenu que peu de versions d'ailleurs contradictoires.
Le Prophète l'épousa au mois de ramadan, après avoir été divorcée de Tufayl Ibn al-Harith. On ne sait pas exactement combien de temps elle resta auprès de son mari. Les uns disent qu'elle vécut auprès de lui deux ou trois mois, puis mourut. D'autres disent qu'elle vécut huit mois avant de rentre l'âme. Quoiqu'il en soit, elle ne connut les liens conjugaux que pendant un délai relativement court.
Si les écrits des historiens divergent sur la longévité de Zaynab auprès du Prophète, par contre, ils sont tous d'accord sur la description de son portrait moral. Elle est décrite comme une femme bonne, généreuse et très compatissante envers les pauvres. Il n'y a pas un livre qui mentionne son nom, sans y ajouter "Umm l Masakin" (La mère des indigents)
Dans la sira d'ibn Hicham, elle est ainsi décrite : "Elle était appelée Umm-l-Masakin parce qu'elle les nourrissait et distribuait des aumônes en leur nom."
Zaynab est morte alors qu'elle n'avait que trente ans. Le Prophète pria sur sa tombe et l'enterra dans le cimetière de Baqi'. Elle rendit l'âme, compatissante envers les pauvres et satisfaite de son sort. Elle ne connut ni convoitise ni jalousie. Ce fut la première des Mères des croyants à avoir été ensevelie en ce lieu. Ce fut la seconde femme, après as-sayida Khadija , à mourir du vivant du Prophète.
Maymûnah Bint Al-Hârith Ibn Hazn des Banû Hilâl - qu'Allâh l'agrée - épousa le Prophète - paix et bénédiction sur lui - en l'an 7 après l'Hégire, alors que le Prophète avait soixante ans et qu'elle en avait trente-six. Elle était la veuve d'Abû Ruhm Ibn 'Abd Al-'Uzzâ. Sa sœur, Umm Al-Fadl Lubâbah, était la mère de 'Abdullâh Ibn 'Abbâs, le cousin du Prophète et un des ses plus sages compagnons. Umm Al-Fadl faisait partie des premiers Compagnons du Prophète. On dit qu'elle fut la première femme à embrasser l'islam après Khadîjah.
Une fois, Abû Lahab, l'ennemi d'Allâh et de son Messager, pénétra dans la maison de son frère, Al-'Abbâs, et agressa son esclave, Abû Rafi, pour s'être converti à l'Islam. Abû Lahab le frappa et le fit tomber à terre, il s'agenouilla sur lui, puis continua à le frapper. Umm Al-Fadl saisit un bâton et le fracassa sur la tête d'Abû Lahab disant : " Vas-tu le maltraiter parce que son maître est absent ? ". Il fut empli de honte et mourut une semaine plus tard.
La Mère des Croyants, Zaynab Bint Khuzaymah, était également sa demi-sœur. Parmi ses autres sœurs, il y avait Asmâ' Bint 'Umays, la femme de Ja'far Ibn Abî Tâlib, qui épousa plus tard Abû Bakr, et Salmâ Bint 'Umays, la femme de Hamzah, le " Lion d'Allah ". Ses sœurs germaines (issues du même père et de la même mère) étaient Lubâbah , Asmâ', Salmâ et Salâmah. Ainsi Maymunah faisait-elle partie des " Ahlul-Bayt ", (" les gens de la maison "), non seulement parce qu'elle était une épouse du Prophète - paix et bénédiction sur lui - mais également parce qu'elle était une de ses parentes. Zayd Ibn Arqam rapporte que le Prophète - paix et bénédiction sur lui - a dit : " Je t'implore Allah en faveur des gens de ma maison ! " trois fois. Zayd demanda qui étaient les gens de sa maison, et il répondit - paix et bénédiction sur lui : " La famille de 'Alî Ibn Abî Tâlib, la famille de Ja'far Ibn Abî Tâlib, la famille de 'Aqîl Ibn Abî Tâlib et la famille d'Al-'Abbâs Ibn 'Abd Al-Muttalib. "
