La qualité humaine de l’homme ne peut être considérée comme complète et ne peut se manifester sans des valeurs. La religion est la source des valeurs.
C’est une religion immuable (Sourate 6, verset 161). Selon Dieu le Tout-Puissant. La religion est unique, invariable dans son message, Dieu dit :
Qu’il vous est tracé, en matière de religion, le chemin qu’il avait enjoint à Noé et que nous te révélons à toi, ainsi que ce que nous avons enjoint à Abraham, à Moïse et à Jésus (Sourate 42, verset 13).
Ces commandements comprennent les éléments de direction et de lumière :
Nous avons, en vérité, révélé la Tora où se trouvent une Direction et une Lumière (Sourate 5, verset 44).
Ensuite, Il dit de Jésus, Paix sur lui : Nous lui avons donné l’Evangile où se trouvent une Direction et une Lumière (Sourate 5, verset 46).
Citer toute source de direction quelle qu’elle soit, c’est les citer toutes. J’emprunterai donc mes exemples à une civilisation qui a concrétisé et pratiqué ces valeurs, à savoir la civilisation de l’Islam. En cela, je tiens à rappeler que la civilisation islamique n’est pas l’héritage seul des Musulmans à l’exclusion des autres. Il s’agit plutôt d’une entreprise à laquelle ont contribué tous ceux qui ont vécu sur les vastes territoires issus de l’expansion de l’Islam qui s’étendent sur trois continents. Ce fut une civilisation qui s’est enrichie et s’est diversifiée grâce aux connaissances et aux sciences qui ont été apportées par ceux dont la vie et la conduite étaient également dictées par une religion et un ensemble de valeurs. Dans le domaine médical, cette civilisation islamique se prévaut de compter un nombre considérable de médecins juifs et chrétiens. Leurs prémisses dans la pratique médicale et leur code de conduite pour le traitement de leurs patients ont été guidés par les principes éthiques qui sont tirés de la religion.
Selon ces valeurs, les principes suivants déterminent la place de l’homme :
- L’homme est une créature honorée et respectée. Nous avons honoré les fils d’Adam. (Sourate 17, verset 70). Pour honorer l’homme comme il se doit, il faut qu’il soit en parfaite santé.
- L’éminent docte Al Shatbi dit dans son ouvrage intitulé « Les concordances » : (le canon a été établi pour préserver cinq éléments essentiels : la religion, l’âme, la procréation, la richesse et la raison.) De manière évidente, trois de ces cinq éléments essentiels ; l’âme, la procréation et la raison ; ne peuvent être vraiment préservés que si la santé est protégée au préalable.
- La vie sacrée, respectée et protégée est un droit inaliénable de tout être humain. La valeur d’un seul être humain correspond à la valeur de l’humanité entière. Dieu dit : « Celui qui sauve un seul homme est considéré comme s’il avait sauvé tous les hommes (Sourate 5, verset 32) »
Toute atteinte à la vie d’un être humain, qu’il s’agisse d’un fœtus, d’une personne âgée ou d’un handicapé, est une atteinte à toute l’humanité.
« Celui qui tue un homme qui lui-même n’a pas tué, ou qui n’a pas commis de violence sur la terre, est considéré comme s’il avait tué tous les hommes. (Sourate 5, verset 32) »
- La justice et la bienfaisance sont des valeurs primordiales. D’un point de vue linguistique dans le Coran, la justice comprend également la notion d’égalité.
La bienfaisance aussi est une des expressions les plus éloquentes du langage utilisé dans le Coran. Ce mot implique principalement la dimension de « qualité ». Ce qui est décrit comme « bienfaisant » est également « bon ». Dieu a promis une juste récompense à ses serviteurs : « …..qui écoutent la Parole et qui obéissent à ce qu’elle contient de meilleur (Sourate 39, verset 18) »
La qualité est nécessaire en toute chose. Le Prophète a dit : « en effet, Dieu a décrété la qualité (ou perfection) dans toute chose »
Mais le mot « bienfaisance » comprend également les notions d’altruisme et de compassion qui ont pratiquement disparu aujourd’hui de la pratique médicale. Il reflète aussi la disposition au « dévouement », qui est désiré pour ses semblables ce que l’on désire pour soi-même, et même de favoriser de manière altruiste ses semblables alors que l’on peut se trouver soi-même dans le dénuement.
La bienfaisance implique aussi une conscience vivante et l’observance de la loi de Dieu en tout acte et en tous temps. Le prophète a dit : « La bienfaisance, c’est l’adoration de Dieu comme si vous le voyiez. »
Dès les premiers temps de l’Islam, ces deux valeurs, la justice et la bienfaisance, ont été respectées et traduites dans la pratique. Les exemples suivants en sont des illustrations :
• Les patients ont le droit à être pris en charge par la communauté telle qu’elle est représentée par l’État. Al Balaziry dans son ouvrage intitulé « la Conquête des Territoires » relate que « En arrivant à Al Djabiyah à Damas, le deuxième Calife Omar croisa quelques lépreux chrétiens. Il ordonna qu’une part de l’aumône légale leur fût versée pour assurer leur subsistance ».
• Les enfants – tous les enfants – ont droit à la protection de la communauté telle qu’elle est représentée par l’État. Ibn Saad dans son ouvrage « Les Classes » relate que : « Omar attribuait cent dirhams aux nouveaux-nés, cette somme étant portée à deux cent lorsque l’enfant grandit et ensuite augmentait de manière proportionnelle. On donnait cent dirhams à chaque enfant trouvé et l’allocation était fournie au tuteur chaque mois et renouvelée chaque année. La communauté était instamment invitée à traiter les enfants trouvés avec compassion et gentillesse et une indemnité pour leur subsistance et leur allaitement était déboursée du trésor public ».
• Les faibles, les handicapés et les personnes âgées ont droit à la protection de la communauté telle qu’elle est représentée par l’État, comme ceci est affirmé dans le Pacte de Protection conclu entre Khaled Ibn Al Walid et le peuple de Hirah : « lorsqu’une personne âgée ne peut plus travailler ou est frappée d’infirmité ou bien encore était riche et est devenue pauvre, devant alors compter sur la charité de sa famille, je leur ai ordonné que cette personne soit exemptée de la taxe de défense et qu’elle reçoive une aide ainsi que les membres de sa famille, payée par le trésor public (financé par les Musulmans) aussi longtemps qu’elle reste établie sur la terre des Musulmans » (citation du Livre de l’Impôt).
Les exemples précédents montrent le rang de priorité accordé par l’État islamique à la santé en tant que droit de l’être humain quels que soient sa race, son sexe et sa religion. Les soins prodigués par l’État aux individus débutent à la naissance lorsqu’un allaitement maternel sain est assuré, et se poursuivent jusqu’à la vieillesse en garantissant les conditions d’une vie en bonne santé. Entre ces deux stades extrêmes de la vie, aucune personne malade, handicapée, frappée d’incapacité ou blessée n’est négligée ; toutes bénéficient de soins appropriés.
Et c’est la raison pour laquelle la médecine a sa place respectée parmi les doctes et les scientifiques dans l’Islam. Le docte célèbre Al Iss Ibn Abdel Salam dit dans son ouvrage intitulé « les bases du jugement dans l’intérêt de l’humanité » : (la médecine est semblable à la législation : elle a été créée pour garantir la sécurité, préserver une bonne santé et éviter les maux que constituent les affections et les maladies. La source de la législation et de la médecine est Une, et les deux servent à procurer des avantages aux gens et à leur éviter des maux).
Ainsi, depuis les toutes premières années du Message, un certain nombre de règles et de normes éthiques ont été élaborées pour régir la pratique médicale. Le Prophète (selon la citation d’Abu Naiim) a déclaré : « Celui qui pratique la médecine sans être compétent en la matière, et provoque par là même la mort d’un patient ou lui cause des blessures, sera tenu responsable et une compensation totale sera exigée de lui ».
Le système « Hisba », une ingéniosité singulièrement remarquable de cette nation, représentant une méthode « d’assurance de la qualité » au sens le plus large possible. Son application a débuté sous le règne des Califes « bien guidés ». Le système Hisba a ensuite été développé davantage et l’une des fonctions principales du muhtasib était de contrôler les médecins et de vérifier que leur pratique était correcte et qu’ils respectaient les normes éthiques.
Il n’y a guère de libres consacrés à la médecine qui soient parues sans que n’y figure une section sur l’éthique de cette noble profession. Les exemples sont très nombreux et nous citerons l’ouvrage publié au septième siècle de l’ère islamique « La lumière des Yeux et l’Opus des Arts » de Salahudin Ibn Youssuf AL Kahal al Hamawy, manuel d’ophtalmologie dans lequel il recommande à tous ses élèves de « savoir que cette profession est un don de Dieu accordé à ceux qui le méritent car le médecin devient l’intermédiaire entre le patient et Dieu Tout-Puissant lorsque le médecin cherche à rétablir la bonne santé du patient. Lorsque le patient recouvre sa santé par son entremise, le médecin est hautement honoré par la population mais il devient aussi célèbre par son art et est considéré comme étant digne de confiance. Alors, dans l’au-delà, il sera récompensé par le Seigneur de tous les êtres vivants puisque le bienfait qu’il procure aux créatures du Seigneur, et en particulier aux indigents et aux infirmes, est grand. Avec les autres valeurs éthiques louables, vous devez aussi acquérir les qualités de générosité et de compassion. Vous devrez donc rechercher la propreté, la chasteté, la pureté et la compassion. Respectez votre Dieu, notamment lorsque vous examinez des femmes et préservez leurs secrets, par bonté, par piété et par dévouement à la connaissance et refus des tentations de la chair ; … Restez proche des doctes, rendez visite régulièrement aux patients, efforcez-vous de les guérir, et recherchez les moyens pouvant leur faire recouvrir la santé. Si vous pouvez obliger les pauvres et leur rendre service sans contrepartie ou même à vos propres frais, alors faites-le ».
Certains médecins éminents ont consacré des livres entiers au sujet de l’éthique médicale. Il y a mille ans, Al Razzi a publié son livre intitulé « l’Éthique du Médecin ». Il s’agissait d’une lettre qu’il a adressé à certains de ses élèves et dans laquelle il disait « …. le médecin doit être aimable envers les gens, préserve leur réputation en leur absence et se montrant digne de confiance vis-à-vis de leurs secrets, puisque certains peuvent cacher certaines choses à ceux qui leur sont les plus proches tels leurs parents, leurs enfants et pourtant les dévoiler à leur médecin par nécessité. Et le médecin est appelé à traiter des femmes, des jeunes filles ou des jeunes garçons, qu’il respecte alors leur pudeur, n’outrepasse par la nécessité du traitement. Qu’il place sa confiance en Dieu et attende que la guérison vienne de Lui. Qu’il ne calcule pas les choses selon la valeur de ses efforts ou le gain qu’il en retirera et que Dieu soit son guide dans tout ce qu’il fait.
