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Comprendre l'univers après Einstein

 

par Normand Mousseau*

La grande unification
Le rêve des physiciens: trouver une théorie qui inclurait toutes les forces de l'Univers.

Albert Einstein a passé les 25 dernières années de sa vie à essayer de construire, sans succès, une théorie qui unifierait toutes les forces physiques. En 1865, James Clerk Maxwell démontra que le magnétisme et l’électricité pouvaient être unifiés en une seule théorie: l’électromagnétisme. Cent ans plus tard, le modèle standard unifiait l’électromagnétisme avec les forces nucléaires faibles et fortes. Il ne reste plus aujourd’hui qu’à ajouter la force gravitationnelle. Mais ce n’est pas si simple…
Car le modèle standard suppose l’existence d’un espace-temps dans lequel se déploient les différentes forces, alors que la force gravitationnelle crée l’espace-temps par sa simple présence. Sans masse, et donc sans force, dit la théorie d’Einstein, il n’y a pas d’espace ni de temps. 

La théorie dite “des cordes” représente actuellement le principal espoir d’unification. Cette théorie suppose que nous vivons dans un univers en 11 dimensions dont seulement 4 (3 dimensions spatiales et une dimension temporelle) sont perceptibles à notre échelle. Difficile à manipuler mathématiquement, elle n’a toujours pas réussi à prédire des quantités physiques mesurables. 

Quoi qu’il en soit, la découverte d’une telle théorie ne signifiera pas la fin de la physique! On connaît depuis un certain temps le modèle décrivant le monde à l’échelle élémentaire. C’est la mécanique quantique décrite par l’équation de Schrödinger. Par contre, on ne comprend pas encore l’origine de la vie.

Au fil des ans, les physiciens ont découvert que l’assemblage d’atomes aux propriétés bien connues mène souvent à de nouveaux phénomènes, difficilement compréhensibles en appliquant la théorie quantique dans toute sa complexité. Ces phénomènes sont caractérisés par l’apparition de structures ou de propriétés collectives qui dépendent finalement assez peu des détails spécifiques des atomes et des molécules qui les composent. Au-delà de la grande unification des forces, les physiciens doivent donc comprendre les principes à l’origine de phénomènes comme la croissance des flocons de neige et l’apparition de la vie sur Terre.


Le modèle standard au panier?
Développé cinq ans après la mort d'Einstein, ce modèle confirme avec éloquence la puissance de la théorie quantique.

Le modèle standard inclut deux types de particules: les fermions et les bosons. Les premiers forment la matière. Ce sont les électrons, les quarks (constituant les protons et les neutrons, par exemple), les neutrinos et quelques autres particules. Les seconds transmettent les forces entre les fermions. Ainsi, selon cette théorie, la force électromagnétique entre deux particules chargées électriquement se transmet grâce à un échange de photons virtuels.

L’efficacité du modèle standard est impressionnante. Entre autres, il a permis de prédire l’existence de nombreuses particules, dont les bosons W et Z, le gluon, les quarks “charme” et “top”, ainsi que le boson de Higgs. Au fil des ans, l’existence de toutes ces particules fut confirmée expérimentalement, sauf celle du boson de Higgs que les physiciens recherchent activement; il représente en effet le seul élément qui manque. 

Malgré tout, les physiciens ne sont pas entièrement satisfaits de ce modèle qui n’inclut pas les masses des particules fondamentales, qu’on doit ajouter à partir de mesures expérimentales. Surtout, il laisse de côté la force gravitationnelle. 

Récemment, des mesures effectuées au Japon et au Canada ont montré que les neutrinos passaient d’une forme à une autre, un phénomène qui n’était pas prédit par le modèle standard. Il ne reste plus qu’à espérer que le nouvel accélérateur de particules, le plus puissant du monde qui sera inauguré en 2007 à Genève, ouvre la voie vers un nouveau modèle plus adéquat. 


Sombres questions

La constante cosmologique, introduite de manière artificielle par Einstein dans sa théorie générale de la gravitation, n'était peut-être pas une erreur.

Jusqu’à récemment, les physiciens pensaient savoir de quoi était composé l’Univers: de baryons, d’électrons, de neutrinos et de photons. Ce sont toutes des particules présentes dans notre coin du système solaire. Pourtant, il semble maintenant que seulement 4% de l’énergie et de la matière de l’Univers correspondent à ce que l’on connaît. Le reste est composé d’environ 70% d’énergie et de 26% de matière de nature inconnue, d’où leur nom: énergie et matière sombres. 

On sait depuis les années 1960 que la température de l’Univers est d’environ 3 K (degrés Kelvin, soit -270 degrés Celsius), un résidu du big-bang. En mesurant la température de fond, à l’aide des satellites COBE et WMAP, les cosmologistes ont découvert, il y a quelques années, que l’Univers est très homogène. Cette observation, associée à d’autres mesures, permet de déduire la quantité d’énergie et de matière sombres.

Si cette découverte excite plusieurs cosmologistes, certains physiciens estiment qu’ajouter 96% d’ignorance à une équation présente une solution facile à un problème ardu. Voilà en tout cas qui annonce une période fertile pour l’astronomie et la cosmologie. 

Heureusement, grâce entre autres aux télescopes spatiaux, il est enfin possible de comparer les prédictions avec des données fiables et variées. On peut ainsi tester les différents modèles et corriger, si nécessaire, les lois fondamentales qui gouvernent l’Univers. 