Maymûnah, ou Burrah de son prénom de naissance, était désireuse d'épouser le Prophète - paix et bénédiction sur lui. [2] Elle alla trouver sa sœur Umm Al-Fadl pour lui en parler et celle-ci, à son tour, en parla à son mari, Al-'Abbâs. Al Abbas alla directement trouver le Prophète - paix et bénédiction sur lui - avec l'offre de mariage de Maymûnah et sa proposition fut acceptée. Quand la bonne nouvelle lui parvint, elle était sur un chameau. Elle descendit immédiatement et dit : " Le chameau et ce qu'il porte sont pour le Messager d'Allah. " Ils se marièrent durant le mois de Shawwâl de l'an 7 après l'Hégire, juste après que les musulmans de Médine aient obtenu la permission de visiter la Mecque sous les conditions du traité d'Al-Hudaybiyah, afin d'effectuer la 'umrah (le petit pélerinage). Ace propos, Allah fit descendre ce verset :
"...Ainsi que toute femme croyante qui se serait donnée au Prophète pourvu que le Prophète ait voulu l'épouser. Ceci est un privilège qui t'es accordé, à l'exclusion des autres croyants." (Les factions, verset 50).
Le Prophète lui donna le nom Maymûnah qui signifie bénie. Elle vécut pendant trois ans avec le Prophète jusqu'à sa mort. Elle était de très bonne nature et s'entendait bien avec tout le monde, et aucune querelle ou mésentente avec les autres femmes du Prophète - paix et bénédiction sur lui - ne fut relatée à son sujet. 'Aï shah dit à son sujet : "Parmi nous, elle était celle qui craignait le plus Allâh - Exalté soit-Il - et elle faisait le maximum pour maintenir les liens de parenté." Ce fut dans sa chambre que le Prophète - paix et bénédiction sur lui - commença à sentir les effets de sa maladie finale. Il demanda ensuite la permission à ses femmes de rester dans la chambre d'Aishah pendant cette période.
Après la mort du Prophète - paix et bénédiction sur lui - Maymûnah continua à vivre à Médine pendant quatorze autres années. Elle mourut à l'âge de quatre-vingts ans, en 51 après l'Hégire, étant la dernière épouse du Prophète - paix et bénédiction sur lui - à décéder. Elle demanda à être enterrée à l'endroit où elle avait épousé le Prophète - paix et bénédiction sur lui, à Saraf, et sa requête fut entendue. On rapporte qu'à ses funérailles, Ibn 'Abbâs dit : "Ce fut la femme du Messager d'Allah - paix et bénédiction sur lui - alors, lorsque que vous la soulèverez, ne la secouez pas et ne soyez pas trop brutaux, mais soyez doux." Il est également rapporté par Ibn 'Abbâs qu'il fut une nuit l'invité de Maymûnah - qui était sa tante - et du Prophète - paix et bénédiction sur lui. Ils dormirent sur leur couche dans le sens de la longueur, et lui dormit au bout, en travers. Après qu'ils aient tous dormi un moment, le Prophète - paix et bénédiction sur lui - se leva pour accomplir la prière du tahajjud (prière nocturne surérogatoire) et Ibn 'Abbâs se joignit à lui.
Ils firent tous deux leurs ablutions et la prière de onze rak'ât, puis se couchèrent à nouveau jusqu'à l'aube. Bilâl fit l'appel à la prière et le Prophète fit deux autres rak'ât courtes avant de se rendre à la mosquée pour guider la prière de l'aube.
Ibn 'Abbâs dit qu'une des invocations que le Prophète - paix et bénédiction sur lui - fit durant cette nuit fut : " Ô Allah, introduit la lumière dans mon cœur, ma langue, mon ouïe, ma vue, derrière moi, devant moi, à ma droite, à ma gauche, au dessus et en dessous de moi ; introduit la lumière dans mes tendons, ma chair, mon sang, mes cheveux et ma peau ; introduit la lumière dans mon âme et rend la lumière abondante pour moi ; accorde moi la lumière."