Pourquoi alors discutons-nous à nouveau de l’éthique de la médecine et de la santé aujourd’hui ?
Nous le faisons en raison des progrès récents qui ont été réalisés au cours des deux derniers siècles et tout particulièrement durant les vingt dernières années ; nous le faisons aussi parce que dans une certaine mesure, l’Occident a délaissé certaines valeurs et certains enseignements chrétiens ainsi que d’autres idéaux qui sont parvenus en Europe avec le retour des Croisés. Nous en discutons parce que la relation humaine qui existe entre le patient et le médecin a été affaiblie par l’effet de ces deux facteurs. Dans de nombreux cas, les médecins et d’autres personnes travaillant dans le domaine médical, à la recherche de fins principalement matérielles, ont oublié qu’il s’agissait en tout premier lieu « d’êtres humains » avec qui ils traitaient !
Les êtres humains sont devenus « des cas »………………………..
……………….tout simplement des machines nécessitant un entretien ou des réparations !
……………….de pures choses !
Par la suite, des progrès et des découvertes ont été réalisés qui ont été rendus possibles par des avancées technologiques et qui naturellement ont été utilisés par la profession médicale. Parmi ceux-ci, on peut citer :
- la transplantation d’organes
- la recherche sur les sujets humains
- la génie génétique
- les progrès réalisés dans le traitement de la stérilité
- les dispositifs qui maintiennent artificiellement les fonctions vitales permettant de garder un patient « en vie » même sans activité ni conscience pendant des années, à l’état végétatif pour ainsi dire.
Je n’ai donné ici que quelques exemples de ces avancées. Il va sans dire que d’autres questions se posent comme conséquences de ces avancées, lesquelles constitueront bientôt des dilemmes éthiques.
Exemples de dilemmes éthiques
- Avons-nous le droit de prélever des organes sur des êtres vivants ?
- Avons-nous le droit de faire le commerce des organes ?
- Pouvons-nous prélever des organes sur des cadavres ?
- À quel moment une personne est-elle considérée comme « morte » ?
- Est-ce lorsque cette personne cesse de respirer ou bien lorsque le tronc cérébral devient inerte ?
- Pouvons-nous effectuer des recherches sur un sujet sans sa permission ou sans avis ou avertissement concernant tous les détails des risques impliqués ?
- Pouvons-nous effectuer des recherches sur une femme enceinte ?
- Sur des fœtus ?
- Sur des membres d’une tribu lorsque le chef de la tribu donne son consentement ?
- Où fixons-nous les limites du génie génétique ?
- Devons-nous le permettre sans restriction ni contrôle ?
- Devons-nous le permettre jusqu’à un certain degré et l’interdire au-delà d’une certaine limite ?
- Quelle est notre position vis-à-vis de l’insémination ou de la fécondation artificielle (assistée) ?
- En ce qui concerne les bébés-éprouvette ?
- La maternité de substitution ?
- La parenté non déterminée ?
- Est-ce que le médecin qui a fait le serment de préserver la vie peut contribuer à y mettre un terme ?
- Le médecin peut-il aider son patient/sa patiente à mettre fin à ces jours pour échapper au stade terminal d’une maladie ?
- Pouvons-nous permettre ce genre « d’homicide » en lui donnant le nom de « mort provoquée par pitié » ou « euthanasie » ?
- Devons-nous débrancher le dispositif qui maintient artificiellement les fonctions vitales si le fait de prolonger la vie est futile ? S’agirait-il aussi d’une « mort provoquée par pitié » ? ou ne peut-on pas le considérer comme un « homicide » et est donc permissible ?
- Quelle est notre position en ce qui concerne le patient atteint du SIDA ?
- Allons-nous l’abandonner, en le réprouvant ? Ou allons-nous soulager sa détresse, le protéger et alléger ses souffrances tel que le Prophète nous l’a ordonné ?
- Devons-nous nous approcher de lui ? Et jusqu’à quel degré ?
- Faut-il conseiller au patient de continuer d’avoir des relations sexuelles normales ?
- Inversement, faut-il lui accorder des privilèges et des droits que nous n’accordons pas aux patients souffrant d’autres maladies telles la tuberculose, le paludisme ou la peste ?
- Article paru dans "Repère médical" N° 3 (Avec de légères modifications).
http://quran-m.com/firas/france/index.php?option=com_content&view=article&id=242:lislam-et-lethique-medicale&catid=48:penser-lislam&Itemid=100
Alors que les savants Musulmans Sunnites se sont toujours majoritairement accordés sur la classification des innovations (bida’a) en bonnes et en mauvaises, certains nient aujourd’hui l'existence de bonnes innovations en Islam, ceci à cause de la compréhension limitée qu'ils ont des Textes Sacrés causée par une lecture exclusivement littérale de ces derniers.
Ces Musulmans qui rejettent l'existence de bonnes innovations citent pour argumenter leur avis ce hadith dans lequel le Prophète a dit : « Méfiez vous de ce qui est innové ! Certes, toute innovation est une bida'a et toute bida'a est une déviation ». [Hadith rapporté par Abou Dawoud, at-Tirmidhy, Ibn Mâjah].
Comme à leur habitude, ceux qui rejettent l’existence de bonnes innovations en Islam, vont au plus vite, sans rentrer dans le cœur des textes et en rejetant ce qui a été dit à ce sujet par les plus grands savants de l’Islam. Ils préfèrent privilégier leur propre compréhension la faisant passer auprès des Musulmans comme étant celle des Pieux Prédécesseurs [radhia Allâhou ‘anhoum].
L'Imam an-Nawawi explique que dans le hadith cité ci-dessus, l'adjectif « toute » est un terme général au sens restreint. C'est à dire que toute innovation qui est en contradiction avec la religion est rejetée, et non pas toute innovation dans l’absolu.
De la même façon, quand Allâh dit dans la sourate al-Ahqaf, versets 24 et 25 : « C’est un vent qui contient un châtiment douloureux qui détruit tout par ordre de Son Seigneur puis le lendemain, on ne voyait plus que leurs demeures ». Il est évident que ce vent n’a pas tout détruit, c'est-à-dire la totalité des choses puisque les demeures ont été épargnées.
L'adjectif « toute » est ici un terme général au sens restreint comme dans le hadith sur l'innovation.
On retrouve cette utilisation de l'adjectif « toute » dans de nombreux versets du Coran.
En voici quelques exemples :
« Pour ce qui est de la barque, elle appartenait à de pauvres gens qui travaillaient en mer. J'ai voulu lui donner l'apparence d'être défectueuse, parce que derrière eux il y avait un roi qui s'emparait de toute embarcation et l'usurpait ». [Coran - Sourate Al-Kahf, verset 79]
Il est ici évident que « toute » désigne les barques neuves, en bon état. Sinon il aurait été inutile de donner une apparence défectueuse à la barque.
Aussi, quand Allâh a ordonné à Noé [‘alayhi salam] d’embarquer « dans l'arche un couple de toute espèce […] ». [Coran – Sourate Al-Mu'minun 23:27]
Cela signifie un ensemble limité d’espèces car il est évidemment impossible d’emporter les milliards d’espèces qui peuplent la surface de la terre.
Cette utilisation de l'adjectif « toute » se retrouve également dans de nombreux hadiths.
En voici quelques exemples :
Le Prophète a dit : « Soignez-vous en utilisant la graine de nigelle, c’est un remède contre toutes les maladies à l’exception de la mort ». [Hadith rapporté par Bukhari, Muslim, at-Thirmidhi, ibn Majah et Ahmad au travers de 19 chaines]
Les commentateurs sont unanimes pour dire que cela ne signifie par pour autant que la graine de nigelle (haba sawda) soigne toutes les maladies. Là encore le hadith a un sens spécifique et restreint. Ainsi le terme « toute » désigne « de nombreuses » maladies.
Le Prophète a dit : « Tout ce par quoi le musulman se divertit est bâtil, sauf le fait qu'il tire à l'arc, qu'il entraîne son cheval, ou qu'il joue avec son épouse : ces (actions) relèvent du haqq ». [Hadith rapporté par at-Tirmidhî et cité qualifié de Sahih dans Ihya Uloom ud-Din de l’Imam al-Ghazali, vol 2]
L’Imam al-Ghazali écrit : « Cela ne signifie pas que toute chose, à l’exception des trois citées est illégale, cela signifie simplement que les autres choses sont exemptes de récompenses. Pour autant s’amuser à faire le doux chant des oiseaux ou jouer à n'importe quel autre sport pour le plaisir n'est pas illégal ». [Dans l’Ihya page 171]
Qu’il s’agisse du Coran ou des Hadiths, on retrouve bien cette même utilisation du mot « toute » dont la portée est générale mais dont le sens est restreint.
Lorsque l’on étudie de près le sujet de l’innovation, on note également que les détracteurs oublient fréquemment de citer le hadith suivant dans lequel le Prophète a dit :
« Si quelqu’un instaure dans l'Islam une bonne tradition (sounnah hassanah), il en aura la récompense et aura une récompense chaque fois que les gens la referont après lui sans que rien ne soit diminué de leurs récompenses. Mais si quelqu’un instaure dans l'Islam une mauvaise tradition (sounnah sayyi’ah), il se chargera de son péché et sera chargé d’un péché chaque fois que des gens la referont après lui sans que rien ne soit diminué de leurs péchés ». Ce Hadith authentique est pourtant rapporté par les Imams Muslim, at-Tirmidhî, al-Nasâ'î, Ibn Mâjah, et d'autres.
Comme expliqué ci-dessus, les savants des quatre écoles sont depuis toujours unanimes sur la classification des innovations (bida’a) en bonnes (acceptées) et en mauvaises (rejetées).
Celle qui est bonne est celle qui ne contredit pas la Shari’ah et permet de faciliter les œuvres déjà prescrites et méritoires, tandis que la mauvaise innovation est tout ce qui est nouveau et contredit le Coran et la noble Sunnah.
Parmi les innombrables savants qui ont approuvés cette division, on peut par exemple citer l'Imam ash-Shafé'î qui a divisé l'innovation en deux parties, la première étant la « bida'a mahmûda » (approuvée) et la seconde la « bida'a madhnûma » (désapprouvée).
Ainsi, il est rapporté par Abou Nou'aym que l'Imam ash-Shafé'i
a dit : « L’innovation (bida’a) se divise en deux parties : Celle qui est louable et celle qui est blâmable. Tout ce qui est conforme à la Sunna est louable et tout ce qui s'y oppose est blâmable ».
De même, l’Imam Al-Bayhaqi rapporte dans son Manaqib, sa parole : « Les innovations sont de deux types : l'un est ce qui est innové et qui rentre en conflit avec le Livre, la Sunna, un rapport d'un Compagnon [athar] ou un consensus ; cette innovation est un égarement. L'autre type est ce qui est innové à partir du bien et qui ne rentre pas en conflit avec quoi que ce soit de ce qui est précédemment cité; il s’agit alors d’une innovation qui n'a rien de blâmable ».