De la biologie dans la physique

Le fonctionnement des systèmes vivants semble reposer sur de grands principes fondamentaux. Depuis 10 ans, les physiciens tentent de les définir.

Que peut bien faire un physicien en biologie? Comprendre. De toutes les sciences, la physique est peut-être celle qui possède la plus solide composante théorique. Dans le domaine de la biologie, elle permet de développer, à partir des innombrables données expérimentales, les concepts à l’origine du vivant.
 
Des physiciens, comme Francis Crick, codécouvreur de la structure de l’ADN, s’intéressent depuis longtemps à la biologie. Pour beaucoup, le monde du vivant permet de tester les idées de la théorie de la complexité. 

Pour ce faire, ils étudient, entre autres choses, les phénomènes thermodynamiques associés aux échanges d’atomes et d’énergie dans les cellules; le processus de croissance de fibres amyloïdes associée à la maladie d’Alzheimer; l’encodage de l’information dans le génome ou dans les protéines; le fonctionnement des moteurs biologiques qui permettent à certaines cellules de se déplacer. 

Derrière toutes ces investigations se cache l’espoir d’expliquer ces processus émergents qui permettent à des assemblages d’atomes ou de molécules simples de développer la vie.


Chaud dedans!
La découverte de céramiques conduisant l'électricité sans perte thermique à des températures extrêmes a surpris la communauté scientifique.

On savait depuis 1911 que des métaux pouvaient atteindre l’état de “supraconductivité” à des températures variant de 1 K à 30 K. Mais ce n’est qu’en 1957 que les physiciens John Bardeen, Leon Cooper et Robert Schrieffer furent en mesure d’expliquer le phénomène. La théorie finale de la supraconductivité à basse température limite toutefois le phénomène à des métaux maintenus à environ 40 K. 

En 1986, on a découvert avec surprise que des céramiques – des matériaux en principe isolants – pouvaient devenir des supraconducteurs à des températures de plus de 90 K. Cela a remis en question toute la compréhension des phénomènes électroniques en rapport avec la matière condensée. Il devenait désormais envisageable de développer des supraconducteurs à des températures s’approchant de celle d’un environnement normal, ce qui rendrait possible entre autres le transport d’électricité et la fabrication d’aimants puissants. De quoi occuper les physiciens pour les prochaines années…

Comme la supraconductivité à basse température, la supraconductivité à haute température est un phénomène complexe. Depuis 18 ans, 30 000 articles ont été publiés sur le sujet et aucune théorie complète n’a encore été énoncée.

Il est difficile d’expliquer ce phénomène, et d’autres similaires. Cela démontre les limites de nos méthodes mathématiques. Un des grands défis de la physique actuelle est donc de développer les outils théoriques qui permettront de résoudre cette question. 


Le cantique des quantiques
Pour développer des ordinateurs quantiques, les physiciens doivent parfaire leur compréhension de cette théorie complexe.

La mécanique quantique implique qu’électrons et atomes sont un mélange d’ondes et de particules qui suivent plusieurs chemins en même temps; parfois même un nombre infini de chemins. Tous les ordinateurs actuels sont quantiques, car le transistor, l’élément de base d’une puce, fonctionne grâce au saut d’électrons à travers une barrière énergétique, un événement purement quantique. Mais la logique d’un ordinateur de bureau, elle, est très classique. Elle consiste à comparer, additionner et soustraire des zéros et des uns selon un ordre bien déterminé. 

Récemment, les physiciens se sont rendu compte que les effets quantiques pourraient être mis à profit afin d’accomplir des tâches impossibles pour les ordinateurs conventionnels. Une machine à logique quantique pourrait, dans le cas de certains problèmes, étudier un nombre infini de solutions en une seule itération du programme. De quoi faire saliver beaucoup de chercheurs. 

Mais les défis sont considérables. Une fois qu’on a généré le nombre infini de solutions, comment extraire celle qui nous intéresse? De même, si on sait comment maintenir un ou deux atomes dans un état quantique, on ne sait pas le faire pour un système plus gros. On est donc loin d’un ordinateur du genre. Au-delà de l’informatique, la recherche permettra de mieux comprendre la mécanique quantique, un domaine encore bien mystérieux.

Matériaux extrêmes
Les travaux d'Einstein ont ouvert la voie à la fabrication de matériaux qui repoussent les limites de la matière.

Le travail d’Einstein sur le mouvement brownien a permis, pour la première fois, de prouver de manière mécanique – et non plus théorique – l’existence des atomes. Il aura fallu attendre les années 1980, cependant, avant de les voir, grâce au microscope à effet tunnel. Cet appareil permet de suivre les déplacements d’un seul atome sur une surface ou, encore mieux, d’en positionner plusieurs selon une forme donnée. 

En parallèle avec le développement de nouveaux appareils, les physiciens ont aussi inventé des algorithmes quantiques qui permettent de prédire les propriétés de certains matériaux. Grâce à ces algorithmes, et à des ordinateurs toujours plus puissants, on peut tester théoriquement les propriétés de nouvelles structures atomiques.

Ces outils ont transformé la physique. D’une étude systématique des propriétés des matériaux trouvés dans la nature ou de ceux développés à la suite de manipulations, les physiciens se sont transformés en créateurs avec, pour seule limite ou presque, l’imagination.

* Normand Mousseau est professeur agrégé au département de physique de l'Université de Montréal.

http://www.quebecscience.qc.ca/Apres-Einstein

  • e6un7

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