Il est communément reconnu que ce fut après le mariage du Prophète - paix et bénédiction sur lui - avec Maymûnah, ce qui lui faisait neuf femmes ('Aishah, Sawdah, Umm Habîbah, Hafsah, Umm Salamah, Zaynab Bint Jahsh, Juwayriyyah, Safiyyah et Maymûnah), que le verset suivant fut révélé : "Il ne t'est plus permis de changer d'épouses ni de prendre d'autres femmes, en dehors de tes esclaves même si tu es charmé par la beauté de certaines d'entre elles. Dieu voit parfaitement toutes choses." (Les factions, verset 52)
Après cela, le Prophète - paix et bénédiction sur lui - ne se maria plus jamais. Cependant, lorsqu'un souverain chrétien, ou le Muqawqis d'Egypte lui envoya deux femmes esclaves qui étaient sœurs en guise de cadeau (en réponse à une lettre du Prophète les invitant à embrasser l'Islam), accompagnées d'un beau vêtement et de quelques médicaments, le Prophète accepta une des deux filles, Maria, dans son foyer : il donna sa sœur Serene à un homme qu'il souhaitait honorer, à savoir Hassân Ibn Thâbit. Il accepta le vêtement, et renvoya les médicaments avec le message : " Ma sunnah est mon médicament ! " Ceci eut lieu en l'an 7 après l'Hégire.
La sixième année de l'hégire prit fin après que deux événements, l'un gai et l'autre triste, eurent lieu dans la Maison du Prophète . Ce fut d'abord le mariage avec Juwayriya et ensuite l'affaire du collier de 'Aïsha. Il eut ensuite le pacte de Hudaybiyya signé avec les associateurs.
Au début de la septième année de l'Hégire, le Prophète se prépara à affronter, dans une bataille décisive, les Juifs qui l'avaient trahi dans celle du "Fossé". Il fallait mettre un terme à cette menace des Juifs qui exploitaient la moindre occasion pour, pensaient-ils, détruire les assises de l'Islam.
Au cours de la seconde moitié de Muharram, l'Envoyé de Dieu se dirigea, à la tête de ses troupes, vers Khaybar, siège de ses ennemis irréductibles. Les musulmans sortirent victorieux après avoir détruit les forteresses des Juifs, tués les hommes et capturé les femmes.
Parmi ces dernières, il y avait Safiya Bint Huyiya Ibn Akhtab , qui descendait de la branche de Aaron, frère de Moïse. Elle n'avait pas encore dix huit ans. En dépit de son jeûne âge, elle avait été mariée deux fois, d'abord avec le poète de son clan, Sallam Ibn Mashkam, et ensuite avec Kinana Ibn ar-Rabi'. Elle faisait partie des nombreuses captives que les musulmans firent à Khaybar.
Safiya contint sa douleur et s'efforça de garder sa dignité et son orgueil. Ce n'était pas le cas de sa cousines qui pleurait, se lamentait et jetait de la terre sur sa tête. Les deux femmes étaient traînées par Bilal. Le Prophète s'approcha d'elles. Il les regarda avec pitié et compassion.
Il dit à Bilal :
- Je vois que tu t'es dépouillé de toute miséricorde en traînant ces deux femmes qui viennent de perdre leur mari.
Après quoi, il jeta sur Safiya son manteau, ce qui signifiait qu'il l'avait choisie pour lui.
Selon Anas, le Prophète dit à Safiya :
- As-tu de quoi payer la rançon ?
- Cela était possible quand je vivais dans l'associationnisme. Comment pourrais-je le faire à présent que je vis en Islam.
Le Prophète affranchit Safiya et l'épousa. Sa libération remplaçait la dot qu'il devait lui offrir. Pendant ce temps, la cousine continuait à se lamenter, en déchirant ses vêtements de désespoir.