L'Imam an-Nawawî , le grand savant commentateur du Sahih de Muslim, classe l'innovation en cinq catégories. Il a écrit dans son ouvrage Al-Qawa'id (Al-Kubrâ) : « L'innovation est divisée en celle qui est obligatoire (wâjiba), interdite (muharrama), recommandée (mandûba), déconseillée (makrûha) ou indifférente (mubâha). La manière de décider est d'examiner l'innovation à la lumière des règles de la Loi (qawâ’id al-sharî’a). Si elle tombe dans le champ des obligations (îjab), elle est donc obligatoire, si elle tombe dans le champ des interdictions, elle est interdite (tahrîm), dans le champ des recommandations, elle devient recommandée, déconseillé si elle concerne ce qui l’est et permise si elle touche aux permissions ».
Quant à la sommité dans la science du Hadith, al-Hâfidh ibn Hajar al-'Asqalani , il a déclaré : « La signification première de l'innovation est ce qui est produit sans précédent. Ce terme est employé dans la Loi par opposition à la Sunna, ainsi elle est blâmable. De manière précise, si elle fait partie de ce qui est classé comme désirable par la Loi, alors c'est une bonne innovation (hassana), tandis que si cela fait partie des actes blâmables, alors c'est une innovation blâmable (mustaqbaha), sinon elle tombe dans la catégorie de ce qui est permis (mubah). Elle peut être classée dans les cinq catégories connues ».
De même l'Imam Ibn al-Athîr al Jazarî a dit dans son chef-d’œuvre, al-Nihâya fî Gharîb al-Hadîth wal-Athar : « L’innovation est de deux sortes : l’innovation de guidance et l’innovation d’égarement (bid’atu hudâ wa-bid’ati dalâla). Tout ce qui va à l’encontre des commandements d’Allâh et de Son Messager
se trouve dans la sphère du blâme et de la condamnation. Et tout ce qui rentre dans ce qu’Allâh et Son Messager
ont recommandé en général se place dans la sphère du mérite. Tout ce qui n’a pas de précédent comme l’extrême générosité ou l’extrême bonté sont des actes méritoires. Il n’est pas permis de dire qu’un tel comportement va à l’encontre de la Loi car le Prophète
a stipulé qu’il sera récompensé quand il a dit : « Quiconque institue une bonne coutume en Islâm (man sanna fîl-islâmi sunnatan hassana) aura une récompense ainsi que celle de tous ceux qui l’auront suivi ». De même, il a dit : « Quiconque institue une mauvaise coutume en islam (waman sanna fîl-islâmi sunnatan sayyi’atan) recevra un châtiment ainsi que celui de ceux qui l’auront pratiqué ». Il s’agit des cas où l’acte contredit ce qu’Allâh et Son Messager
ont commandé… C’est dans ce sens que le hadith « toute innovation est égarement » est compris : il signifie, tout ce qui s’oppose aux bases de la Loi et qui ne correspond pas à la Sunna ».
Voici quelques exemples d’innovations que les savants Musulmans ont acceptées comme étant bénéfiques et conformes à la Shar’iah Islamique :
1/ La prière de Tarawih en congrégation :
'Umar , a dit concernant la prière en groupe du Ramadân : « Quelle bonne innovation ! » [1]
A ce propos, l'Imam Ibn al Jawzi a dit au début de son Tablîs Iblîs : « Certaines nouveautés (muhdathât) ont été apportées qui ne s'opposent pas à la Loi Sacré, pas plus qu'elles ne la contredisent, ainsi, ils (les pieux prédécesseurs) n'ont pas vu de mal dans leur pratique, comme le fait que 'Umar ait rassemblé les gens pour les prières nocturnes de Ramadân, après quoi il les a vus et a dit : « Quelle bonne innovation ! ».
On peut également citer le fait de réciter le Coran en entier dans le mois de Ramadan durant les prières de Tarawih.
2/ L’ajout du 2ème appel à la prière le vendredi :
Dans le Sahih al-Boukhary figure un hadith authentique qui mentionne que 'Uthman , qui était Khalif, a instauré un deuxième appel à la prière pour la prière du Vendredi. C'est en effet un acte qui n'a jamais été fait par personne avant lui :
« Le premier appel à la prière du vendredi avait lieu, à l’époque du prophète , d’Abou Bakr et de 'Umar, après que l’Imam se soit installé sur la chaire. Mais à l’époque du calife 'Uthmane, du fait que les Musulmans étaient devenus très nombreux, il demanda d’ajouter un troisième appel à la prière du vendredi ». [2]
Après que Hadrat ‘Umar Farouq ait fait la prière de Tarawih, il déclara : « Quelle excellente bida’a ». L'imam Abou Hanifa a dit qu’il s’agit là d’une preuve de la part des gens de science que celui qui invente une mauvaise action dans l'Islam recevra le péché pour lui-même ainsi que celui de qui le suit, tandis que celui qui invente un bonne Bidaa dans l'Islam recevra sa récompense et celle de tous ceux qui le suivront dans cette pratique. [3]
Ceux qui disent qu’il n’y a que des mauvaises innovations se limitent-ils pour autant à un seul appel à la prière le vendredi comme c’était le cas à l’époque du Prophète ?
3/ Faire ses ablutions pour transmettre les Hadiths :
L’imâm Ja`far as-Sâdiq faisait ses ablutions pour transmettre le Hadîth, pratique qui n’a été faite par aucun compagnon.
Ainsi, il est rapporté dans Kitâb ach-Shifâ : « J’ai (ndt : Mus`ab ibn ‘Abdullâh) vu également Ja`far ibn Muhammad as-Sâdiq, qui aimait pourtant plaisanter et rire, devenir pâle lorsqu’on mentionnait le Prophète et je ne l’ai jamais vu transmettre les Hadîths de l’Envoyé d’Allâh
sans être en état de pureté ». C’est une pratique qui a été reprise par bon nombre de grands savants du Hadith.
Abû Mus`ib rapporte que Mâlik ibn Anas n’évoquait pas les Hadîths de l’Envoyé d’Allâh
sans avoir fait auparavant ses ablutions mineures (wudhû) par respect pour lui.
Dhirar Ibn Murra et Qatâda disent que la majorité des gens de cette époque détestaient évoquer le Hadîth sans avoir fait auparavant leurs ablutions. [4]
4/ La réprobation de la transmission du Hadîth en étant debout :
Certains pieux prédécesseurs n’acceptaient pas que l’on transmette le hadith debout.
Ibn Mahdî rapporte ce qui suit : « Un jour, j’ai accompagné Mâlik en marchant jusqu’au ‘Aqiq. En cours de chemin, je l’ai interrogé sur un Hadîth. Il me réprimanda et me dit : ‘Tu étais à mes yeux suffisamment éminent pour ne pas interroger sur le Hadîth de l’Envoyé d’Allâh pendant que nous marchions.’ ».
On rapporte que Hishâm ibn Hishâm al-Ghazî a interrogé Mâlik sur un Hadîth pendant qu’il était debout. On lui administra vingt coups de fouet. Puis Mâlik eut pitié de lui et lui dicta vingt Hadîths. Hishâm dit alors : « J’aurais bien voulu qu’il me donne davantage de coups de fouet et qu’il me dispense davantage de Hadîths ». [5]
5/ Débattre avec les gens de l’innovation [ahl ul-bida'a] :
L'Imam Al-Bayhaqi a dit : « Débattre avec les gens de l'innovation - lorsqu'ils rendent leur hérésie publique où qu'ils soulèvent des insinuations - pour contredire leurs propos et exposer leurs erreurs est appréciable, même si c'est une innovation, car cela consiste à les réfuter. Le Prophète
ainsi que certains Compagnons ont été interrogés à propos du Décret Divin (al-qadar) et leurs réponses nous ont été transmises. A cette époque, ils se contentaient des mots du Prophète
, ensuite des narrations rapportées à cet effet. Mais de nos jours, les innovateurs ne se contentent plus de telles réponses, pas plus qu'ils ne les acceptent. Ainsi, il est devenu nécessaire de réfuter leurs insinuations - lorsqu'elles deviennent publiques - avec ce qu'ils considèrent eux-mêmes comme des preuves ». Les Imams An-Nawawi, Ibn ‘Asâkir, Ibn al Salâh, as Subkî, Ibn ‘Âbidîn et d'autres soutiennent cet avis. [6]
6/ La ponctuation du Coran :
L'imam al-Ghazzâli a dit sur sa discussion concernant le fait d'ajouter la ponctuation au texte du Coran : « Le fait que cet acte soit innové (muhdath) n'est en rien un obstacle. Combien de pratiques innovées sont excellentes ! Comme il a été dit concernant l'établissement de la prière de Tarawih en groupe, c'était une nouvelle pratique instaurée par 'Umar
et c'était une excellente innovation (bid'a hassana). L'innovation blâmable est uniquement celle qui s'oppose à la Sunna ou qui mène à la changer ». [7]
7/ Le fait d’écrire « Salallâhou ‘alayhi wassalam » après avoir mentionné le nom du Prophète :
Ce sont bien les savants qui ont innové le fait d’écrire « Salallâhou ‘alayhi wassalam » après la mention de son nom. A l’époque du Prophète , les gens ne le faisaient pas. D'ailleurs, le Prophète
ne l’a pas fait lorsqu’il a envoyé des lettres aux rois et aux gouvernants de la terre. Il disait simplement : « De Muhammad le Messager d‘Allâh ». Les lettres que le Messager a dictées aux compagnons et qui étaient envoyées aux rois, tels que Héraclius ne comportent pas la mention « Salallâhou ‘alayhi wassalam ».
On peut lire dans le Sahih de l’Imam Al-Boukhary, une transcription d’une de ses lettres qui confirme cela :
بسم الله الرحمن الرحيم من محمد عبد الله ورسوله إلى هرقل عظيم الروم السلام على من اتبع الهدى
« Bismillâh ar-Rahman ar-Rahim min Muhammadin ‘abdillâhi wa rassoulihi ‘ila Hiraqla ‘adhimi r-roum salamoun ‘alamani t-tabba al-houda »
Ce qui signifie :
« Je commence par le nom d’Allâh le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux, de Muhammad fils de ‘Abdullâh et Son Messager, à Héraclius l’empereur des Romains, que la paix soit sur celui qui emprunte le chemin de guidée ».
L’ajout de « Salallâhou ‘alayhi wassalam » est une bonne sounnah que les savants ont innovée et que le Prophète n’a jamais faite.
8/ Le Mawlid an-Nabawi :
Une très large majorité de savants Sunnites l'ont autorisé. Ils ont encouragé les Musulmans à honorer la mémoire du Prophète Muhammad en participant à cette noble commémoration.
Parmi eux, As-Suyuti, al-‘Iraqi, al-Qastalani, as-Subki, ad-Dimasqhi, al-Haytami, ibn Hajar al-‘Asqalani, ibn al-Jawzi, ibn Taymiyya, ibn Kathir, ibn al-Qayyim al-Jawziyya, etc.
