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Le travail sur soi-même: les priorités et la progressivité

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Le travail sur soi-même, de même que le rappel fait à sa famille et à ses frères et sœurs musulmans, ne sauraient consister en le simple fait d'édicter un grand nombre d'obligations et d'interdits. La révélation a choisi la voie de la formation formation des cœurs, de l'éducation, du pragmatisme et de la patience, et c'est cette voie qu'il nous faut suivre, aujourd'hui encore, pour vivre l'islam et faire le rappel de ses enseignements.

Aïcha, épouse du Prophète (sur lui la paix), raconte ainsi : "Parmi les premiers passages coraniques à avoir été révélés se trouve une sourate parmi les sourates mufassal, dans laquelle il est question du Paradis et de l'Enfer. C'est ensuite, lorsque les hommes furent retournés à l'islam, que le licite et l'illicite furent révélés. Si dès le début Dieu avait révélé : "Ne buvez plus d'alcool", les hommes auraient dit : "Nous ne le délaisserons jamais !". Si dès le début Dieu avait révélé : "Ne commettez plus l'adultère !", les hommes auraient dit : "Nous ne la délaisserons jamais !"…" (al-Bukhârî, 4707). Jundub ibn Abdillâh raconte lui aussi la même expérience, vécue en la compagnie du Prophète : "Nous étions, jeunes hommes, auprès du Prophète. Nous apprîmes alors la foi avant d'apprendre le Coran [= les lois coraniques]. Puis nous apprîmes le Coran, ce qui fit augmenter notre foi" (Ibn Mâja, 61) (cliquez ici pour découvrir ce que JUndub a désigné ici par le mot "foi").

En sus de la foi en l'existence, l'unicité et les noms et attributs de Dieu, en le jour dernier, etc., les Compagnons du Prophète apprirent aussi la morale : les devoirs et les interdits fondamentaux (Al-Muwâfaqât 2/93-94).

Ce n'est qu'après ce profond travail sur les cœurs que la révélation s'est mise à édicter obligations et interdits détaillés.

Et même ici, elle a choisi la voie du pragmatisme. Le texte coranique témoigne ainsi, aujourd'hui encore, de la patiente progression et de la pédagogie qui furent les siennes dans la mise en place de l'interdiction : l'exemple bien connu de la législation relative à l'alcool l'illustre parfaitement, puisqu'il montre une progression s'étendant sur une période de nombreuses années et comportant plusieurs étapes intermédiaires avant l'interdiction complète, survenue seulement, d'après un avis, en l'an 8 de l'hégire (Fat'h ul-bârî, 8/353), soit quelques... 18 années après le début de la prédication publique du Prophète. Et lorsque cette interdiction complète fut révélée, les musulmans étaient prêts à accueillir celle-ci au point que Anas ibn Mâlik raconte : "J'étais en train de verser à boire chez Abû Tal'ha, et à l'époque l'alcool que les gens buvaient était un alcool de datte. Le Prophète dépêcha une personne pour annoncer : "L'alcool a été interdit". (En entendant cela,) Abû Tal'ha me dit : "Va verser l'alcool dehors". Je sortis le faire. Il coula dans les ruelles de Médine…" (al-Bukhârî, 2332, Muslim, 1980). Les cœurs ayant été formés, une législation de ce genre ne pouvait en effet qu'être bien accueillie.

Aujourd'hui encore, il faut donc, d'une part, ne pas oublier le travail primordial sur la profondeur et l'intensité de la foi, et, d'autre part, comprendre les priorités (awlawiyya) par rapport à la situation d'un lieu donné, à un moment donné, pour rappeler graduellement obligations (wâjibât) et interdits (manhiyyât).

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A) Une objection formulée par certains frères et sœurs :

On entend parfois objecter à cela que cette progressivité était possible à l'époque où la révélation, elle-même graduelle, se faisait au Prophète (sur lui la paix), mais qu'aujourd'hui, l'ensemble des préceptes (et donc les obligations et les interdictions) ayant été donné et la révélation ne se faisant plus, nul ne peut plus déclarer permis ce que Dieu a déjà interdit.