Safiya entre dans la Maison du Prophète
Quand le calme fut revenu et que la peur de Safiya s'était quelque peu dissipé, il porta celle ci derrière lui sur son chameau et se dirigea vers Médine. A mi-chemin, il s'arrêta. Il constata que Safiya était plus sereine. Cette dernière était donc prête pour le mariage. Une coiffeuse vint la peigner, la maquiller et la parfumer. Les effets de la tristesse et de la souffrance disparurent complètement. Ce n'était plus la femme sortie du blocus de Khaybar, captive et humiliée.
A l'occasion de ce mariage, un banquet avait été organisé. Les invités mangèrent les bonnes choses prises de Khaybar jusqu'à satiété. Après quoi, le Prophète reprit le chemin de Médine, ayant toujours à l'esprit le premier refus de Safiya de le prendre comme époux. Mais elle lui raconta un songe qu'elle avait fait avant la prise de Khaybar : La nuit de son mariage avec Kinana Ibn Rabi', elle vie en rêve une lune se poser sur ses genoux. Elle le raconta à son mari qui lui dit en colère : En vérité, tu désires Muhammed, le roi du Hijaz.
Le Prophète se réjouit de cette nouvelle. Il comprit qu'à présent, elle l'acceptait comme époux. Il ne voulait pas lui montrer sa satisfaction. Aussi lui demanda-t-il la raison de son premier refus. Elle lui dit :
- J'avais peur pour ta sécurité tant que tu étais encore proche du lieu ou se trouvaient les Juifs.
Les souvenirs de Safiya
Safiya se remémorait les discussions des membres de sa famille qiu parlaient de leur Livre annonçant la venue d'un Prophète. Elle se rappelait leur haine et leur déception quand ce Prophète émigra à Médine alors que cela aurait dû être pour eux une bonne nouvelle.
Safiya se rappelait encore quand son père et son oncle paternel partirent à la rencontre de ce Prophète, entrant triomphalement à Médine. Ils ne revinrent qu'au coucher du soleil. Ils arrivèrent exténués et abattus par cette apparition. Safiya s'approcha d'eux pour entendre leur discussion. Ses deux parents étaient tellement soucieux qu'ils ne firent pas attention à sa présence. Elle entendit son oncle dire à son père :
- Est-ce bien lui le Prophète attendu ?
Ayant reçu une réponse affirmative, il insista :
- Tu l'as bien reconnu et tu en as la preuve ? Si c'est le cas, que ressens-tu à présent ?
- Par Dieu ! Mon animosité à son égard demeure et persiste, répondit le père de Safiya.
L'empoisonnement du Prophète
Pendant ce temps, les musulmans n'avaient pas oublié l'acte perfide d'une femme juive de Khaybar, à savoir Zaynab Bint al-Harith, épouse de Sallâm Ibn Mishkam, un des chefs du clan des juifs de Khaybar. Elle entra chez le Prophète alors que celui-ci se sentait tranquille depuis la reddition des Juifs et la conclusion de leur accord. Cette femme lui présenta un rôti d'agneau empoisonné après avoir demandé à ses Compagnons : "Quelle est la partie préférée de l'Envoyé de Dieu?" Aussi força-t-elle la dose de poison dans la partie concernée.
Le Prophète ne mangea qu'une partie du rôti et donna l'autre à un de ses Compagnons Bishr Ibn-Barra. Après quoi, il dit : "L'os de ce rôti me dit qu'il est empoisonné!" Il appela la femme de Sallam qui reconnut avoir empoisonné la viande en disant :
- Je me suis dis : si c'est vraiment un Prophète, il en sera averti. Si ce n'est qu'un roi, je me serais débarrassé de lui.
Le Prophète ne prit aucune mesure contre elle. Cependant, son compagnon, qui avait mangé une partie du rôti, mourut des conséquences de l'empoisonnement.