9/ La collecte de Hadith dans des livres :
Recueillir les Hadiths sous forme de livre et stipuler la chaîne ou les narrateurs et caractériser les hadiths en disant qu’il est Sahih, Hassan ou Da'if, Mu'addaal ou Mudallas, etc. et établir les avis juridiques avec l’aide de Hadiths Makruh, Mustahab, etc, toutes ces pratiques relèvent de l’innovation appréciable et n’ont jamais été pratiquées dans la période bénie de Rasoul Allâh .
Qu'il s'agisse de Bukhari, Muslim, at-Tirmidhi, Abou Dawoud, etc. aucun des livres de Hadiths Sahih que nous prenons en considération n'ont été compilés par le Prophète . Faire de tels recueils et les suivre comme étant la voie du Prophète
est une Bida’a. Cela n’a jamais été fait par les Salafs, mais recueillis plus tard par les savants du Hadith.
10/ Les Sciences Islamiques :
Les sciences Islamiques telles que nous les connaissons aujourd’hui n’existaient pas à l’époque du Prophète . Ainsi les Fondements du Hadith (Usul al-Hadith) ou de la Jurisprudence (Usul al-Fiqh) sont des innovations. Ce sont pourtant des sciences reconnues de tous les savants Musulmans et dont l'Islam ne peut aujourd'hui se passer.
11/ Les lieux d’apprentissage des Sciences Islamiques :
La construction de Madrassas et d’Universités Islamiques pour l’apprentissage de la Shari’ah est une innovation.
12/ Dans les Mosquées :
L'édification de minarets, l’utilisation de Mirhab, les mosaïques, les tapis pour prier, les hauts parleurs pour l’adhan, etc. Il s’agit encore là d’innovations.
13/ Durant le mois de Ramadan :
L'utilisation du télescope pour apercevoir la « nouvelle lune », l’annonce du début et de la fin du jeûne de Ramadan à la radio et à la télévision, l'utilisation de la sirène à l'Iftar, etc.
14/ On peut encore citer en vrac :
L’utilisation de qualificatifs pour les degrés de science, comme par exemple « Mufti », les calendriers avec les heures de prière, l'étude approfondie de la langue Arabe (essentielle pour l'apprentissage des Sciences Islamiques), les compétitions de récitation du Coran, etc..
Malgré le fait que les prédécesseurs et les savants qui leur ont succédé aient toujours fait cette distinction entre ce qui relève de la bonne et de la mauvaise innovation, certains viennent aujourd'hui remettre cela en cause. C'est une grâve erreur qu'ils commettent et il s'agit là sans aucun doute d'une innovation des plus blâmables.
Notes :
[1] Rapporté d’al-Rabî` par al-Bayhaqî dans son Madkhal et Manâqib al-Shâfe`î (1:469) avec une chaîne authentique comme le dit Ibnou Taymiyya dans son Dâr' Ta`ârud. al-`Aql wa al-Naql (p. 171) et à travers al-Bayhaqî par Ibn ‘Asâkir dans Tabyîn Kadhib al-Muftarî (Kawtharî ed. p. 97). Cité par ad-Dhahabî dans le Siyar (8:408), Ibn Rajab dans Jâmi` al-`Ulûm wal-Hikam (p. 267=Zuhaylî ed. 2:52-53=Arna'ût ed. 2:131 sahîh), et Ibn Hajar dans Fath al-Bârî (1959 ed. 13:253).
[2] Rapporté par l'Imam Ash-Shafé'î dans son Mousnad, par l'Imam Ahmed, par l'Imam Al-Boukhary, par l'Imam Abu Dawoud, ainsi que d'autres Imams.
[3] Imam Ibn Hajar Al-‘Asqalani dans Zubda tul-Fakr
[4] et [5] Al- Qadi ‘Iyad dans Kitâb ash-Shifâ
[6] Al-Bayhaqî, Manâqib al-Shâféi`î (1:469)
[7] Al-Ghazzâlî, Ihyâ' `Ulûm al-Dîn (1:276)
http://www.sunnisme.com/article-existe-t-il-de-bonnes-innovations-en-islam-69344760.html
La société humaine est progressive de nature. Il en est de même de la religion de Dieu et de sa révélation. La révélation progressive de Dieu a été de tout temps et restera à jamais la source de direction la plus efficace pour la société.
Dieu le Tout-Puissant déclare dans le Coran, le livre de sa Loi irrévocable, que lorsqu'une ummah (nation) renie et rejette un messager de Dieu et se complait dans le péché, la cruauté et l'injustice, une nouvelle ummah est élevée pour la remplacer. D'aucun peuvent s'interroger sur la façon dont ce remplacement a eu lieu dans le passé. Comment une ummah a-t-elle pu être anéantie ? Il semblerait qu'il n'y ait jamais eu d'anéantissement total d'un peuple de la surface de la planète. Ces peuples ont plutôt été livrés aux affres de la désunion, de la passivité et de la complaisance, qui se sont infiltrées pernicieusement et progressivement dans leurs rangs.
Le Coran relate plusieurs cas de peuples rebelles ayant subi un châtiment divin. Certains de ces peuples ont connu la désunion, la multiplication des sectes en leur sein, les guerres et les batailles, l'ignorance, la méfiance, l'incompréhension entre leurs membres, la peur les uns des autres, le rejet des messagers de Dieu, l'orgueil et la cruauté, la luxure et l'avidité, le meurtre, le pillage, le matérialisme, les préjugés, la vindicte, la superstition, l'hypocrisie et l'imitation aveugle(...)
Le Coran répond très clairement à des questions telles que : pourquoi les nations du passé ont-elles été maudites par Dieu ? Comment le châtiment de Dieu leur a-t-il été infligé ? Quel a alors été leur destin ?
Le Coran déclare que le châtiment divin est infligé à une ummah lorsque :
1 - Au lieu d'établir un ordre économique juste, elle se complait dans le luxe, le laxisme et l'immoralité ;
"... Et Nous fîmes périr les outranciers."
(Coran, 21:9)
2 - Elle rejette une manifestation de Dieu et se détourne de cette bonté divine ;
"Quant à ceux qui n'ont pas cru, Je les châtierai d'un dur châtiment..."
(Coran, 3:56)
3 - Elle se complait dans l'hypocrisie ;
"... afin qu'Allah récompense les véridiques pour leur sincérité, et châtie, s'Il veut, les hypocrites..."
(Coran, 33:24)
4 - Elle se détourne de l'Appel divin ;
"... Quiconque cependant se détourne, Il [Allah] le châtiera d'un douloureux châtiment."
(Coran, 48:17)
5 - Elle exprime de l'orgueil et de l'arrogance ;
"Et quant à ceux qui ont eu la morgue et se sont enflés d'orgueil, Il les châtiera d'un châtiment douloureux."
(Coran, 4:173)
6 - Elle transgresse les limites ;
"... quiconque après cela transgresse, aura un châtiment douloureux."
(Coran, 2:178)
7 - Son peuple devient malfaisant ;
"Que de cités, donc, avons-Nous fait périr, parce qu'elles commettaient des tyrannies. Elles sont réduites à des toits écroulés..."
(Coran, 22:45)
"Et voilà les villes que Nous avons fait périr quand leurs peuples commirent des injustices..."
(Coran, 18:59)
8 - Elle se complait dans le vice et les pêchés ;
"N'ont-ils pas vu combien de générations, avant eux, Nous avons détruites ...? ... Nous les avons détruites, pour leurs péchés, ..."
(Coran, 6:6)
9 - Elle rejette la nouvelle Manifestation de Dieu ;
"Ils le [Hùd] traitèrent donc de menteur. Et Nous les fîmes périr. Voilà bien là un signe! Cependant, la plupart d'entre eux ne croient pas."
(Coran, 26:139)
10 - Elle commet des crimes de façon régulière ;
"... et ceux qui les ont précédés? Nous les avons fait périr parce que vraiment ils étaient criminels."
(Coran, 44:37)
11 - Elle génère des sectes et des différents ;
"Et ne soyez pas comme ceux qui se sont divisés et se sont mis à disputer, après que les preuves leur furent venues, et ceux-là auront un énorme châtiment."
(Coran, 3:105)
12 - Elle perd espoir en la miséricorde de Dieu ;
"Et ceux qui ne croient pas aux versets d'Allah et à sa rencontre, désespèrent de ma miséricorde. Et ceux-là auront un châtiment douloureux."
(Coran, 29:23)
13 - Elle commet des actes de terrorisme et de violence ;
"... il n'y a de voie [de recours] que contre (le châtiment ne s'adresse qu'à ) ceux qui lèsent les gens et commettent des abus, contrairement au droit, sur la terre: ceux-là auront un châtiment douloureux."
(Coran, 42:42)
A la lumière des versets cités ci-dessus, il est facile de décider si oui ou non les signes mentionnés sont présents dans la société musulmane d'aujourd'hui. Ils le sont sans aucun doute. Comment se pourrait-il donc que cette société ne soit pas soumise à la même honte et aux mêmes châtiments que ceux infligés avant eux aux nations qui leur ressemblaient ? En toute objectivité, ils sont embourbés de la tête aux pieds dans les châtiments mentionnés ci-dessus. Mais ils ont perdu le sens critique et pensent que tout va pour le mieux, qu'ils sont protégés de toute atrocité, bien-aimés de Dieu, et qu'il en sera toujours ainsi :
"Les Juifs et les Chrétiens ont dit: "Nous sommes les fils d'Allah et ses préférés." Dis: "Pourquoi donc vous châtie-t-Il pour vos péchés?""
(Coran, 5:18)
Dans les temps passés, Dieu a perdu et annihilé beaucoup de nations. Les gens imaginent qu'un éclair soudain les a touchés et que tous les habitants de cette nation ont alors disparu. Ceci n'est pas exact. Le terme 'annihilation' signifie que la nation connaît une mort spirituelle et une faillite morale certaines. A ce moment-là, une nation meilleure que la première - en terme de connaissances et d'actes- est édifiée. Le Coran appelle cela le 'Istikhláf, (la Loi de succession des prophètes). Selon le Coran, cette succession a commencé à l'avènement de Adam et s'est toujours poursuivie depuis. Aucune nation ne fait exception à ce processus. Si un musulman se croit exempt de cette loi, il rejette en fait le saint Coran :
"Ou bien est-ce que vous avez obtenu de Nous des serments valables jusqu'au Jour de la Résurrection, Nous engageant à vous donner ce que vous décidez?"
(Coran, 68:39)
Un synonyme de 'Istikhláf, est 'Al-Qíyámah' (résurrection). Lorsqu'une nation atteint sa mort spirituelle et devient la cible du châtiment divin, Dieu répand sa miséricorde sur certains individus de cette nation et d'autres nations. Ils sont amenés à croire en sa nouvelle manifestation ; à l'accepter et deviennent en conséquence meilleurs et pieux. C'est ainsi qu'une nouvelle création voit le jour et qu'une nouvelle nation est édifiée. Donc, en même temps qu'une nation arrive à sa fin, une nouvelle nation commence à prendre forme. Les versets suivants du saint Coran expliquent ce processus très clairement :
"...Puis Nous les avons détruites, pour leurs péchés; et Nous avons créé, après eux, une nouvelle génération (pour leur succéder)."