En fait la réalité est plus nuancée :
– déjà il est certaines obligations (et certaines interdictions) dont le caractère même dépend du contexte dans lequel les musulmans vivent, en correspondance étroite avec les différentes situations (dawr makkî / dawr habashî / dawr madanî) que le Prophète et/ou ses Compagnons ont connues (lire à ce sujet notre article Comprendre les différences de situation) : pour les musulmans qui se trouvent dans une situation comparable à celle du Prophète quand il était à la Mecque, de nouveau l'action n'est pas instituée (mashrû') ;
– ensuite, s'il est certain qu'il est d'autres obligations et interdits qui sont aujourd'hui applicables même s'ils ont été révélés vers la fin de la mission du Prophète, ce qu'il faut comprendre c'est que personne ne remet en cause leur caractère (obligatoire ou interdit), celui-ci étant désormais définitivement établi : nous parlons seulement de la nécessité de respecter la progressivité dans le rappel (da'wa) de ces règles et dans le fait de les faire appliquer concrètement à l'échelle de la société (tanfîdh)...

A.a) La progressivité dans le rappel des règles :

C'est bien là ce que le Prophète (sur lui la paix) avait enseigné à Mu'âdh quand il l'avait envoyé au Yémen : il l'avait fait vers la fin de sa mission, quand la plupart des obligations et des interdictions de l'islam étaient déjà révélées ; et pourtant il lui avait bien recommandé d'être progressif lorsqu'il informerait ceux qui se convertiraient à l'islam des obligations leur incombant ; il lui avait dit : "Tu vas te rendre auprès de Gens du Livre. Que la première chose à laquelle tu les invites soit l'adoration de Dieu. Lorsqu'ils connaîtront Dieu, informe-les que Dieu a rendu obligatoires cinq prières dans la journée et la nuit. Lorsqu'ils feront cela, informe-les que Dieu a rendu obligatoire sur eux une aumône qui sera prise de leurs riches et donnée à leurs pauvres…" (al-Bukhârî, 1425, Muslim, 19, etc.). An-Nawawî écrit en commentaire : "...Le Prophète (sur lui la paix) a enseigné une progression dans l'invitation, commençant par le plus important, et ainsi de suite. Ne vois-tu pas qu'il a parlé d'abord de la prière puis de l'aumône, alors que personne n'a jamais dit qu'(après l'acceptation de l'islam) la prière devenait obligatoire mais non pas l'aumône ?" (Shar'hu Muslim, 1/198).

Au mois de ramadan de l'an 9 de l'hégire, une délégation de la tribu Thaqîf, qui avait auparavant combattu les musulmans, se rendit à Médine rencontrer le Prophète et embrasser l'islam. Parmi les choses qu'ils demandèrent au Prophète, il y avait que pendant trois années encore on ne fasse rien à leur temple dédié à leur idole al-Lât. Le Prophète refusa. Ils demandèrent qu'on le leur laisse deux années encore. Le Prophète refusa. Ils demandèrent une année. Le Prophète refusa. Ils finirent par demander qu'on le leur laisse un mois. Le Prophète refusa de s'engager à le laisser subsister pendant un laps de temps défini ("abâ 'alayhim an yada'ahâ shay'an mussamman"). Ils demandèrent que ce ne soit pas eux qui soient chargés de briser leurs idoles et qu'ils n'accomplissent pas les cinq prières quotidiennes. Le Prophète répondit : "Pour ce qui est du fait de briser vos idoles par vos mains mêmes, nous vous en déchargerons. (Mais) pour ce qui est de la prière : il n'y a pas de bien dans une religion dans laquelle il n'y a pas de prière" (Zâd ul-ma'âd 3/498-500). Ils demandèrent aussi qu'ils ne remettent pas d'aumône [= zakât] et ne mènent pas de lutte armée contre l'ennemi. Jâbir rapporte que "le Prophète dit après cela : "Bientôt ils donneront l'aumône et participeront à la lutte lorsqu'ils seront devenus musulmans"" (Abû Dâoûd, n° 3025). Voyez : le Prophète refusa de s'engager à ce que le temple idolâtre ne soit pas démoli immédiatement (c'était une nécessité pour l'Arabie ou pour le Hedjaz : cliquez ici pour lire notre article sur le sujet) ; de même, le Prophète refusa qu'ils ne se mettent pas à prier immédiatement après leur conversion à l'islam : "Il n'y a pas de bien dans une religion dans laquelle il n'y a pas de prière", leur dit-il. Mais pour ce qui est de démolir le temple et de briser leurs idoles, le Prophète accepta que ce ne soit pas eux qui le fassent, et il dépêcha deux Compagnons chez eux pour le faire à leur place ; de plus, le Prophète ne dit rien quand ils dirent qu'ils ne donneraient pas l'aumône obligatoire (la zakât) et ne participeraient pas à la lutte armée : ce n'est pas que le Prophète releva d'eux le caractère obligatoire de ces deux actes (puisqu'un acte obligatoire doit nécessairement être considéré obligatoire, cela relève de la croyance même) ; c'est qu'il savait qu'il s'agissait pour eux de progresser dans leur pratique de l'islam, selon le degré de priorité des actes, et qu'au bout d'un certain temps de pratique des actes prioritaires (notamment la prière), ils progresseraient et viendraient à la pratique des autres actes obligatoires : "Bientôt ils donneront l'aumône et participeront à la lutte lorsqu'ils seront devenus musulmans."