La vie familiale
Sur le chemin du retour à Médine, la chamelle, qui portait Safiya, trébucha et fit tomber celle-ci. Les femmes y virent un mauvais présage et dirent qu'il fallait éloigner d'eux cette Juive. Aussi, le Prophète préféra ne pas faire entrer Safiya parmi ses autres épouses. Ainsi, il l'emmena chez un de ses Compagnons, Harith Ibn an-Na'man. Les femmes Ansarites se précipitèrent pour aller admirer la beauté de cette Juive. Entre temps, le Prophète reconnut 'Aisha, le visage entièrement recouvert, qui marchait d'un pas précipité. De loin, il la suivit du regard. Il la vit entrer dans la maison d'al-Harith Ibn Nu'am. Il l'attendit jusqu'au moment où elle ressortit. Il alla vers elle et la saisit par son vêtement en lui disant : "Comment l'as-tu trouvé, ô la rousse ?"
La jalousie de 'Aisha se manifesta et, haussant les épaules, elle répondit :
- J'ai vu la Juive.
- Ne dis pas cela car elle a embrassé l'Islam et son islam est bon.
'Aisha ne fit aucun commentaire et se dirigea à la maison où Hafsa l'attendait avec impatience pour connaitre l'opinion qu'elle avait sur la nouvelle mariée. 'Aisha ne nia pas que Safiya était d'une grande beauté. Elle lui raconta aussi que leur époux la surprit à la sortir de la maison d'al-Harith ainsi que la discussion qu'elle eut avec lui.
En arrivant dans la maison du Prophète , Safiya trouva deux groupes de femmes qui l'attendaient. D'un côté, il y avait 'Aisha, Hafsa et Sawdah et de l'autre, les autres femmes dont Fatima az-Zahra. C'était comme si ces deux groupes lui demandaient de quel clan elle allait faire partie. Il lui était difficile de choisir entre l'épouse préférée du Prophète et sa fille bien aimée. Aussi, décida-t-elle de ne pas prendre position pour l'une ou l'autre mais d'entretenir plutôt de bons rapports avec toutes les femmes qu'elles soient dans un clan ou dans l'autre.
Cependant, Safiya ne pouvait s'attendre à aucun mal de la part de Fatima car celle-ci n'avait nullement l'intention de participer à ces antagonismes de femmes. Au contraire, elle rechercait la paix morale de son père.
La crainte de Safiya ne pouvait venir que de la jalousie de 'Aisha qui ne supportait pas qu'une belle femme puisse venir s'associer à elle à l'intérieur de la Maison de l'Elu de Dieu. En effet, l'épouse préférée du Prophète, Hafsa et les autres femmes s'enorgueillissaient de leur appartenance à la famille des Qurayshites et des Arabes. Quant à Safiya, elle n'était qu'une juive donc une étrangère et une intruse.
Quand à Safiya entendait les critiques et les sous-entendus de Aisha et Hafsa, elle se plaignait au Prophète en pleurant. Elle lui disait :
- Comment peuvent-elles prétendre être meilleure que moi alors que Muhammad est mon mari, mon père est Aaron et mon oncle paternel est Moïse ?
L'Envoyé de Dieu sentait que Safiya était considérée comme une étrangère dans sa Maison. Aussi ne se privait il pas de la défendre auprès des autres femmes, chaque fois que l'occasion se présentait.
Au cours d'un voyage, le Prophète était accompagné de Safiya et de Zaynab bint Jahsh. Chemin faisant, le chameau de la première se blessa et ne pouvait plus supporter un poids sur son épaule. Heureusement que le palefrenier de zaynab était spacieux et qu'il pouvait contenir deux personnes. Le Prophète lui demanda alors de cédé un espace à Safiya. Zaynab répondit avec hauteur et orgueil :
- Moi, donner une place à cette juive !
Cette réflexion fâcha l'Envoyé de Dieu. Il bouda Zaynab deux mois ou même trois sans jamais l'approcher.
Safiya ne fut jamais privée de la protection de son mari jusqu'à la mort de ce dernier. Alors que le Prophète se trouvait atteint de cette maladie qui allait l'emporter, toutes les Mères des croyants se réunirent autour de son lit. Safiya dit, en cette occasion :
- Je jure par Dieu ô Messager de Dieu ! J'aurai aimé être atteinte à ta place du mal qui te fait souffrir.