(Coran, 6:6)
"Nous avons en effet, donné le Livre à Moïse, - après avoir fait périr les anciennes générations ..."
(Coran, 28:43)
Et quel avertissement clair est donné aux musulmans concernant le fait que Dieu édifiera une nouvelle nation à leur place dès que tel en sera son bon plaisir :
"Ton Seigneur est le Suffisant à soi-même, le Détenteur de la miséricorde. S'Il voulait, Il vous ferait périr et mettrait à votre place qui Il veut, de même qu'Il vous a créés [élevés, fait naître, anshaakum] d'une descendance d'un autre peuple."
(Coran, 6:133)
Les Musulmans interprètent normalement cette 'création/naissance' comme étant le réveil du corps des morts de leurs tombes au jour de la résurrection. Toutefois cette interprétation contredit le verset suivant du Coran :
"Salih qui dit: "ô mon peuple, adorez Allah. Vous n'avez point de divinité en dehors de lui. De la terre Il vous a créés [élevés, fait naître, anshaakum], et Il vous l'a fait peupler (et exploiter)."
(Coran, 11:61)
Il est clair que la création du peuple de 'Thamúd' n'est pas d'ordre matériel. Dans un autre verset du Coran, nous trouvons la mention suivante :
"C'est Lui qui vous connaît le mieux quand Il vous produit [élève, fait naître, anshaakum] de terre, et aussi quand vous étiez des embryons dans les ventres de vos mères."
(Coran, 53:32)
Ici encore, 'élevés de la terre', ou 'produits' signifient une nouvelle naissance au sein d'une dispensation et après la venue d'une nouvelle manifestation de Dieu. La terre devient fertile et verte à l'arrivée du printemps, de même en est-il du coeur et de l'esprit des hommes au jour de l'avènement d'une manifestation de Dieu. La terre du coeur et de l'esprit des hommes devient fertile et joyeuse. Ainsi, le Coran fait-il cette comparaison lorsqu'il déclare que Dieu a créé les hommes et les a fait croître à partir de la terre :
"Et c'est Allah qui, de la terre, vous a fait croître [anbatakum] comme des plantes ..."
(Coran, 71:17)
Au sens strict, Dieu n'a jamais élevé ni produit quiconque de la terre au sens matériel. Ainsi le sens de 'créer/élever/naître' (Khurúj) est le sens spirituel mentionné ci-dessus. Chaque ummah a connu sa résurrection spirituelle qui a eu lieu par l'avènement d'une nouvelle manifestation de Dieu. Les musulmans ont également vécu une telle résurrection et en sont conscients:
"Vous avez connu la première création [ennash'atu'l-oulá]. Ne vous rappelez-vous donc pas?"
(Coran, 56:62)
Si cela voulait dire, telle que le prétendent les interprètes du Coran, 'création/naissance' à partir de la terre comme des plantes, Dieu n'aurait pas dit 'ne vous rappelez-vous donc pas ?'.
Il y a deux types de situations dans lesquelles le châtiment divin a frappé une nation dans le passé. La première lorsque la nation commet des erreurs et des péchés mineurs, et s'en repent auprès de Dieu dès qu'elle en prend conscience. Dieu le Miséricordieux pardonne de telles errances :
"Et certes, Nous sauvâmes les enfants d'Israël du châtiment avilissant."
(Coran, 44:30)
"Et Allah n'est point tel qu'il les châtie alors qu'ils demandent pardon."
(Coran, 8:33)
La deuxième situation lorsque la nation toute entière, collectivement, se complait dans des atrocités et des crimes qui appellent la colère de Dieu. Ainsi, un grave péché est, pour un peuple de se moquer de la nouvelle manifestation de Dieu, de rejeter sa proclamation, de la tourmenter et de la déclarer faux messager. Ceci est un péché impardonnable. Lorsqu'une nation commet un tel péché, Dieu lui enlève sa suprématie sur les autres peuples et offre ce privilège à une autre nation. Le plus grand châtiment que Dieu puisse infliger à une nation est de la priver de sa suprématie et de lui faire perdre sa foi en Dieu.
Lorsque l'humanité oublie son créateur et la raison d'être de son existence en ce monde et lorsqu'elle se complait dans le matérialisme, Dieu lui envoie, du fait de sa grande miséricorde, une manifestation afin de la réveiller et de lui offrir la possibilité de revenir à Dieu. Les gens qui acceptent la Manifestation de Dieu et rectifient leur comportement reçoivent le salut, ceux qui la rejettent et persistent dans leurs croyances personnelles sombrent dans les difficultés et sont punis sévèrement. Ceci n'est que justice divine éclatante. S'ils étaient punis sans préavis donné par une manifestation de Dieu, ils diraient que si Dieu les avait prévenus, ils auraient rectifié leur comportement :
"Et si Nous les avions fait périr par un châtiment avant lui (l'avertissement, le Messager), ils auraient certainement dit: "O notre Seigneur, pourquoi ne nous as-Tu pas envoyé de Messager? Nous aurions alors suivi Tes enseignements avant d'avoir été humiliés et jetés dans l'ignominie"."
(Coran, 20:134)
Ainsi, Dieu, le Seigneur de tous les mondes, a choisi de ne pas envoyer de châtiments sans envoyer au préalable une manifestation de Dieu :
"Et Nous n'avons jamais puni [un peuple] avant de [lui] avoir envoyé un messager."
(Coran, 17:15)
Le châtiment divin est donc conditionné par l'avènement d'une manifestation de Dieu. Ainsi, lorsque les gens ont demandé au prophète Muhammad, quand le châtiment divin allait-t-il tomber, c'est-à-dire, quand une nouvelle manifestation de Dieu allait-t-elle apparaître, Dieu a répondu que cela aurait lieu dans un jour qui, selon le calendrier islamique, est égal à mille ans :
"Et ils te demandent de hâter [l'arrivée] du châtiment. Jamais Allah ne manquera à sa promesse. Cependant, un jour auprès de ton Seigneur, équivaut à mille ans de ce que vous comptez."
(Coran, 22:47)
L'Histoire est témoin du fai, au cours de la deuxième moitié du dix-neuvième siècle et durant le vingtième siècle, les nations de la terre ont été affligées par le châtiment divin, les unes après les autres. Elles ont également vécu la dévastation engendrée par deux guerres mondiales. Pourtant, les nations de la terre restent embourbées dans la haine, la désunion, la guerre, le terrorisme, l'anarchie, la conspiration, la famine, la pauvreté, les privations, l'ignorance, l'analphabétisme, le désordre, la prostitution en tous genres, la luxure, le laxisme, le matérialisme, la recherche du pouvoir et encore bien d'autres signes du châtiment et de la colère divins.
http://www.bahai-biblio.org/centre-doc/ouvrage/preuves-coran/preuves-coran03.htm
Étymologiquement, "Imamat" en arabe désigne le fait que quelqu'un se met en avant pour que les gens le suivent et font ce qu'il fait ou l'imitent. L'imam est donc "l'imité" (moqtadâ) et ceux qui l'imitent s’appellent "moqtadî" ou "ma'moum".
l'Imamat, est comme la Prophétie, une Grâce (lutf) d'Allah. Par conséquent, il y a nécessairement, à toute époque, un Imam guidant qui succède au Prophète dans les fonctions de guider et d'orienter les gens vers la bonne Voie et la prospérité dans les deux mondes.
C'est pourquoi l'Imamat est la continuation de la Prophétie, et la preuve de la nécessité de l'envoi de Messagers et de Prophètes est la même pour succéder au Prophète.
Pour cette raison nous disons que l'Imam ne peut être désigné que par une Décret d'Allah communiqué par le Prophète . L'Imamat ne peut pas être le résultat d'une élection ou d'un choix fait par les gens.Alors que le Califat lui oui il peut etre choisis par éléction( l'Imamat et le Califat étant complémentaire)
Par conséquent, il n'est pas possible qu'une époque de l'histoire soit sans un Imam à qui les gens ont l'obligationt d'obéir et ce, peu importe qu'ils l'acceptent ou le refusent, qu'ils le soutiennent ou non, qu'ils lui obéissent ou non, qu'il soit physiquement présent ou en occulation, car de même qu'il est admis que le Saint Prophète Mohammad était demeuré hors de la vue des gens dans la grotte de Thawr ou dans le Chi`b (le passage montagneux) d'Abî Tâlib, de même il est admissible que l'Imam disparaisse de la vue des gens peu importe, rationnellement, que son occulation soit longue ou brève.
Nous croyons que l'Imamat est l'un des Principes fondamentaux de l'Islam et que le Musulman ne saurait compléter sa Foi sans croire en ce Principe. A ce sujet, il n'est pas permis qu'un Musulman se contente de suivre ses ancêtres, ses proches parents ou ses éducateurs, même s'ils jouissent d'une haute position de notoriété et d'honorabilité, car il est obligatoire pour le Musulman d'établir sa croyance en l'Imamat par des arguments et le raisonnement, exactement comme il le fait pour le Monothéisme et la Prophétie.
La philosophie de l’Imâmat selon les croyances chiites
"Si vous comptiez les bienfaits de Dieu, vous ne sauriez les dénombrer" (Coran ; 16:18)
Si le chiisme a fait l’objet d’attaques en tout genre au cours de son histoire, l’assaut le plus virulent qui lui fut adressé se situe sans doute au niveau du dogme : le rang qu’il accorde aux Imâms porterait atteinte à l’unicité et la seigneurie divines, tandis que le concept de wilâyat remettrait en cause le principe même de la fin de la prophétie scellée par Mohammad. Au sein des différentes écoles de l’islam, la critique est souvent formulée en ces termes : si Dieu a envoyé un prophète et révélé un livre qui se présente comme étant un "éclaircissement de toute chose" (16:89), pourquoi aurait-on besoin d’un Imâm ?
Au cours de cet article, nous allons évoquer plusieurs raisons qui, selon les chiites, justifient la nécessité de l’existence d’un légataire (wasî) et d’un successeur à la suite d’une révélation prophétique. Nous devons à ce titre rappeler qu’en tant que l’un des cinq principes fondamentaux du chiisme, l’Imâmat [1] n’est en premier lieu pas une affaire de foi mais d’intellect : le croyant doit d’abord accepter rationnellement la nécessité de l’existence d’un Imâm succédant à la prophétie avant de suivre une personne particulière revendiquant le titre d’Imâm. Cette dimension rationnelle à la source de l’existence de l’Imâmat a été évoquée dans l’article intitulé "Qu’est-ce que le chiisme ?" publié dans ce même numéro. Suivant une logique de complémentarité, le présent article vise à expliciter davantage les raisons justifiant l’existence des Imâms en nous basant notamment sur différents aspects de leur vie à la lumière du contexte historique de chaque époque.