Lorsqu'il avait envoyé Mu'âdh ainsi que Abû Mûssâ au Yémen, le Prophète leur avait également recommandé ceci : "Rendez facile et non difficile. Donnez la bonne nouvelle et ne faites pas fuir". An-Nawawî écrit en commentaire : "Ce hadîth ordonne de donner la bonne nouvelle de la grâce de Dieu et de Sa grande Miséricorde, et interdit de faire fuir en ne mentionnant que les menaces de châtiment sans mentionner avec celles-ci les bonnes nouvelles. Ce hadîth enseigne d'être doux avec ceux qui se sont récemment convertis, de même qu'avec ceux qui sont enfants et adolescents, de même qu'avec ceux qui se sont repentis : il faut être doux avec eux et leur communiquer progressivement les actes de dévotion. Les enseignements de l'islam ont été révélés progressivement. Si on rend les choses faciles pour celui qui entre dans la dévotion ou qui veut y entrer, elles seront faciles pour lui, et le plus souvent il progressera et augmentera. Mais si on rend ces choses difficiles pour lui, il ne se mettra pas à les pratiquer ; et s'il les pratique, il ne le fera pas longtemps ou ne les appréciera pas" (Shar'h Muslim, 12/41). Car il faut comprendre qu'un homme ou un groupe d'hommes qui étaient jusqu'à présent éloignés de la religion ont besoin d'une certaine progressivité pour se mettre à pratiquer tout ce qui est obligatoire sur eux. Il faut être patient avec eux, tout en rappelant la nécessaire constance dans la pratique.

Aujourd'hui encore, il faut donc respecter la progressivité dans le rappel des règles. Et il faut savoir à ce sujet qu'en islam les croyances et la spiritualité sont fondatrices par rapport aux actes ; parmi les actes, ce qui est obligatoire est prioritaire par rapport à ce qui est facultatif ; se préserver de ce qui constitue une grande faute morale (kabîra) est prioritaire par rapport à arrêter ce qui constitue une petite faute morale (saghîra) ; obligation ou interdiction, un acte qui fait l'objet d'un consensus (mujma' 'alayh) doit être considéré prioritairement par rapport à un acte qui fait depuis les premiers temps de l'Islam l'objet d'une divergence d'avis entre les savants (mukhtalaf fîh).

A.b) La progressivité dans l'application concrète de celles des règles qui sont applicables dans le milieu où l'on vit :