Les autres femmes se regardèrent en se jetant des clins d'oeil, comme pour se dire que Safiya ne pensait pas ce qu'elle disait. Le Prophète surprit leurs regards. Aussi leur dit-elle :
- Cessez de faire des clins d'oeil entre vous. Je jure par Dieu que les paroles de Safiya sont sincères.
A la mort du Prophète, Safiya perdit cette protection. Les gens n'avaient pas oublié qu'elle était d'origine Juive. Ils ne manquaient pas de la harceler, de temps à autre, pour lui rappeler ses origines, en dépit de la sincérité de son islam et de sa qualité d'épouse de l'Elu de Dieu. Ce fut ainsi qu'une de ses servantes alla voir l'Emir des Croyants, 'Umar Ibn al-Khattab pour lui rapporter que Safiya pratiquait le Sabbat et priait à la manière des Juifs. Ce n'était, en réalité, qu'un pur mensonge, une invention destinée seulement à porter préjudice à sa maîtresse.
Le calife interrogea la Mère des croyants pour connaître la vérité. Safiya lui répondit :
- Quant au Sabbat, je ne l'aime plus depuis que Dieu me l'a fait remplacer par le vendredi. Quant à être Juive, je ne peux pas nier cette origine puisque je suis d'origine Juive.
Lorsque Safiya interrogea sa servante sur les raisons qui la poussèrent à lancer contre elle de telles calomnies, elle reçut cette réponse :
- C'est Satan.
Safiya la congédia en décidant de la libérer de son asservissement :
- Pars d'ici, lui dit-elle, tu es libre !
Lors de la grande fitna, qui aboutit à l'assassinat de 'Uthman, Safiya prit ouvertement position pour ce dernier. Ainsi, quand le troisième calife de l'Islam était encerclé par ses assaillants, elle allait, elle-même lui porter à manger et à boire.
Safiya mourut sous le califat de Mu'awiyya et fut enterrée au cimetière d'al-Baqi avec toutes les autres Mères des croyants.
Maria , la copte (Chrétienne Egyptienne) naquit dans un village appelé Hifin, situé sur le bord oriental du Nil. Son père, était copte et sa mère aussi. Après sa première enfance, au début donc de sa jeunesse, elle alla résider, avec sa soeur Sérine, dans le palais du dirigeant des coptes. Elle vivait en ce lieu quand elle entendit parler d'un Prophète, habitant la Presqu'île arabique, qui appelait à une nouvelle religion céleste. Elle se trouvait dans le palais quand Hatib Ibn Abi Balta'a vint en délégation, porteur d'un message au roi. Celui-ci entra et remit la lettre en question.
Après : Au nom de Dieu, le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux, la lettre appelait à embrasser l'Islam. Le roi lut le message, le plia avec soin et le plaça dans un étui qu'il remit à l'une de ses servantes. Ensuite, il se tourna vers Hatib et lui demanda de lui parler de ce Prophète et de le décrire. A la fin de l'exposé de l'émissaire du Prophète, il dit à Hatib :
- Je savais qu'il restait encore un prophète à envoyer. Je pensais qu'il allait se manifester dans le Shâm car c'est dans cette région que les messagers sont issus. Je vois qu'il vient d'apparaître dans une terre arabe... Malheureusement, les coptes ne m'obéiront pas.
Il ne pouvait donc embrasser l'Islam, sans quoi il risquerait certainement de perdre son trône. Or, il ne voulait pas se séparer de son autorité sur son peuple.
Dans sa réponse au Prophète , le roi le remercia en l'informant qu'il envoyait, avec son émissaire, deux femmes coptes, de hautes conditions sociales, ainsi que des vêtements somptueux et un mulet qu'il pourrait monter.
En remettant le message à Hatib, il s'excusa de ne pas répondre favorablement à son appel d'adhésion à l'Islam car les coptes sont attachés à leur religion. Il lui demanda également de garder secret ce qui vient de se produire entre eux, afin que son peuple n'en sache absolument rien.