Cette présentation permettra également de souligner l’ampleur du rôle dévolu à l’Imâm, couvrant des domaines aussi variés que l’exégèse, la cosmologie, la métaphysique mais aussi le droit, la politique, etc. ; cette diversité ne faisant que refléter les différentes dimensions de l’existence de l’Imâm, à la fois terrestre et extérieure (zâheri), mais aussi spirituelle et suprasensible (bâteni). Il faut enfin rappeler que selon un point de vue chiite, les Imâms sont des hommes parfaits et préservés de toute erreur, la plus haute manifestation des noms de Dieu sur terre. Toute pensée ou écrit à leur propos est donc condamné à ne saisir qu’un aspect limité de leur personnalité.
Après la mort d’un Prophète, l’une des premières missions de l’Imâm est de ne pas laisser dépérir l’élan spirituel de la jeune communauté musulmane, et de rappeler aux croyants l’esprit et les fondamentaux de la religion. Le but d’une religion est d’inviter l’homme à croire en l’invisible et à orienter l’ensemble de ses actes en vue d’un Au-delà imperceptible par les sens, élan qui demande à être accompagné, entretenu, pour ne pas retomber, et qui ne peut s’enraciner à l’échelle d’une société en seulement quelques décennies. D’un point de vue historique, avec l’arrivée de nouvelles générations n’ayant pas connu le Prophète, le message divin a connu de sérieuses déformations face aux nouveaux enjeux de pouvoir et à l’attrait des biens de ce monde, pour parfois n’être réduit qu’à une écorce vide. L’un des rôles fondamentaux de l’Imâm est donc de garder cet appel originel vivant, de l’enraciner dans l’esprit des gens, et de le préserver d’éventuelles déviations. Comme nous allons le voir, la mission des premiers Imâms ne fut pas seulement d’expliciter les principes fondamentaux de la religion tels que l’unicité de Dieu, l’existence d’un Au-delà… mais d’abord de les rappeler. [2] De nombreuses paroles de l’Imâm Sajjâd consacrées au simple rappel des principes de base de la religion tels que la résurrection et l’existence d’un Au-delà, laissent entendre à quel point les croyances étaient affaiblies moins de soixante ans après la mort du prophète Mohammad. A l’époque de l’Imâm Bâqer, les affaires religieuses demeuraient fortement négligées. Ibn ’Abbâs rapporte à ce propos qu’à la tribune de Basra, lors du sermon de la fin du mois de Ramadan, on rappela aux gens de donner l’aumône de leur jeûne (zakât al-fitra) [3], ces derniers ignorant ce principe essentiel scellant la fin de ce mois sacré. A la même époque, on rapporte que la majorité des croyants avait oublié les rites du pèlerinage à La Mecque , tandis que certains habitants de Shâm ignoraient le nombre de prières obligatoires.
Nous pouvons ici mieux cerner le rôle des Imâms comme "gens du rappel" et comprendre que sans eux, il ne serait sans doute pas resté grand-chose non seulement de l’esprit de l’islam, mais aussi des pratiques rituelles les plus élémentaires. Cette réalité a été confirmée par l’Imâm Bâqer, qui, à propos du verset suivant, "Nous n’avons envoyé avant toi que des hommes à qui Nous faisions des révélations. Interrogez les gens du Rappel, si vous ne savez pas." (21:7), souligne : "Nous sommes les gens du Rappel" , ou dit à propos de ce verset : "La permanence de Dieu est meilleure pour vous si vous êtres croyants" (11:86) : "Je suis la permanence de Dieu."
Outre le rappel du Coran, les Imâms ont également permis de revivifier différentes traditions du Prophète ayant été oubliées ou sciemment effacées par certains califes. Les Imâms Bâqer et Sâdeq ont aussi formé de très nombreux savants dans le domaine des sciences islamiques, permettant un enracinement et une diffusion sans précédent de la lettre et de l’esprit de la révélation. Ils eurent également un rôle essentiel dans l’explicitation des fondements du droit (usûl al-fiqh), lançant ainsi un vaste mouvement de recherche sur le plan juridique (ijtihâd) en donnant une assise solide au droit et en invitant ensuite les savants religieux à déduire par eux-mêmes des règlements de ces principes généraux.
La nécessité de l’existence d’un Imâm repose également sur une conception particulière de la révélation comme véhicule d’un message qui, loin de se limiter à sa seule signification apparente, comporte de multiples niveaux d’interprétation eux-mêmes fondés sur l’existence de sens ésotériques (butûn) allant jusqu’à soixante-dix ou plus, selon certains hadiths. D’un point de vue strictement rationnel, comment pourrait-on prétendre comprendre la parole de Dieu en quelques lectures et avec un intellect limité ? Comme le souligne Christian Bonaud en reprenant les propos de Mollâ Sadrâ, "la plupart des intellectuels sont déjà incapables de lire les livres d’Aristote et de Platon et de comprendre les propos de philosophes tels qu’Avicenne ou Farabi : comment pourraient-ils alors avoir la science du Coran, alors que c’est un Livre rempli de symboles, de significations ésotériques et de versets ambigus apparemment contradictoires et qui exigent d’être interprétés ?" Le contenu du Coran demande donc à être interprété et son esprit profond dégagé par des êtres qui non seulement le connaissent parfaitement, mais dont l’existence est la manifestation même de ces significations.
Selon le chiisme, les Imâms sont les acteurs de cette interprétation, d’où leur qualificatif de "Coran parlant" (qor’ân nâteq). Après la période de la Révélation (tanzil), les Imâms sont désormais ceux qui assurent le ta’wîl , c’est-à-dire la reconduction du sens apparent du Coran aux sens originels et ésotériques. La présence de l’Imâm permet donc de faire une lecture à la fois juste et profonde du Coran, et de ne pas tomber dans le piège de certaines interprétations littérales pouvant aboutir à de l’anthropomorphisme (tashbih). Il préserve la vérité spirituelle de la religion sans laquelle cette dernière ne devient qu’une écorce vide se limitant à des rites extérieurs. La présence de l’Imâm comme "herméneute du Livre" permet ainsi de concilier l’aspect littéral et apparent (zâher) avec l’aspect profond et ésotérique (bâten) de la religion sans sacrifier aucune de ces dimensions et en gardant un équilibre permanent entre les deux.
L’un des aspects important de cette mission est d’expliquer le sens profond de certaines obligations religieuses et légales. Concernant l’aumône légale (zakât), l’Imâm ’Ali souligne que loin de se limiter à un don matériel, la zakât embrasse en réalité l’ensemble des aspects de la vie humaine : la zakât de la puissance est l’équité , la zakât de la beauté est la chasteté, celle de la santé est l’effort dans l’obéissance à Dieu tandis que la zakât du corps est le jeûne . L’Imâm Sâdeq rappelle également que la zakât savoir est de l’enseigner à ceux qui s’y consacrent. Les Imâms expliquent aussi les effets invisibles de certains piliers de la foi, tels que la prière : "Si à proximité de l’un de vous se trouvait un fleuve qui lui permettrait de s’y laver cinq fois par jour, resterait-il des souillures sur son corps ? En vérité, la prière est comme le fleuve qui purifie. Ainsi, à chaque fois que quelqu’un s’acquitte d’une prière, elle purifie des péchés, sauf le péché qui l’a éloigné de la foi et qu’il continue de perpétrer." ; "Si celui qui prie savait ce qui l’enveloppe de la majesté de Dieu, il ne souhaiterait pas relever sa tête de la prosternation", ou le jeûne : "Le sommeil de celui qui jeûne est une adoration, son silence est une louange, son acte est agréé et son invocation est exaucée." L’Imâm Sâdeq vient rappeler, selon le même principe que l’aumône, qu’il ne faut pas limiter le jeûne au simple fait de s’abstenir de nourriture : "Si tu jeûnes, fais en sorte que ton ouïe, tes cheveux et ta peau jeûnent." Il énuméra d’autres parties du corps puis dit : "Le jour de ton jeûne ne doit pas ressembler au jour où tu ne jeûnes pas." Les Imâms viennent également éclaircir certaines raisons de son obligation : "C’est pour que le riche ressente la douleur de la faim et soit ainsi généreux envers le pauvre."
Sous le règne des califes omeyyades puis abbassides, les Imâms eurent un rôle de premier plan pour préserver l’islam de multiples interprétations déviationnistes, alors que de vastes politiques de corruption étaient mises en place afin de favoriser l’apparition de diverses sectes destinées à semer la confusion dans les esprits ou à servir d’arme idéologique du régime. La majorité des califes s’efforçait de gagner la sympathie des personnalités religieuses importantes en leur offrant argent, biens… pour ensuite leur demander de forger des hadiths ou de décréter des fatwas en vue de justifier leur politique du moment. Dans ce contexte, les Imâms se virent conférer un rôle central dans la réfutation de ces différentes écoles au moyen de débats et controverses avec leurs savants , tout en mettant en garde des dangers issus de tout raisonnement personnel basé sur l’analogie.
Ces déviations concernaient les domaines juridique, exégétique, théologique… A titre d’exemple, le courant jabbarite, largement appuyé par les Omeyyades, prônait l’existence d’un déterminisme divin absolu – idée fondamentalement en désaccord avec la liberté de l’homme défendue par les chiites -, idéologie qui justifiait une soumission aveugle à tout pouvoir quel qu’il soit et décourageait toute idée de rébellion car sur cette base, le fait qu’un dirigeant injuste tienne les rênes du pouvoir n’est que le reflet d’une volonté divine implacable à laquelle il est inutile de s’opposer. Nous pouvons également citer la secte des Murji’ites apparue à l’époque de l’Imâm Sâdeq qui soutenait qu’il était impossible d’émettre le moindre jugement en ce monde et de savoir si telle personne irait au Paradis ou en Enfer. Cette logique, entraînant une absence totale de jugement à propos des pires agissements, permettait de justifier la débauche du pouvoir.
Les Imâms ont aussi mené une vaste entreprise de réfutation des faux hadiths, tout en donnant des critères généraux permettant à chaque croyant de distinguer lui-même le vrai du faux. S’ils sont un rappel, les Imâms ont également été comparés à l’arche de Noé ou à une ancre permettant de ne pas perdre totalement le cap dans la tempête. Dans ce sens, en commentant ce verset "Ainsi que des points de repères. Et au moyen des étoiles, [les gens] se guident." (16:16), l’Imâm Rezâ a dit : "Nous sommes ces points de repères, et l’étoile, c’est le Messager de Dieu."
Une autre raison justifiant la présence des Imâms est de permettre au croyant d’apprendre à vivre sa religion dans différents contextes historiques, et de distinguer ce qui est inchangeable quel que soit le contexte de ce qui peut être sujet à adaptation. Ce rôle permet à la fois de ne pas sacraliser certaines pratiques qui ne le sont pas, et de ne pas réduire à un contexte historique, et donc mettre de côté, ce qui a une portée permanente. De par leur façon de vivre l’islam dans des conditions différentes – la liberté et l’oppression, l’opulence et la pauvreté, etc. -, les Imâms invitent à séparer l’essence de l’écorce, et à saisir l’esprit profond de certaines règles susceptibles d’être appliquées de différentes manières selon l’époque.