Par rapport aux pays musulmans, il faut également respecter la progressivité dans l'application concrète des règles. C'est ce que met en exergue le récit suivant, avec Omar ibn Abd il-Azîz, le calife omeyyade célèbre pour sa justice et sa droiture : "وفيما يحكى عن عمر بن عبد العزيز أن ابنه عبد الملك قال له: "ما لك لا تنفذ الأمور؟ فوالله ما أبالي لو أن القدور غلت بي وبك في الحق." قال له عمر: "لا تعجل يا بني؛ فإن الله ذم الخمر في القرآن مرتين وحرمها في الثالثة؛ وإنى أخاف أن أحمل الحق على الناس جملة فيدفعوه جملة، ويكون من ذا فتنة"" : Un jour, Omar ibn ul-'Azîz fut ainsi questionné par son fils Abd ul-Malik : "Père, pourquoi n'appliques-tu pas [toutes] les choses ? Je ne me soucie pas que moi et toi ayons à supporter des difficultés à cause de la vérité". Le calife répondit : "Ne te presse pas, mon fils. Car Dieu a, dans le Coran, critiqué deux fois l'alcool, (puis,) la troisième fois, l'a interdit. Je crains que si j'applique d'un coup aux gens (tout) ce qui est vrai, ils rejettent d'un coup (tout ce qui est vrai) ; et que naisse à cause de cela une fitna" (Al-Muwâfaqât, ash-Shâtibî, 1/402). Voyez : l'alcool a été interdit en l'an 8 de l'hégire, et cette interdiction est complète et définitive, applicable pour tout musulman et musulmane quel que soit le lieu qu'il ou elle se trouve ; Omar ibn Abd il-Azîz parle bien, pourtant, de progressivité dans le fait de faire respecter sur la scène publique cette interdiction, par la société musulmane du début du 2ème siècle. Du début du 2ème siècle de l'hégire ! Aujourd'hui, en ce 15ème siècle de l'hégire, comment ne pas être pragmatique et ne pas tenir compte, avec les normes, de l'état des lieux ? Ibn ul-Qayyim écrit : "L'idéal (al-wâjib) est une chose et le réel (al-wâqi') est une chose. Le (bon) juriste est celui qui fait le lien entre idéal et réel et applique l'idéal en fonction des possibilités. Ce n'est pas celui qui provoque l'inimitié entre idéal et réel" (A'lâm ul-muwaqqi'în, 4/169).

Il ne s'agit pas de devenir paresseux et, au nom de la progressivité, se donner bonne conscience en remettant tout à des lendemains toujours plus lointains ; il s'agit concrètement de déterminer ce qui est applicable dans le contexte où l'on vit, puis de faire de la situation une fine analyse qui nous permette de :
– fixer les objectifs qui sont nôtres dans ce contexte (tahdîd ul-maqâssid),
– penser les moyens devant en permettre la réalisation (tahdîd ul-wassâ'ïl),
– enfin, déterminer les étapes devant rendre possible bi idhnillâh la concrétisation de ces moyens (tahdîd ul-marâhil) en fonction des priorités (fahm ul-awlawiyya) (lire à ce sujet As-Siyâssa ash-shar'iyya fî dhaw'i nussûs ish-sharî'ah wa maqâssidihâ, al-Qardhâwî, pp. 298-307).

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B) Récapitulatif :

Il faut comprendre les priorités dans le travail sur soi-même, sur le terrain, sur ses frères et sœurs. Sinon le risque est grand de faire des "islamisations de surface, creuses à l'intérieur".

Malheureusement, combien d'entre nous commencent aujourd'hui par ce qui devrait normalement être rappelé ou appliqué à la fin ! Pourtant le seul rappel ou la seule promulgation d'une règle ne change pas les hommes tant qu'elle n'est pas précédée et accompagnée d'une réforme des mentalités et des cœurs. L'échec de la tentative de prohibition de l'alcool aux Etats-Unis au début du XXème siècle grégorien le prouve. A comparer avec l'interdiction de l'alcool faite en Arabie au VIIème siècle grégorien sous la direction du Dernier des Messagers de Dieu, Muhammad (sur lui la paix) : ici l'interdiction fut non seulement réalisée de façon graduelle mais fut aussi et surtout précédée et accompagnée d'une profonde éducation spirituelle et morale.

Il faut donc, d'une part, graduellement rappeler les normes et les règles. Et il faut aussi et surtout, d'autre part, ne pas oublier le travail sur l'intensité de la foi : renforcer son lien avec Dieu, intensifier pour Lui l'amour et la crainte révérentielle dont tout croyant porte une parcelle dans les profondeurs de son cœur. Il faut commencer par le commencement, par là où a commencé le Coran, parler des rétributions de l'au-delà, évoquées dans le Coran et la Sunna… Alors nous pourrons inshâ Allâh vivre nous aussi ce que Jundub a raconté : apprendre la foi et apprendre les normes, la foi préparant le terrain pour l'acceptation des normes, et la connaissance et le respect concret ('amalan) des normes faisant augmenter la foi.

Wallâhu A'lam (Dieu sait mieux).

http://www.maison-islam.com/articles/?p=53

    • e6un7

éducation cœur priorités progressivité islam coran interdits

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