Après quoi, Hatib partit avec les présents royaux et les deux soeurs, Maria et Sérine. Il était compréhensible que ces dernières quittent avec regret leur patrie. Pour apaiser leur tristesse et leur faire oublier quelque peu ce qu'elles viennent d'abandonner, Hatib se mit, en cours de route, à leur raconter l'histoire antique du pays des Arabes. Il leur conta les récits et les légendes que le temps avait tissés autour de la Mecque et du Hijaz au cours des siècles. Après quoi, il leur parla du Prophète et de l'Islam. Il sut choisir les faits les plus convaincants et les arguments les plus probants, si bien que les deux soeurs furent réjouies de ce qu'elles venaient d'entendre et leurs coeurs s'ouvrirent à l'Islam et à son Prophète.
Arrivée et vie à Médine
L'arrivée de Maria et de sa soeur eut lieu en l'an VII de l'Hégire. Le Prophète venait de revenir de Hudaybiyya où il conclut un pacte avec les Qurayshites. Maria lui plut et la prit pour épouse. Quant à sa soeur, il la maria avec son poète Hasan Ibn Thabit. Le bruit courut à travers la ville qu'une belle Egyptienne, aux cheveux longs, venait d'arriver des rivages du Nil et qu'elle avait été offerte en cadeau à l'Elu de Dieu.
Une année s'écoula et Maria menait une vie heureuse. Sa nostalgie de l'Egypte s'estompa. A présent, elle se familiarisa avec la vie médinoise et vivait paisiblement dans la Maison du Prophète. Aussi, accepta-t-elle volontiers de porter le Hijab, au même titre que les Mères des croyants.
Sa situation s'identifiait quelque peu à Hagar, la femme d'Abraham, qui, elle aussi, quitta l'Egypte, dans son état d'esclave, pour venir s'installer au Hijaz, en femme libre. Présentement, la différence portait sur le fait que sa compatriote donna naissance à Ismael. Allait-elle, à son tour, donner un enfant au Prophète ? C'est que son mari, depuis la mort de Khadija eut plusieurs épouses, pourtant, aucune d'elles ne lui donna un héritier mâle.
La bonne nouvelle
Deux années s'étaient écoulées depuis son mariage avec l'Envoyé de Dieu. Le souvenir de Hagar et d'Ismael continuait à habiter son esprit quand, un jour, elle sentit qu'elle portait un enfant dans son ventre. Cependant, elle n'y croyait pas, se figurant que ce n'était qu'une illusion qu'elle se faisait. C'était peut-être son imagination qui lui jouait un tour. C'est pourquoi, vivant encore dans le doute, elle cacha la nouvelle pendant un ou deux mois. Cependant, au fur et à mesure que la grossesse prenait forme, le doute se transforma en certitude. Ce n'était plus un rêve mais bel et bien une réalité.
Maria communiqua d'abord la bonne nouvelle à sa soeur Sérine qui l'assura qu'elle portait bien un enfant dans son ventre. Elle fut transportée de joie et elle annonça au Prophète la prochaine naissance d'un enfant. Celui ci leva les yeux au Ciel et remercia, à son tour, son Créateur. Sa joie atténua quelque peu la tristesse qui l'envahi après le décès de ses filles Zaynab, Ruqiya et Umm Kaltoum.
L'évènement ne tarda pas à faire le tour de la ville :
- L'Elu de Dieu attendait un enfant de Maria l'Egyptienne.
Nous pouvons imaginer le désarroi des autres épouses. Voilà une femme étrangère enceinte alors qu'elle n'avait séjourné qu'une année avec le Prophète, au moment où elles-mêmes n'avaient pas porté de descendant dans leur ventre après plusieurs années dans sa Maison. C'était le destin.
Le Prophète craignait pour la santé de Maria. Aussi, la transporta-t-il dans les faubourgs de Médine afin qu'elle jouisse du calme et préserve la santé de l'enfant qui allait naître. Sérine resta auprès de sa soeur Maria pour prendre soin d'elle jusqu'au jour de la naissance, à savoir la nuit du mois de Dhu-l-Hijja, an VIII de l'Hégire. Le Prophète fit appel à une sage-femme et s'isola dans un coin de la maison où il s'adonna aux prières et aux implorations.