A titre d’exemple, on reprocha un jour à l’Imâm Sâdeq de porter de beaux vêtements, alors que l’Imâm ’Ali portait en son temps des vêtements rudes et élimés. Il répondit : "’Alî, fils d’Abî Tâleb s’habillait ainsi à une époque où on ne protestait pas et s’il s’habillait ainsi aujourd’hui, il se ferait dénigrer. Le meilleur des vêtements de chaque époque est le vêtement des gens de l’époque." L’Imâm Sâdeq réfute ici l’idée d’une sacralité des vêtements humbles en soulignant que les croyants se doivent de vivre dans les mêmes conditions matérielles que la majorité des gens : son habillement peut donc évoluer lorsqu’une époque est plus prospère.
Cette même logique peut s’appliquer à propos de certains principes évoqués par le Coran, tels que le nécessité de se prémunir contre toute attaque éventuelle d’un ennemi : "Et préparez contre eux tout ce que vous pouvez comme force et comme cavalerie équipée, afin d’effrayer l’ennemi de Dieu et le vôtre" (8:60) Ce verset pose le principe général de la dissuasion préventive destiné à éviter tout combat, et précise concrètement que cela passe par l’acquisition de chevaux. Selon la logique évoquée précédemment, nous comprenons que ce principe général, c’est-à-dire apparaître fort face à un ennemi pour le dissuader de toute attaque, est inaltérable. Néanmoins, sa mise en œuvre est susceptible d’évoluer selon les époques : les chevaux sont remplacés par des armes plus sophistiquées, etc.
En tant que Coran parlant, l’Imâm a ici un rôle essentiel pour dégager l’esprit d’un principe et permettre l’évolution harmonieuse de la religion au cours de l’histoire, en la préservant à la fois d’une fossilisation et d’ "adaptations" susceptibles de remettre en cause sa vérité profonde.
Le Coran évoque clairement que l’un des buts de la prophétie est d’instaurer une société juste et équitable : "Nous avons envoyé Nos messagers avec des preuves évidentes, et nous avons fait descendre avec eux le Livre et la Balance afin que les hommes observent l’équité" (57:25). L’Imâmat n’étant que le prolongement de la prophétie, la mission des Imâms consiste aussi à réformer les gens ainsi qu’à préparer le terrain à l’instauration de la meilleure organisation possible de la société ; organisation devant offrir le meilleur cadre possible à l’épanouissement des potentialités spirituelles de chacun.
Le refus de l’Imâm Hossein de se soumettre à un pouvoir injuste a également enraciné un esprit révolutionnaire tout en insistant, contre les écoles déterministes qui fleuriront par la suite, que l’homme est maître de son destin : il lui appartient donc de se dresser contre l’oppression et d’édifier la société dans laquelle il souhaite vivre.
A chaque époque, les Imâms se sont efforcés chacun à leur manière d’opérer un redressement moral de la société face au développement de la débauche des dynasties omeyyade et abbasside en insistant sur l’importance du bon comportement, de la générosité, en rappelant les interdits… tout en menant eux-mêmes une vie basée sur la piété, le respect de l’autre, l’aide aux pauvres, et la bonté en toutes circonstances. Leur mode de vie est donc lui-même un rappel de l’ensemble de ces principes et de ce que doit être la vie d’un croyant. Par conséquent, outre le fait de donner une vision juste de l’islam sur le plan théorique, la mission des Imâms a également une dimension éminemment pratique, en rappelant le sens profond de chaque acte qui doit être orienté vers Dieu. Un grand nombre de hadiths nous sont rapportés à ce sujet. A titre d’exemple, lorsqu’un mendiant arrivait, l’Imâm Sajjâd s’exclamait : "Bienvenue à celui qui porte mes provisions pour l’Au-delà." , tout en invitant les gens à ne pas commettre d’injustice sur terre et à être satisfaits de ce qu’ils détiennent : "Celui à qui suffit ce que Dieu lui a imparti est le plus riche des hommes." ; "Ne craignez pas l’injustice de votre Seigneur, craignez surtout votre propre injustice envers vous-même." Dans cette optique, les Imâms invitaient également à se détacher de ce monde : "Considère le monde d’ici-bas comme une maison où tu as habité et de laquelle tu as déménagé, où comme de l’argent que tu as possédé dans un rêve et que tu as perdu à ton réveil. En vérité, je te donne ces exemples car chez les gens de savoir et de connaissance en Dieu, le monde d’ici-bas est comme l’ombre."
Si les Imâms sont une "lumière unique" ayant une même mission, les particularités existentielles de chacun d’entre eux alliées au changement des circonstances historiques ont permis la manifestation d’un aspect plus particulier de l’Imâmat et, partant, de la religion. Le califat de l’Imâm ’Ali a permis de mettre en relief la dimension politique de l’Imâmat fondé sur l’instauration de la justice, l’Imâmat de l’Imâm Hassan la patience face aux vicissitudes du temps, tandis que le martyre de l’Imâm Hossein a révélé la dimension révolutionnaire de l’Imâmat et son refus de toute compromission avec un pouvoir corrompu. La vie et les invocations de l’Imâm Sajjâd mettent quant à elles davantage en relief la dimension spirituelle de l’Imâmat, tandis qu’avec les Imâms Bâqer et Sâdeq, sa dimension intellectuelle, juridique et organisationnelle est affirmée. Ces différents aspects révèlent que certaines choses, comme par exemple l’opposition ouverte contre un pouvoir tyrannique, peut, selon les circonstances, être obligatoire, permise ou interdite. Le comportement de l’Imâm de chaque époque donne au croyant des clés lui permettant de saisir ces subtilités dans des contextes différents et d’agir au mieux selon les circonstances de sa propre époque.
Selon le chiisme, le but visé par l’islam est actualisé dans ce monde même au travers d’une personne : celle de l’Imâm, qui est l’Argument de Dieu auprès de Ses créatures en ce qu’il leur montre ce à quoi doit mener l’ensemble des prescriptions de la religion. En outre, le principe de la justice divine exige que la terre ne soit jamais dépourvue d’un intermédiaire entre Dieu et les hommes qui les guide et par lequel l’erreur puisse être distinguée du vrai. La prière de la lamentation (do’a-ye nodbeh) de l’Imâm Sâdeq résume parfaitement cette dimension de l’Imâmat : "A chacun [des prophètes] Tu [Dieu] donnas une Loi et traças une voie, et Tu choisis pour lui des Successeurs nommés, dépositaires vigilants succédant l’un à l’autre, époque après époque, pour maintenir Ta religion et servir d’Arguments envers Tes serviteurs, afin que la vérité ne cesse d’être établie, que sur ceux qui la suivent l’erreur n’ait point d’emprise et que nul n’aille dire : "Que n’as-Tu envoyé vers nous un messager venant [nous] avertir et établi pour nous un signe qui [nous] guide, de sorte que nous aurions suivi Tes [versets et Tes] signes avant que de connaître l’opprobre et l’infamie !"(Coran, 20:134)"
L’Imâm est un véritable lien entre le spirituel et le terrestre, "Lieu-tenant" (khalifa) de Dieu en ce monde et manifestation des perfections divines à l’homme : "Le regard qui est simultanément Dieu regardant l’homme et l’homme regardant Dieu, c’est cela l’Imâm, comme pôle mystique, comme Face de Dieu vers l’homme et Face de l’homme vers Dieu. C’est la raison pour laquelle nos ésotéristes répètent que sans ce pôle mystique, l’humanité ne pourrait persévérer dans l’être. L’idée shî’ite révèle ici à la fois sa profondeur métaphysique et sa fructification immédiate en expérience spirituelle." [
Ainsi, outre son tutorat juridique et sur le plan des croyances (wilâyat tashri’i), la présence des Imâms sur terre a également une dimension ontologique appelée wilâyat takwini. Cette dimension permet la permanence même du monde et de ses habitants, car sans un Argument divin manifestant le but de la création et par lequel l’homme établit un lien avec son Créateur, ce monde n’aurait plus lieu d’être : "Si la terre se vidait de l’Argument, elle disparaîtrait avec tous ses habitants." Pour reprendre les mots de Henry Corbin, "la Terre ne peut jamais être privée d’un Imâm, fût-il caché et invisible, parce qu’elle serait alors sans communication avec le Ciel ; l’Imâm est le pôle mystique ; s’il cessait d’exister, l’humanité se saurait persévérer dans l’être."
Cette dimension s’enracine dans la double réalité de l’Imâm à la fois comme personnage historique et réalité métaphysique : selon cette seconde dimension, les Imâms sont considérés comme étant les manifestations (mazhar) d’une théophanie primordiale divine créée de toute éternité – celle des Quatorze immaculés incluant le Prophète Mohammad, sa fille Fâtima, et les Douze Imâms – qui fut et constitue le support des Noms et Attributs divins. Leur réalité profonde a donc une dimension cosmique et révèle la correspondance étroite entre univers spirituels et visibles – les Imâms étant la manifestation de ces Noms en ce monde et ce qui lui donne sa raison d’être.
L’Imâm est donc, comme nous l’avons évoqué, un "pont entre ciel et terre" permettant à la miséricorde divine d’embrasser le monde. Cet aspect nous permet de saisir le sens de la réponse de l’Imâm Bâqer lorsqu’on lui demanda à quoi servait l’Imâm : "Pour que le monde reste en bon ordre ! Et cela parce que Dieu Tout-Puissant suspend le châtiment pour les habitants de la terre s’il s’y trouve sur terre un Prophète ou un Imâm. Dieu Tout Puissant a dit : "Mais Dieu ne veut pas les châtier alors que tu es au milieu d’eux" (8:3). […] Par eux Dieu pourvoit aux besoins de Ses serviteurs ; par eux Ses pays sont construits ; par eux descend la pluie du ciel ; par eux sortent les bénédictions de la terre ; par eux est accordé un délai aux pêcheurs et [par eux] n’est pas précipité contre eux le châtiment, ainsi que la torture."
De nombreux textes de ziyârat adressés aux Imâms attestent de cette réalité : "Par vous, Dieu a commencé et par vous, Il va clore. Par vous, Il fait descendre la pluie et par vous, Il retient le ciel et l’empêche de tomber sur la terre, sauf avec Son autorisation. Par vous, Il dissipe les soucis et soulage de la misère, auprès de vous se trouve ce qu’ont révélé Ses Messagers et ce qu’ont descendu Ses Anges."
Selon la même logique, et comme le rappelle un hadith de l’Imâm Rezâ, les Imâms sont la clé de l’exaucement des prières : "Lorsque vous faites face à une difficulté, demandez de l’aide à Dieu par notre intermédiaire. C’est la parole même de Dieu qui a dit : "C’est à Dieu qu’appartiennent les noms les plus beaux. Invoquez-Le par ces noms" (7:180) ; J’en jure par Dieu, ce sont nous qui sommes les noms les plus beaux de Dieu, l’invocation d’une personne ne sera exaucée que par notre connaissance."
Les enseignements légués par les Imâms regorgent d’explications subtiles sur des questions aussi complexes que celles de l’Unicité divine : "Celui qui L’a décrit L’a limité, et celui qui L’a limité l’a compté , celui qui L’a compté a infirmé Son éternité. Celui qui demande : "Comment est-Il ?" L’aura décrit, et celui qui demande : "Où est-Il ?" L’aura situé dans un lieu particulier." , mais aussi sur la prophétie, le lien unissant l’homme à Dieu… : "Celui qui veut avoir une idée de sa considération auprès de Dieu, qu’il observe la considération qu’il donne à Dieu en lui, car Dieu donne à son serviteur la même considération que le serviteur donne à Dieu dans son âme." ; "Celui qui se connaît, connaît son Dieu." ; "Vous êtes redevables de mille remerciements obligatoires à chacun de vos souffles, et même de davantage."
Ces enseignements permettent de faire prendre conscience à l’homme de l’infinie bonté divine, tout en lui donnant une vision du monde basée sur l’unicité (tawhid) ainsi qu’un cadre de pensée sur la base de laquelle fonder sa réflexion et agir. Dans ce sens, l’invocation de l’Imâm Hossein le jour de ’Arafat contient des trésors d’unicité mis à la disposition de tous les croyants, et exprime avec une subtilité extrême la relation de Dieu au monde : "Quand as-Tu disparu pour que Tu aies besoin d’un indice qui te signale ? Quand T’es-tu éloigné pour que ce soient les traces, elles, qui me conduisent à Toi ? Aveugle l’œil qui ne Te voit pas."
En tant que manifestation la plus parfaite des différents Noms de Dieu, l’existence même de l’Imâm permet aux hommes de mieux connaître leur Créateur : "Connaît Dieu Tout-Puissant et L’adore, celui qui connaît son Imam [venant] de nous, Ahl al-Bayt. Celui qui ne connaît pas Dieu Tout-Puissant ni ne connaît son Imâm de nous, Ahl al-Bayt, alors il connaît et adore un autre que Dieu". Cette réalité ne remet pas en cause la transcendance divine, les Imâms insistant eux-mêmes dans de nombreux hadiths qu’ils sont avant tout des serviteurs (’ibâd) tenant l’ensemble de leurs perfections de Dieu et se situant dans une relation de dépendance absolue par rapport à Lui.
Outre les milliers de hadiths qui constituent de véritables trésors spirituels, les Imâms, et plus particulièrement l’Imâm Sajjâd, ont légué un grand nombre d’invocations d’une beauté et d’une profondeur uniques. Ces invocations enseignent au croyant comment s’adresser à Dieu, ce qu’Il faut Lui demander, lui apprennent à construire une relation avec Dieu, tout en dévoilant certains mystères de la Création et du lien unissant le croyant à son Créateur. Certaines de ces invocations peuvent ainsi être considérées comme de véritables traités gnostiques.
De par leur comportement, les Imâms apprennent aux croyants l’état d’esprit qu’il faut s’efforcer d’atteindre lorsque l’on veut s’adresser à Dieu. On rapporte que lorsqu’il allait faire ses ablutions en vue de la prière, l’Imâm Sajjâd devenait jaune et se mettait à trembler. Quand on lui en demandait la raison, il disait : "Savez-vous devant Qui je m’apprête à me tenir debout ?"
De nombreux hadiths renouvellent le message de pardon et de miséricorde de l’islam, et invitent le croyant à sans cesse s’adresser à Dieu et revenir vers Lui : "[…] Si vous ne faisiez pas de péchés pour que vous demandiez pardon à Dieu, Dieu aurait créé des créatures pour qu’elles fassent des péchés, puis demandent pardon à Dieu. Dieu leur pardonnerait alors. Le croyant est celui qui est mis à l’épreuve, qui revient sans cesse [à Dieu]. Vous n’avez pas entendu la parole de Dieu "Dieu aime ceux qui reviennent sans cesse à Lui et Il aime ceux qui se purifient" (2:222) et "Demandez pardon à Dieu, puis revenez à Lui" (9:3)." Dans ce sillage, l’Imâm Hossein évoque que "Si le serviteur savait à Qui il fait ses confidences, il ne cesserait pas."
On pourrait nous objecter que certains aspects abordés concernant le rôle des Imâms se raportent à une époque révolue, celle précédant l’occultation du Douzième Imâm et lorsque le croyant pouvait avoir un contact direct avec les Imâms. Or, il n’en est rien : tout d’abord parce que selon les croyances chiites, le Douzième Imâm demeure présent sur cette terre. Sur la base de sa wilâyat-e takwini , il guide intérieurement les croyants désireux de se rapprocher de Dieu et peut parfois se manifester à eux en rêve ou, plus rarement, dans la réalité. En outre, bien qu’ils n’aient plus de présence physique en ce monde, les onze autres Imâms n’en sont pas moins considérés comme vivants, et la visite de leur sanctuaire demeure une source de vivification de l’âme et un "chemin" vers Dieu. Ainsi, même après leur mort apparente, la présence et l’amour envers les Imâms demeurent à la source d’effets spirituels intarissables, suscitant des élans uniques de générosité, de courage, d’abnégation… du don de sa personne pour défendre une noble cause à celui de ses biens sous forme de waqf au bénéfice d’un sanctuaire, ou plus simplement au travers de la préparation d’un repas d’offrande en souvenir d’une naissance ou d’un martyre d’Imâm… Enfin, la portée des enseignements des Imâms, compilés dans de nombreux ouvrages, n’est pas limitée à une époque particulière : elle demeure une source de sagesse qui nourrit la pensée et la foi de tout croyant d’hier et d’aujourd’hui. L’ensemble de ces dimensions permet dès lors de mieux comprendre la portée du verset coranique révélé au sujet de la désignation de l’Imâm ’Ali comme successeur du prophète Mohammad qui ouvrit un nouveau cycle spirituel, celui de la wilâyat et de l’accomplissement du sens profond de la révélation : "Aujourd’hui, J’ai parachevé pour vous votre religion, et accompli sur vous Mon bienfait." (5:3)
http://www.islamopedia.fr/pages/qu-est-ce-que-l-islam/presentation-de-l-imamat.html
http://www.teheran.ir/spip.php?article1486
(Al-Ahzab V. 72 )
Toutes les composantes de l'Univers, à l'exception de l'Homme et des Jinns, ont décliné cette proposition divine, sachant que le choix d'être créés libres de choisir est une bien lourde responsabilité et une bien grave mission. Elles ont dit à ALLAH qui leur a permis de le dire, qu'elles sont bien incapables d'assumer la responsabilité de leur propre existence, et qu'elles ne pouvaient pas par conséquent, honorer parfaitement cette grave et lourde mission. Elles ont donc sollicité d'être asservies à la totale volonté d'ALLAH.
Et si le Seigneur ne nous avait pas informés de cela dans Son Livre Saint, le Coran, nous ne l'aurions pas su! Nous n'aurions pas su que la mission de toutes choses dans l'Univers, leur a été proposée dès l'instant initial!
Ainsi, les cieux, la Terre, les montagnes, et d'autres encore, dès lors qu'ils ont choisi en définitive d'être asservis, ils n'ont plus désormais de choix propre et sont créés astreints à l'obéissance dans l'absolu, à la volonté d'ALLAH.
Ils avaient décliné de supporter « Al Amana », ce dépôt en confiance que l'Homme, de son côté, a accepté de porter sur lui sans en mesurer les conséquences, enclin qu'il est à nuire à lui-même par ignorance.
Essayons de savoir ce que c'est « Al Amana »:
C'est un dépôt en confiance, qui consiste à confier une chose à quelqu'un, à terme, sans témoins ni preuve écrite, et de venir la reprendre, à terme échu, sans que la chose objet du dépôt ne soit sciemment altérée, diminuée, dénaturée ou perdue.
Or, Al Amana, elle, est un dépôt en confiance qui doit reposer sur la parole donnée, la loyauté, l’intégrité, la résistance à toute épreuve à toutes les tentations, et sur bien d’autres qualités.
Cela nous rapproche un peu mieux du sens donné par ALLAH (gàL) à ce dépôt en confiance qu’Il nous a fait, et qui, bien que lourd de conséquences, n’est pas pour nous subjuguer si nous savons nous en servir, car taillé à la juste mesure des possibilités de l’Homme et de ses capacités. Mais il s’adresse directement à sa conscience et il fait appel à toute sa vigilance.
C’est que la Mission qui a été proposée aux êtres et aux choses, dans l’Univers, est un véritable dépôt en confiance, que les uns ont décliné, et que les autres ont choisi d’assumer.
L’Homme est, de façon innée, le dépositaire d’Al Amana. C’est une véritable épreuve qu’il est invité à honorer en l’assumant correctement. Car, à la fin des Mondes - qui est inéluctable comme nous l’a annoncé notre Créateur - Allah nous demandera à tous, à ceux-ci et à ceux - là, des comptes sur la manière dont nous aurons pris soin (ou non) de Al Amana.
ALLAH demandera donc des comptes à toute Sa création, à terme échu, à la fin du Monde, afin de mettre en évidence par-devant chaque créature, la tâche et la mission accomplies, à quel degré, de quelle manière... selon les préceptes et la Loi divins.
Ainsi, pour l’Homme, l’heure de rendre des comptes viendra: celui qui n’aura pas accompli la Mission comme il se doit, n’aura rien à présenter devant le Seigneur et n’aura pas d’excuse: sa pesée sera allégée car il aura trahi la Mission divine qui est sa raison d’être ici-bas. Il aura failli à Al Amana.
Lorsque Al Amana a été proposée à l’Homme, donc le choix d’avoir une certaine liberté d’obéir ou de ne pas obéir aux décrets divins en ce monde, il crut, comme le lui ont fait croire ses propres penchants et son ignorance, qu’il pouvait assumer cette mission aisément et fidèlement. Et que par conséquent, il pouvait exécuter les ordres de son Seigneur et suivre, sans se départir, le chemin tracé par ALLAH (gàL), et qui devait pourtant le ramener à la demeure première de son père Adam, le Paradis.
Il se devait d’être fidèle à la mission, en exécutant les ordres divins, en vouant son adoration à ALLAH, en accomplissant la Salât (les cinq prières quotidiennes), et les autres obligations prescrites, en glorifiant son Seigneur et en le craignant, en s’assignant la piété et toutes autres œuvres dont ALLAH (gàL) l’a chargé.
http://www.islamjeunesse.com/eclairages/eclair5amana.php
1. Par islamiates le 02/07/2024
Salam Les sourates sont données à titre d'exemple. Merci pour votre réactivité