La sage femme lui annonça la naissance d'un garçon qui, issu d'un homme libre, allait affranchir sa mère de son état d'esclave. L'envoyé de Dieu était transporté de joie. Il nomma son fils Ibrahim, nom du père des croyants. Il distribua en aumônes une quantité d'orge égale au poids du nourrisson.
Un jour, le Prophète prit son fils dans ses bras et le porta chez Aisha afin que celle-ci puisse y voir les traits similaires aux siens. Certes, l'épouse préférée retint ses larmes de joie. Elle se retint de montrer sa jalousie mais elle la manifesta sous une autre forme :
- Je ne vois aucune ressemblance entre toi et ce fils.
Aisha avait dit plus tard, qu'elle n'avait jamais été jalouse d'une femme autant que de Maria car elle était non seulement belle mais aussi Dieu lui accorda un enfant alors que les autres épouses en étaient privées.
Le décès d'Ibrahim
Hélàs ! Le bonheur de Maria ne dura qu'une année et un peu plus. Elle allait connaître une épreuve terrible et une période amère : la perte de son enfant. Celui ci tomba malade alors qu'il n'avait pas encore clos ses deux années. Maria fit appel à sa soeur pour lui tenir compagnie et veillait avec elle autour du lit d'Ibrahim. Cependant, la vie de ce dernier commença à s'éteindre petit à petit.
Le Prophète , apprenant la mauvaise nouvelle, arriva à la maison, appuyé sur l'épaule de Abd ar-Rahman ibn Awf, parce que la douleur et la souffrance lui firent perdre ses forces. Il prit son fils dans les bras de sa mère et le mit sur ses genoux, le coeur triste.
Il ne restait plus à l'Elu de Dieu qu'à dire que telle était la volonté divine. La mort était le lot de tous les humains. Les derniers rejoindront toujours les premiers, ajoutant un deuil à un autre. Certes, les yeux pleurent et le coeur est triste, mais, en aucune manière, ils ne se lamentent du sort décidé par le Créateur.
Il se tourna vers Maria, attendri par l'état où elle se trouvait. Il lui dit :
- Ibrahim est mon fils. Son allaitement se poursuivra au Paradis.
Il fit alors appel à son neveu, al-Fadl, le fils de 'Abbas pour laver le petit garçon tandis que lui, il demeura assis dans un coin, triste. Ensuite, il ensevelit son fils, s'acquitta d'une prière de quatre unités et l'ensevelit lui-même dans le cimetière d'al-Baqi.
L'éclipse solaire
Au retour de l'enterrement, le soleil se voila et l'horizon s'obscurcit. Quelqu'un dit :
- L'éclipse du soleil est conséquente à la mort d'Ibrahim.
Cette réflexion parvint aux oreilles du Prophète . Il se tourna vers ses compagnons et leur dit :
- Le soleil et la lune sont deux des signes de Dieu. Ni l'un ni l'autre ne s'éclipsent ni à la mort ni à la vie de quelqu'un.
De son côté Maria, la blessure au coeur, fit preuve de patience, acceptant avec résignation la volonté de Dieu. Elle resta cloîtrée dans sa chambre pendant la durée de l'enterrement. Ensuite, elle alla au cimetière, s'assit près de la tombe de son fils. Elle ne pouvait retenir ses larmes. Elle les avait retenues jusque là devant son mari, pour ne pas aggraver la blessure de ce dernier. Mais là, seule, ses yeux exprimaient la forte douleur de son coeur.
Le Prophète mourra une année plus tard. Il laissa Maria veuve. Celle-ci mourut en l'an XVI de l'hégire. Le calife Umar appela les gens à se rassembler et à suivre le cercueil. Il pria sur sa tombe et l'enterra dans le cimetière de Baqi.
Sources:http://islammedia.free
http://www.islamophile.org/
http://islammedia.free.fr/
http://www.sajidine.com/
1. Par islamiates le 02/07/2024
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